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Faits saillants

Chaque jour, les athlètes sont confrontés à de petites décisions qui peuvent avoir une incidence sur leurs performances, leur récupération et leur santé. Souvent, ces décisions concernent des choses qui peuvent sembler relativement insignifiantes pour le commun des mortels, et peuvent être aussi simples que les aliments à consommer ou les activités à éviter ou à pratiquer. En ce qui concerne la consommation de cannabis, les choses ne sont pas différentes.

En octobre 2018, la consommation de cannabis à des fins récréatives est devenue légale dans tout le Canada pour les personnes âgées de 19 ans et plus. Les données recueillies au cours des années qui ont suivi la légalisation de l’usage récréatif du cannabis suggèrent qu’un quart de tous les adultes canadiens, et près de la moitié de tous les Canadiens âgés de 20 à 24 ans, ont consommé du cannabis au cours de l’année écoulée (Gouvernement du Canada, 2021). Il est clair que la consommation de cannabis au Canada est très répandue dans la population générale. Mais qu’est-ce que les athlètes devraient prendre en compte lorsqu’il s’agit de consommer ou d’éviter le cannabis?

Dans ce billet de blogue, je présenterai un examen fondé sur la recherche de l’état actuel de la consommation de cannabis en relation avec le sport au Canada et je fournirai des conseils sur la façon dont les organismes de sport devraient aborder le sujet du cannabis avec les athlètes.

Contextualiser le cannabis

Pour commencer, il est important de comprendre ce qu’est le cannabis. Le terme « cannabis » désigne un groupe d’espèces végétales contenant des molécules uniques appelées « phytocannabinoïdes » ou, plus généralement, « cannabinoïdes ». Il existe des centaines de molécules cannabinoïdes différentes, mais les deux que la plupart des gens connaissent sont le delta-9-tétrahydrocannabinol (THC) et le cannabidiol (CBD). Le THC est le principal cannabinoïde responsable des effets psychologiques du cannabis recherchés par de nombreux consommateurs. En d’autres termes, le THC est responsable de l’effet de « gelé » que de nombreuses personnes associent à la consommation de cannabis. Le CBD, quant à lui, n’est généralement pas considéré comme provoquant des effets psychologiques, car il interagit avec les récepteurs chimiques des tissus de l’organisme d’une manière différente de celle du THC (Ahston, 2001). Bien que de nombreuses personnes aient tendance à se concentrer sur la manière dont chacun de ces cannabinoïdes affecte notre cerveau, il est important de comprendre que les deux peuvent avoir des effets sur d’autres tissus de notre corps. C’est l’une des raisons pour lesquelles les athlètes doivent faire preuve de prudence dans leur consommation de cannabis.

Au Canada, tout adulte de plus de 19 ans peut légalement consommer du cannabis contenant du THC ou du CBD à des fins récréatives, mais la situation est plus compliquée pour les athlètes. Tout d’abord, de nombreuses organisations sportives et organismes de réglementation considèrent les cannabinoïdes comme des substances interdites sous une forme ou une autre. Par exemple, l’Agence mondiale antidopage (AMA) interdit l’utilisation de cannabinoïdes pendant les phases de compétition de la saison (le CBD est notamment exempté) (Agence mondiale antidopage, 2022). Ceci est également pertinent pour les athlètes canadiens participant aux compétitions U-SPORTS, car ces règlements sont également appliqués par U-SPORTS et le Centre canadien pour l’éthique dans le sport (Centre canadien pour l’éthique dans le sport, n.d.). Deuxièmement, le cannabis étant illégal depuis longtemps, il est difficile de mener des recherches sur l’innocuité de sa consommation dans la population générale (Haney, 2020), et encore moins auprès des athlètes (Burr et coll, 2021). Il est donc extrêmement important que les athlètes comprennent qu’il existe très peu de recherches sur les nombreuses applications du cannabis dans le sport. Pour certains athlètes, chacun de ces faits peut suffire à les dissuader de consommer du cannabis, mais les recherches suggèrent que de nombreux athlètes continuent de consommer du cannabis à des fins récréatives (National Collegiate Athletic Association, 2018; Peretti-Watel et coll, 2003), voire pour améliorer leurs performances (Lorente et coll, 2005).

Examiner les raisons pour lesquelles les sportifs consomment du cannabis

Comme beaucoup d’autres personnes, les athlètes déclarent consommer du cannabis pour des raisons totalement étrangères au sport, y compris à des fins récréatives. En 2018, une étude menée par la NCAA auprès de ses propres athlètes étudiants a révélé que 25 % d’entre eux consommaient du cannabis à des fins récréatives (National Collegiate Athletic Association, 2018). À l’appui de cette étude, une revue systématique de la littérature évaluée par les pairs a mis en évidence une prévalence similaire de la consommation de cannabis au cours de la vie et de l’année écoulée dans les populations sportives de pays autres que les États-Unis (Docter et coll, 2020).

Au Canada, la pratique de l’usage récréatif du cannabis est parfaitement légale, à condition que l’athlète soit âgé de 19 ans ou plus, et que la nature de l’usage n’aille pas à l’encontre des politiques d’utilisation des substances des organismes sportifs qui réglementent leur sport respectif. Néanmoins, la consommation de cannabis à des fins récréatives, même en dehors de la phase de compétition d’une saison, peut toujours présenter des risques importants pour les athlètes. De nombreux cannabinoïdes peuvent être détectés dans des échantillons biologiques jusqu’à plusieurs jours après le moment de la consommation et bien après que les effets se soient dissipés (Huestis et coll, 1995). Il est donc tout à fait possible que la consommation de cannabis en dehors d’une compétition, mais à proximité de celle-ci, déclenche une infraction. Afin d’éviter ce genre de situation, l’AMA teste de nombreux cannabinoïdes en tant que « substances de référence », ce qui signifie qu’un certain niveau de cannabinoïdes doit être présent dans un échantillon, ce qui la rend un peu plus indulgente qu’une politique de type « tolérance zéro ». Cependant, malgré l’utilisation de seuils, les violations antidopage liées au cannabis ne sont pas rares dans l’athlétisme canadien (Centre canadien pour l’éthique dans le sport, n.d.).

En dehors de l’usage récréatif, il existe de plus en plus de preuves que certains athlètes consomment du cannabis dans le but d’améliorer leurs performances. Une enquête menée auprès de coureurs d’ultra-marathon a montré que les cannabinoïdes sont l’une des substances d’amélioration des performances les plus utilisées dans ce sport (Campian et coll, 2018). L’idée dominante pour expliquer comment le cannabis peut améliorer la performance dans ce sport est que certains des effets rapportés du THC, tels que la réduction de l’anxiété, des nausées et de la douleur, peuvent permettre aux athlètes d’atténuer l’anxiété, la douleur ou l’effort liés à l’exercice et, par la suite, de mieux performer.

À ce jour, il existe très peu de recherches sur la consommation de cannabis avant l’exercice. Les premières études ont montré que les patients souffrant de maladies cardiovasculaires atteignaient l’épuisement plus rapidement au cours d’un test d’exercice après avoir consommé du cannabis (Aronow et Cassidy, 1974, 1975). La première étude portant sur des participants en bonne santé a montré qu’à une fréquence cardiaque donnée, les participants n’étaient pas en mesure de travailler aussi dur après avoir consommé du cannabis (Steadward et Singh, 1975). Sur la base de cette constatation, les auteurs ont conclu que les performances maximales à l’exercice seraient réduites. Une étude ultérieure publiée sur le sujet et portant sur l’exercice maximal après consommation de cannabis a montré que les participants étaient incapables de s’exercer aussi longtemps au cours d’un test d’exercice de difficulté croissante, fournissant des preuves directes que le cannabis avait effectivement un effet négatif sur l’exercice maximal chez les personnes en bonne santé (Renaud et Cormier, 1986).

Bien que ces études fournissent des preuves que le cannabis contenant du THC réduit les performances à l’effort, il convient de faire quelques mises en garde. La principale mise en garde concernant toutes ces études est qu’aucune d’entre elles n’a utilisé de tests d’exercice imitant les compétitions sportives réelles, ni ne correspond aux exigences des sports dans lesquels les athlètes déclarent le plus souvent utiliser le cannabis pour améliorer leurs performances athlétiques. Ainsi, pour comprendre pleinement l’effet du cannabis sur les performances, les études devraient viser à utiliser des tests d’exercice plus pertinents, en particulier ceux qui imitent les exigences des sports pour lesquels les athlètes déclarent consommer du cannabis.

En outre, le cannabis récréatif disponible pour les athlètes sur le marché de consommation actuel est très différent du cannabis disponible à l’époque de ces premières études. Aujourd’hui, les consommateurs de cannabis ont beaucoup plus d’options quant à la manière dont ils consomment le cannabis. Bien que de nombreuses personnes pensent que le cannabis se fume ou s’inhale, les consommateurs d’aujourd’hui peuvent également manger ou boire des produits à base de cannabis. Récemment, une étude menée à l’université d’État du Colorado a examiné les effets des produits comestibles à base de cannabis sur de nombreux tests de performance cycliste. Leurs résultats diffèrent des études menées il y a 40-50 ans, montrant que le cannabis n’avait aucun effet sur les performances dans les tests utilisés (Ewell et coll, 2022), ni sur la façon dont le système cardiovasculaire réagissait à l’exercice. Bien que toutes ces études fournissent des informations précieuses sur l’effet du cannabis sur les performances, il convient de reconnaître que de nombreuses questions restent sans réponse. Par exemple, la méthode d’inhalation a-t-elle une importance? Que se passe-t-il si le cannabis est consommé plus loin du début de l’exercice? Et si nous modifions la composition en cannabinoïdes du cannabis?

Chacune de ces questions souligne le fait qu’à l’heure actuelle, il y a beaucoup plus de choses inconnues que de choses connues sur l’effet du cannabis sur les performances. S’il existe des preuves que le cannabis a un effet négatif ou n’a pas d’effet sur les performances, il n’existe aucune preuve empirique suggérant qu’il a des effets bénéfiques. En outre, très peu de recherches ont systématiquement évalué si la consommation de cannabis avant l’exercice menace la sécurité de l’athlète ou introduit un risque supplémentaire pour la santé. Ce seul fait devrait être une raison suffisante pour que les athlètes évitent de consommer du cannabis avant l’exercice. Compte tenu de ces éléments et du fait que la consommation de cannabis est interdite en compétition dans de nombreux sports, les athlètes devraient éviter de consommer du cannabis en même temps que l’exercice. Même si le cannabis pouvait apporter des bénéfices qui l’emportent sur les risques, il y a très peu de preuves existantes qui suggèrent que le cannabis utilisé en conjonction avec l’exercice physique devrait apporter un quelconque bénéfice. Les athlètes, les entraîneurs et les organismes sportifs devraient rester attentifs aux nouvelles recherches dans ce domaine qui, espérons-le, verront le jour dans les années à venir et nous permettront d’approfondir nos connaissances sur l’impact de la consommation de cannabis sur les performances.

Ce que dit la recherche sur le CBD et l’exercice

Si l’utilisation du cannabis entier dans le sport est relativement courante, beaucoup savent que l’utilisation du CBD dans le sport est encore plus populaire. En fait, il est sans doute encore plus important de faire des choix éclairés concernant le CBD, étant donné que le CBD n’est pas une substance interdite par l’AMA et, par conséquent, par de nombreux organismes sportifs. Le CBD est devenu un supplément de plus en plus populaire pour la récupération et la performance en raison d’une série d’allégations comprenant l’anti-inflammation, les propriétés antioxydantes, la promotion du sommeil et le soulagement de la douleur (Gamelin et coll, 2020; Rojas-Valverde, 2021). L’idée dominante est que nombre de ces effets seraient bénéfiques pour la récupération après un exercice intense ou des activités physiquement exigeantes pour les tissus de notre corps.

Bien que cette idée puisse sembler intuitive à première vue, il existe de nombreuses mises en garde concernant les recherches qui soutiennent l’utilisation du CBD par les athlètes, et la question de savoir si ces effets seraient bénéfiques pour les athlètes. Abordons tout d’abord l’allégation la plus importante concernant le CBD, à savoir que ses propriétés anti-inflammatoires sont bénéfiques pour la récupération. Une méthode courante pour tester la capacité d’un produit à favoriser la récupération dans un laboratoire de recherche consiste à vérifier dans quelle mesure les performances sportives peuvent être préservées par une intervention donnée, après un exercice exigeant qui entraîne un certain degré de lésions musculaires. En d’autres termes, les études demandent souvent aux participants d’effectuer un exercice, puis de mesurer soit les lésions tissulaires, soit les performances lors d’un exercice ultérieur avec et sans l’intervention (dans ce cas, le CBD).

À ce jour, trois études (Cochrane-Snyman et coll, 2021; Crossland et coll, 2022; Isenmann et coll, 2021) menées sur des participants humains ont examiné si le CBD était efficace pour atténuer les lésions musculaires et les baisses de performance associées à l’exercice de résistance. Ces études ont donné des résultats mitigés mais largement décevants. L’une de ces études a montré que le CBD peut réduire les marqueurs sanguins de l’inflammation et des dommages musculaires après un exercice dommageable, et que le CBD peut avoir permis aux participants de récupérer leur performance au squat 72 heures après l’exercice (Isenmann et coll, 2021). Cependant, les deux autres études examinant la manière dont le CBD pourrait affecter les dommages musculaires et la fatigue ont montré que le CBD ne différait pas du placebo, quelle que soit la mesure, liée à la performance ou à l’inflammation (Cochrane-Snyman et coll, 2021; Crossland et coll, 2022).

Par conséquent, ces études fournissent peu de preuves, voire aucune, suggérant que les effets anti-inflammatoires potentiels du CBD sont bénéfiques pour la récupération. Il est également important de noter que l’utilisation de médicaments anti-inflammatoires après l’entraînement peut ne pas avoir les effets escomptés, car des études ont montré que l’inflammation peut être importante pour l’adaptation à l’entraînement, et ces types de produits peuvent atténuer cette réponse (Owens et coll, 2019). En ce qui concerne l’atténuation de la douleur après l’exercice, les recherches sont encore moins nombreuses. Bien qu’il n’existe pas d’études expérimentales en laboratoire évaluant si le CBD modifie la douleur associée à l’exercice, une enquête menée auprès d’athlètes de rugby a montré que même si 80 % des athlètes qui utilisaient du CBD le faisaient dans l’intention d’améliorer leur récupération ou d’atténuer la douleur, seuls 14% d’entre eux ont perçu un quelconque bénéfice (Kasper et coll, 2020).

Les recherches sur la capacité du CBD à améliorer le sommeil des athlètes sont tout aussi rares. La plupart des recherches effectuées à ce jour sur les effets du CBD sur le sommeil ont porté sur des populations cliniques plutôt que sur des athlètes, et une seule étude a rapporté que le CBD améliorait l’apparition et la qualité perçue du sommeil (Carlini et Cunha, 1981). Une autre étude menée sur des participants en bonne santé n’a montré aucun effet sur la qualité subjective du sommeil ou sur les mesures objectives de la qualité du sommeil après l’utilisation du CBD (Linares et coll, 2018).

Bien que le CBD ait été principalement étudié comme aide à la récupération pour les athlètes, il est également possible que certains de ses effets présumés liés à la douleur et à l’anxiété puissent créer une certaine utilité pour l’amélioration des performances. À ce jour, une seule étude a examiné les effets aigus du CBD sur la performance et la réponse du corps à l’exercice (Sahinovic et coll, 2022). Un groupe de recherche de l’Université de Sydney a demandé à des participants de courir à un rythme régulier et à des vitesses croissantes jusqu’à l’épuisement après avoir consommé du CBD par voie orale. Les résultats de cette étude ont montré que malgré de petites différences dans la quantité maximale d’oxygène consommée et les sensations de plaisir pendant l’exercice après la prise de CBD, le temps jusqu’à l’épuisement n’était pas affecté, ce qui suggère que le CBD n’altère guère les performances et n’a probablement que des effets mineurs sur les réponses physiologiques et psychologiques à l’exercice.

Lorsque l’on se penche sur la recherche, il ne faut pas longtemps pour se rendre compte que de nombreuses allégations liées à l’utilisation du CBD n’ont pas été prouvées et qu’il reste encore beaucoup de travail à faire avant que les athlètes ne pensent que l’utilisation du CBD est sans équivoque une bonne idée. À l’heure actuelle, il existe peu de preuves suggérant que le CBD présente un quelconque avantage pour les athlètes, qu’il s’agisse de récupération ou de performance. Outre l’absence de bénéfices physiologiques, le CBD peut présenter ses propres risques en matière de lutte contre le dopage. Bien que le CBD ne soit généralement pas une substance interdite, les produits à base de CBD peuvent en fait contenir du THC, une substance interdite. De plus en plus de recherches ont montré que de nombreux produits à base de cannabis, y compris les produits à base de CBD, ne sont pas correctement étiquetés (Johnson et coll, 2022; Vandrey et coll, 2015). Une autre analyse de 23 produits à base de chanvre (une forme de cannabis à partir de laquelle de nombreux produits à base de CBD sont fabriqués) a montré que beaucoup d’entre eux contenaient un large éventail de cannabinoïdes, dont environ 30 % contenaient suffisamment de cannabinoïdes pour entraîner une violation des règles antidopage si les échantillons avaient été prélevés dans les 8 heures suivant la consommation (Mareck et coll, 2022).

Dernières réflexions

Pour les athlètes, les entraîneurs et les organismes sportifs, le paysage de l’approche de l’utilisation du cannabis dans le sport en 2023 reste incertain. Depuis la légalisation de l’usage récréatif au Canada, les athlètes du pays n’ont jamais eu autant accès à une gamme de produits commercialisés pour un large éventail d’allégations qui peuvent sembler attrayantes. Cela dit, il reste des lacunes importantes dans la recherche qui doivent être comblées avant que les produits à base de cannabis ou de dérivés cannabinoïdes puissent être recommandés en toute confiance à tout athlète cherchant à tirer profit de leur utilisation. Compte tenu des risques associés à la contamination des produits et des inconnues potentielles concernant la sécurité des produits, il y a peu de raisons de suggérer qu’à l’heure actuelle, les avantages éventuels de l’utilisation des cannabinoïdes dans le sport sont plus importants que les risques actuels.

Points saillants 

Sport de qualité. Sport fondé sur des valeurs. Sport sécuritaire. Développement positif des jeunes. Sport centré sur la personne. Sport centré sur l’athlète. Approches globales.  

Ce ne sont là que quelques-uns des nombreux termes utilisés dans le secteur du sport pour parler des différentes façons d’aborder la prestation, les programmes et la culture du sport. Que vous soyez novice dans le domaine du sport ou un membre expérimenté du personnel, un participant ou même un parent sportif, il n’est pas rare d’entendre ces termes et de ressentir un sentiment de confusion. Que signifient-ils? Pourquoi sont-ils importants? Et surtout, comment les mettre en œuvre? 

Dans cet article, nous examinons trois approches de la prestation de programmes sportifs que les chercheurs et les praticiens du sport recommandent pour leur potentiel d’optimisation de l’expérience sportive : le sport de qualité, le sport fondé sur des valeurs et le sport sécuritaire. Nous définissons ces approches, ce que les données probantes disent à leur sujet, et nous montrons en quoi elles sont similaires ou différentes les unes des autres. 

Sport de qualité  

Dans la littérature académique, une approche de qualité de la participation sportive signifie que les participants considèrent leurs expériences comme agréables et satisfaisantes en fonction de leurs propres préférences et valeurs (Evans et coll., 2018). Plus précisément, les chercheurs définissent la participation de qualité au sport comme une exposition répétée à des expériences, des programmes ou des environnements positifs qui favorisent le développement et la participation des athlètes à long terme (Côté et coll., 2014, Yohalem et Wilson-Ahlstrom, 2010). 

Des données probantes suggèrent que lorsque les besoins d’une personne sont satisfaits et que les participants aiment leurs expériences sportives, ils sont considérablement plus susceptibles de continuer à faire du sport (Caron et coll., 2019; Ryan et Deci, 2017). Avec une exposition répétée à des expériences positives, ils seront également plus susceptibles de récolter les bénéfices physiques, sociaux et mentaux de la pratique sportive (Caron et coll., 2019; Martin Ginis et coll., 2017). Cela signifie que la priorité accordée à la qualité de la programmation est importante pour une participation à long terme et un développement sain.  

Il est important de reconnaître que les organismes appliquent ces définitions à leur manière ou utilisent un langage légèrement différent pour exprimer leurs objectifs spécifiques en matière de sport de qualité. Par exemple, Sport pour le vie utilise le terme « sport de qualité » et fait la promotion du cadre du développement à long terme (DLT) dans le sport et l’activité physique comme guide pour réaliser des expériences positives dans le sport et l’activité physique pour les personnes tout au long de leur vie. Selon Sport pour la vie, le sport de qualité est approprié au développement, sécuritaire et inclusif, et bien géré. En d’autres termes, le sport de qualité consiste en de bons programmes, dirigés par de bonnes personnes, dans de bons endroits.  

D’autre part, le projet canadien sur la participation sociale des personnes en situation de handicap (PCPSPH) encourage la participation de qualité au sport et à l’activité physique pour les personnes en situation de handicap. Selon le PCPSPH, la qualité de la participation est atteinte lorsque les athlètes ayant un handicap considèrent que leur participation au sport est satisfaisante et agréable, et qu’ils obtiennent des résultats qu’ils jugent importants. Pour parvenir à une participation de qualité, les participants doivent être exposés de manière répétée et durable à des expériences de qualité au fil du temps. Six éléments contribuent à une expérience de qualité (Martin Ginis et coll., 2017) :  

Pour soutenir ces éléments, des conditions appropriées dans les environnements physique (par exemple, des installations accessibles, l’accès à l’équipement), social (par exemple, la connaissance de l’entraîneur ou de l’instructeur, les amitiés, le soutien familial) et du programme (par exemple, la taille du programme, le soutien financier) doivent être en place (Evans et coll., 2018). Bien que le cadre du PCPSPH ait été élaboré pour les personnes en situation de handicap, il peut être appliqué aux participants au sport dans tous les contextes. 

Le schéma directeur du PCPSPH pour assurer une participation de qualité au sport et à l’activité physique.

 

Une variété d’outils et de ressources pratiques ont été créés pour guider les organisations sportives et les responsables de programmes dans la promotion de programmes sportifs de qualité. Par exemple, Sport pour la vie a créé une liste de contrôle du sport de qualité et un guide du sport de qualité pour les communautés et les clubs. Par ailleurs, le PCPSPH a créé le Plan d’action pour une participation de qualité dans le sport, un outil destiné à aider les responsables de programmes sportifs à favoriser des expériences de qualité pour les enfants, les jeunes et les adultes en situation de handicap, ce qui mène à une participation de qualité au fil du temps. Le plan d’action a également été adapté aux enfants et aux jeunes ayant une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre autistique. En fin de compte, pour créer des expériences sportives de qualité, il faut comprendre les besoins uniques de vos programmes et de vos athlètes afin d’identifier les valeurs et les composantes du programme sur lesquelles vous devriez vous concentrer et établir des priorités. 

Sport fondé sur des valeurs  

L’objectif de la prestation d’un sport fondé sur des valeurs est de créer un environnement qui encourage des valeurs comme (mais pas exclusivement) le bon caractère, le savoir-faire physique, la communauté et l’appartenance. Un autre objectif du sport fondé sur des valeurs est de créer de bons citoyens et des personnes équilibrées grâce au sport. Cependant, cette approche de la prestation du sport est plus explicite dans son utilisation des valeurs et de la morale pour atteindre son objectif, comparativement aux autres approches décrites dans cet article.  

L’adoption et la promotion des valeurs dans le sport canadien ont été préconisées par des communautés et des organismes comme Collaborative Community Coaching (C3)™, le Sport Law & Strategy Group, le Centre canadien pour l’éthique dans le sport (CCES) et Sport pur. 

Il convient de souligner que le CCES est un organisme national indépendant sans but lucratif qui s’engage à améliorer le sport. Pour ce faire, le CCES travaille en collaboration avec des partenaires afin d’assurer un système sportif fondé sur des valeurs, de protéger l’intégrité du sport contre les forces négatives du dopage et d’autres menaces contraires à l’éthique, et de défendre un sport juste, sécuritaire et ouvert à tous. Sport pur est une initiative du CCES conçue pour donner aux personnes, aux collectivités et aux organismes les moyens de tirer parti des avantages du sport sain à partir d’une plateforme de valeurs et de principes communs. En tant que chef de file du réseau sportif fondé sur des valeurs, le CCES croit que la mobilisation des principes de Sport pur, sur le terrain de jeu et à l’extérieur, contribuera à un changement positif dans la culture sportive canadienne.  

Les 7 principes du sport pur

Les approches fondées sur les valeurs fonctionnent sur la conviction que le sport présente de nombreux avantages physiques, sociaux et mentaux, mais que ces avantages ne sont pas garantis par la simple pratique du sport (Bean et coll., 2018). Le rapport Sport pur 2022, demandé par le CCES, recommande que pour que le sport soit un « sport sain », les valeurs et les principes doivent être mis en action (par exemple, intégrés dans les politiques, les pratiques et les programmes) et fonctionner ensemble à tout moment. S’appuyant sur des recherches récentes, le rapport mentionne que lorsque cela se produit, les participants et les communautés en bénéficient.  

Bien qu’elles soient préconisées et mises en œuvre dans les organisations depuis de nombreuses années, les approches fondées sur les valeurs n’ont pas encore été étudiées en profondeur dans la littérature universitaire. Néanmoins, l’objectif reste similaire à celui des approches précédentes, à savoir répondre aux besoins humains et de développement fondamentaux des participants. 

Bien que les chercheurs cherchent encore à savoir si l’enseignement explicite des valeurs est nécessaire pour que les participants les acquièrent (par opposition à leur obtention organique par le « bon sport »), la morale et les principes promus par le sport fondé sur les valeurs sont universellement positifs (Bean et coll., 2018).  

La principale caractéristique des approches des programmes sportifs fondés sur les valeurs est qu’elles sont intentionnelles et claires avec les valeurs et l’objectif des activités auxquelles les participants prennent part. Selon Jones et McLenaghen, un bon point de départ pour une organisation ou un club qui cherche à adopter cette approche est de développer un « accord fondé sur les valeurs ». En d’autres termes, il s’agit de se mettre d’accord sur les valeurs et les principes de votre organisation et de les promouvoir dans l’ensemble de vos programmes. Une partie du programme d’éducation basée sur les valeurs du CCES comprend également un accord basé sur les valeurs comme étape essentielle pour guider et clarifier l’objectif de votre communauté pour les athlètes, les entraîneurs et les dirigeants, et pour atteindre l’objectif de favoriser les valeurs à travers vos programmes.  

Le CCES fournit des suggestions supplémentaires pour ceux qui veulent faire une différence positive dans leur sport et leur communauté :  

Sport sécuritaire  

Le mouvement pour un sport sécuritaire vise à optimiser l’expérience sportive de tous les acteurs du sport, y compris, mais sans s’y limiter, les administrateurs, les officiels et le personnel de soutien. Pour optimiser l’expérience, les parties prenantes devraient avoir l’espoir raisonnable que l’environnement sportif sera non seulement exempt de toute forme de maltraitance (par exemple, abus, négligence, intimidation, harcèlement et discrimination), mais qu’il sera aussi : 

Le sport sécuritaire va au-delà de la prévention des dommages physiques, psychologiques et sociaux pour inclure la promotion des droits des participants (Gurgis et Kerr, 2021). Selon Gretchen Kerr, experte universitaire et leader du mouvement pour un sport sécuritaire, ce dernier n’a pas l’intention d’abandonner complètement les résultats sportifs, mais met plutôt l’accent sur des méthodes saines, sécuritaires et inclusives pour obtenir des résultats de performance.   

Alors que les témoignages de discrimination, de harcèlement, d’abus et d’autres formes de maltraitance dans le sport continuent de faire surface, la littérature consacrée au sport sécuritaire et à la protection dans le sport s’est considérablement développée. En particulier, des études récentes ont démontré comment des environnements sportifs non sécuritaires et la maltraitance contribuent aux problèmes de santé mentale des participants et à leur retrait du sport (Battaglia et coll., 2022).  

Par exemple, dans un article récent du SIRCuit, une équipe de chercheurs (Eric MacIntosh, Alison Doherty et Shannon Kerr) a décrit les résultats d’une étude examinant les perceptions des athlètes sur les environnements sécuritaires et non sécuritaires dans le sport de haut niveau. Les chercheurs ont identifié le comportement des entraîneurs et des coéquipiers (comme l’agression, l’exclusion et le dépassement des limites), ainsi que le manque de ressources et l’inattention du système sportif (c’est-à-dire le manque de responsabilité, d’attention et/ou d’action) comme les principaux facteurs contribuant à des environnements sportifs dangereux. En revanche, les athlètes ont déclaré qu’ils se sentaient plus en sécurité lorsqu’ils avaient un entraîneur bien informé, que les intérêts des athlètes étaient prioritaires, que les règlements étaient respectés, qu’ils avaient accès à un soutien auxiliaire (comme la physiothérapie et le conseil) et qu’il existait un sentiment de communauté entre les athlètes et les entraîneurs.  

Selon les experts, l’adoption d’un cadre fondé sur des valeurs où l’inclusion, la sécurité, l’équité et l’accessibilité sont encouragées parallèlement à des stratégies visant à prévenir les dommages et les abus semble essentielle pour optimiser les expériences des participants au sport (Gurgis, 2021). En gardant à l’esprit la sécurité du sport, Donnelly et Kerr (2018) recommandent aux organisations sportives de s’engager dans les stratégies suivantes : 

Le Code de conduite universel pour prévenir et traiter la maltraitance dans le sport (CCUMS), élaboré par une collaboration d’organismes nationaux de sport et de chercheurs canadiens en 2019, a fait l’objet d’une récente mise à jour et constitue également un outil essentiel pour les communautés et les organismes lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre des pratiques sportives sécuritaires. La dernière version comprend des stratégies de prévention pour tous les niveaux des organismes de sport canadiens et des lignes directrices sur la façon d’aborder la maltraitance si elle se produit.  

Les violations du CCUMS font l’objet d’une enquête et sont sanctionnées par le Bureau du commissaire à l’intégrité du sport (BCIS). Ce denier est le pivot central du programme « Pour un sport sans violence », le système indépendant canadien de prévention et de traitement de la maltraitance dans le sport. Le Centre de règlement des différends sportifs du Canada (CRDSC) a lancé le programme « Pour un sport sans violence » en 2022 après une recherche approfondie et une consultation nationale auprès de plus de 75 organismes différents. Le gouvernement du Canada a choisi le CRDSC pour élaborer et mettre en œuvre ce nouveau mécanisme de sport sécuritaire au niveau national en 2021.  

Le programme « Pour un sport sans violence » donne accès à un large éventail de ressources, toutes disponibles en anglais et en français, notamment : 

Vous pouvez visiter le site Web du SIRC sur le sport sécuritaire pour obtenir plus de ressources sur le sport sécuritaire, y compris des documents de politique et des recherches pertinentes. Pour l’éducation et la formation en matière de sport sécuritaire, l’Association canadienne des entraîneurs offre une formation sur le sport sécuritaire, un module de formation en ligne gratuit. Le Groupe Respect offre également une formation sur le respect dans le sport destinée aux entraîneurs et aux responsables de programmes, ainsi qu’aux parents.  

Conclusion 

Il existe plusieurs approches fondées sur des données probantes que les chercheurs et les organismes de sport encouragent et auxquelles vous pouvez adhérer pour promouvoir des expériences positives et combattre les cultures néfastes dans le sport et la société. Le sport de qualité, le sport fondé sur des valeurs et le sport sécuritaire sont trois approches communes promues par les chercheurs et les praticiens du sport pour optimiser les expériences et les résultats des participants au sport. Bien qu’elles aient leurs différences, chacune de ces approches reconnaît le sport comme un contexte permettant aux communautés et aux participants d’en tirer de précieux avantages. Ces approches promeuvent des morales et des principes qui visent à satisfaire les besoins humains fondamentaux tels que l’appartenance, la sécurité et la confiance, ce qui favorise un développement sain et le bien-être général de tous les participants au sport. En fin de compte, l’objectif de chaque approche est d’encourager les expériences sportives positives qui contribuent à l’épanouissement des personnes et des collectivités. 

Faits saillants:

« Je ne suis pas un entraîneur de sport. Je suis un entraîneur de la vie. » Dane Baugh, coordonnateur de programmes sportifs, MLSE LaunchPad

Tous les sports peuvent-ils être considérés comme des opportunités de sport au service du développement? 

Le sport au service du développement (SSD) est l’utilisation intentionnelle du sport et de l’activité physique pour bâtir des communautés saines et aider les gens à atteindre leur plein potentiel, souvent par l’intégration du sport avec des approches de développement positif pour améliorer l’efficacité globale. Dans le contexte de la jeunesse de base, le SSD consiste autant à fournir un environnement de soutien où les jeunes peuvent se développer en tant que personnes, qu’un lieu d’entraînement et de compétition.

Le rapport d’évaluation de la Politique canadienne du sport (PCS) de 2012 a montré que si les initiatives en faveur des jeunes étaient le type d’initiative de SSD le plus courant, elles étaient le plus souvent appliquées dans des environnements sportifs à l’échelle communautaire et non dans l’athlétisme de haut niveau. En d’autres termes, alors que les approches de développement positif des jeunes sont plus courantes dans les contextes traditionnels de loisirs, de jeu et d’essai d’un sport, les dirigeants et les athlètes de sport de compétition n’ont généralement pas été exposés à un entraînement qui cible et atteint des résultats de développement positif fondés sur les aptitudes à la vie quotidienne.

Alors que le Canada se dirige vers le renouvellement et l’adoption d’une nouvelle politique pour guider les dix prochaines années, on s’attend à une intégration plus poussée. L’analyse de l’environnement du renouvellement de la PCS en 2021, par exemple, fait état de recommandations pour un sport plus équitable et plus inclusif dans son ensemble, qui réunit différentes approches et différents acteurs. Le Rapport sur ce que nous avons entendu de 2023, qui servira de base au renouvellement de la PCS, a montré que les Canadiens croient que le système sportif a la possibilité de promouvoir des valeurs et des résultats positifs au-delà du sport, notamment à la maison, à l’école et dans la communauté. Les deux tiers des personnes interrogées dans le cadre d’un sondage national ont indiqué que les approches de développement durable du sport devraient être intégrées dans d’autres contextes de participation sportive dans la nouvelle politique, plutôt que d’être considérées comme un contexte de participation distinct.

Cet article s’appuie sur les récentes conclusions du rapport Change the Culture, Change the Game (Changer la culture, changer le jeu) de la Maple Leaf Sports & Entertainment Foundation. Il prolonge les recommandations pratiques et les approches exprimées par plus de 8 200 jeunes et parents de l’Ontario, à l’intention des organismes sportifs et des administrations qui cherchent à promouvoir une culture plus positive pour les jeunes dans le sport. Nous plaidons pour que tous les environnements sportifs intègrent une approche de SSD et proposons des exemples pour commencer.

Perspectives sur la confiance, l’inclusion et la culture sportive des jeunes

Le projet de recherche Change the Game de la Fondation MLSE, mis en œuvre en collaboration avec le Dr Simon Darnell, directeur du Centre d’études de la politique du sport de l’Université de Toronto, a interrogé les jeunes et les parents sur la façon dont les questions d’accès au sport, d’obstacles, d’équité et de culture se posent pour eux.

Du point de vue des jeunes, les indicateurs de confiance et d’inclusion restent préoccupants. Dans un échantillon de recherche représentatif de la diversité sur le plan de l’âge, du genre, de la race, de la géographie, de la capacité et du revenu familial, 82 % des répondants ont déclaré n’avoir personne à qui parler de leurs expériences en matière de racisme ou de discrimination dans le sport. Cette proportion augmente chez les femmes et les filles latino-américaines (89 %), les jeunes du Nord de l’Ontario (91 %) et les jeunes ayant une déficience visible (94 %). Bien que les incidents de racisme et de discrimination dans le sport demeurent disproportionnés chez les jeunes Noirs, les jeunes Autochtones, les femmes, les filles et les jeunes en situation de handicap, le manque de confiance perçu entre les coéquipiers, les entraîneurs et les fournisseurs de services sportifs brosse un portrait peu reluisant d’un environnement sportif qui n’est pas un espace authentiquement sécuritaire pour les personnes qu’il est censé servir. 

D’un point de vue qualitatif, les jeunes et les parents ont raconté des histoires et des détails sur la façon dont se perpétue une culture du silence autour des questions de sécurité et de qualité dans les environnements sportifs. Les jeunes qui ont été directement victimes d’un événement indésirable déclarent qu’ils ne se sentent pas à l’aise pour soulever ou signaler le problème parce qu’ils n’ont pas confiance dans le fait que leurs coéquipiers, leurs entraîneurs ou l’organisation les soutiendront. En outre, les jeunes et les parents qui étaient au courant d’un incident grave ayant affecté quelqu’un d’autre ont exprimé leur anxiété quant à l’opportunité de s’exprimer ou de s’engager sur la question par crainte de perdre leur place ou celle de leur enfant dans l’équipe.

Au milieu du discours généralisé sur le sport sans risque et de plusieurs cas récents et très médiatisés de cultures toxiques dans le hockey, le basketball, la gymnastique, le soccer et dans l’ensemble du paysage sportif, il est important de se demander à quoi ressemble le changement du point de vue des jeunes, et comment y parvenir. Si des cultures plus inclusives et positives, des relations de confiance et des environnements physiquement et psychologiquement sûrs pour les jeunes athlètes sont les éléments constitutifs de l’avenir que nous voulons construire, quelle est la prochaine étape?

Pour commencer, écoutons ce qu’ils ont à dire.

Les jeunes et les parents demandent que le sport au service du développement fasse partie de la solution

Les résultats du projet de recherche Change the Game 2022 nous ont laissé un plan d’action fondé sur des données probantes pour aller de l’avant avec les changements nécessaires pour soutenir l’accès, l’engagement et l’équité en matière de sport pour les jeunes. L’intégration d’aspects de SDD dans les espaces sportifs pour les jeunes est essentielle. À la Fondation MLSE, nous voyons une formidable opportunité d’utiliser le sport pour répondre à la crise croissante de la santé mentale des jeunes après la pandémie, et une demande pour des programmes sportifs qui développent des compétences de vie autant que des compétences sportives.

Parmi les quelque 8200 jeunes Ontariens dont les voix sont représentées dans ce riche ensemble de données, près de 60 % ont exprimé leur soutien aux programmes de sport utilisés pour enseigner et développer les aptitudes sociales, émotionnelles et développementales chez les jeunes. Ces thèmes étaient particulièrement répandus chez les jeunes en situation de handicap, les jeunes noirs, autochtones, sud-asiatiques et métis, et les jeunes de l’Est de l’Ontario et de la région du Grand Toronto.

Les jeunes et les parents ont clairement indiqué que les obstacles liés à l’accessibilité financière, les préoccupations constantes en matière de santé et de sécurité et les facteurs sociaux laissent trop d’entre eux sur la touche. Les principaux facteurs sociaux sont en grande partie liés à la réalité post-pandémie de la diminution des liens sociaux soulignée dans d’autres recherches, notamment dans le rapport 2022 sur le capital social de la Toronto Foundation. Les Canadiens, y compris les jeunes, ont des contacts moins fréquents chaque semaine avec des personnes extérieures à leur foyer et interagissent en personne avec des cercles de famille et d’amis plus restreints qu’avant la pandémie. Ces changements ont une incidence sur la capacité à pratiquer des sports d’équipe et sur la probabilité de s’inscrire avec un ami – un facteur connu pour faciliter la participation, en particulier chez les filles. Les obstacles socio-environnementaux comprennent également le manque d’accès aux installations locales et l’absence de moyens de transport pour se rendre aux programmes sportifs, ce qui affecte particulièrement les jeunes des communautés nordiques, rurales et éloignées dans le cadre du projet de recherche Change the Game. Les jeunes se sont également exprimés clairement sur ce qui constitue un environnement sûr et inclusif. Les jeunes veulent un système axé sur des opportunités saines et prosociales, fournies par des organisations où la culture est physiquement et psychologiquement sûre. Les approches fondées sur les forces, qui mettent l’accent sur l’autodétermination et les forces des jeunes et les considèrent comme des personnes pleines de ressources et résilientes, sont à la base des offres de SDD et rappellent aux dirigeants sportifs et aux jeunes que nous servons de se voir sur le plan des atouts et du potentiel, et non des risques et des défauts.

Les jeunes et les parents qui s’inscrivent pour jouer recherchent un endroit sûr pour nouer ou développer des amitiés et des relations saines. Outre l’accessibilité financière, le manque d’amis ou de pairs avec qui jouer et le fait de ne pas se sentir bienvenu ou inclus dans une équipe sont les plus grands obstacles à l’engagement dans le sport qui ressortent de la pandémie de la COVID-19. Le fait de ne pas avoir de camarades de jeu était particulièrement préoccupant pour les filles. La recherche a également révélé une corrélation extrêmement forte entre la participation au sport et le sentiment d’appartenance, soulignant le potentiel des opportunités sportives en tant que catalyseurs puissants pour construire une communauté parmi les jeunes, même dans le contexte d’une déconnexion sociale post-pandémie. Ces résultats soulignent que les approches de développement durable constituent un investissement vital dans les communautés où le lien social et le capital ont été gravement compromis, y compris les communautés sportives.

Mesures pratiques pour promouvoir une culture positive pour les jeunes dans le sport

Cultures fondées sur la force. Des espaces sûrs pour nouer des relations saines. Des environnements positifs pour apprendre et se développer. Les changements culturels de cette nature sont souvent cités comme des priorités pour résoudre les problèmes de toxicité dans le paysage sportif, sans que l’on définisse ce à quoi cela pourrait ressembler en termes pratiques. Voici cinq domaines d’action initiaux que les organisations sportives et les administrateurs peuvent prendre en considération lorsqu’ils réfléchissent à la manière de commencer.

  1. Promouvoir un environnement accueillant : « Miser sur le plaisir et les réalisations »

La mise en place d’environnements accueillants et sûrs pour les athlètes, les participants, le personnel et les bénévoles commence au niveau de l’organisation par la promotion de cultures inclusives. La culture est un terme souvent utilisé dans le sport, mais il devient de plus en plus important lorsque l’on met le mot au pluriel et que l’on considère intentionnellement les expériences vécues uniques et diverses que les personnes apportent à chaque organisation.

En adoptant une approche plus globale, les organisations peuvent développer et vivre des valeurs fondamentales qui imprègnent leur travail et guident la planification, les actions et les décisions de manière à ce que chacun se sente le bienvenu. Des principes tels que la confiance et le respect, par exemple, restent essentiels pour créer des environnements positifs, mais nous encourageons les organisations sportives à développer des valeurs fondamentales qui sont significatives et uniques pour elles et pour l’incidence et les résultats qu’elles s’efforcent d’atteindre.

L’une des valeurs fondamentales de MLSE LaunchPad, par exemple, est « Nos différences font la différence », qui inclut les principes de confiance et de respect, mais aussi la conviction que la force de MLSE LaunchPad est enracinée dans la diversité des voix, des idées et des expériences vécues. Un autre exemple est « Nous sommes une famille », qui comprend l’attention inconditionnelle et la responsabilité. Collectivement, l’effort des dirigeants, des accompagnateurs, du personnel et des bénévoles qui travaillent ensemble sur des plans d’action sur la façon de vivre et de mettre en œuvre les valeurs peut conduire à des opérations et à une programmation culturellement pertinentes, à des pratiques d’embauche inclusives et à la formation du personnel. Tous ces éléments garantissent que les personnes se sentent toujours physiquement, psychologiquement et socialement en sécurité et soutenues lorsqu’elles s’engagent avec une organisation et son personnel, ses programmes, ses clubs ou ses ligues.

  1. Réflexion commune : « Trouvez vos angles morts »

Créez systématiquement un espace pour comprendre quels sont les problèmes actuels d’accès, d’équité et d’engagement au sein des membres et de la communauté de votre organisation, afin d’accroître la prise de conscience des angles morts de l’organisation et d’éclairer l’établissement des priorités et des solutions. Il est essentiel d’impliquer les parties prenantes de la communauté pour obtenir des commentaires et des perspectives, en plus des dirigeants et du personnel, avant de prendre des décisions ou de procéder à des ajustements.

Recueillir des réflexions sur des affirmations telles que « Le sport devrait m’aider à me sentir mieux » et sur les soutiens nécessaires pour que cela soit vrai peut aider les organisations à hiérarchiser les ressources. Par exemple, l’accès aux opportunités sportives et le soutien à un accès plus facile aux services de santé mentale ont été identifiés comme une priorité par une grande proportion de jeunes dans l’étude Change the Game. Toutefois, pour comprendre à quoi cela pourrait ressembler dans un espace, un club ou une équipe spécifique, il faut approfondir la réflexion et le dialogue avec les bénéficiaires visés.

La mise en œuvre pratique de la collecte d’information peut prendre la forme de sondages auprès des parents et des tuteurs, de groupes de discussion, de conversations individuelles, de l’engagement d’une organisation communautaire experte dans le domaine, de la création d’un conseil consultatif des jeunes ou d’autres moyens créatifs de faciliter la communication entre le personnel et les jeunes. Cette pratique de communication permanente dans les deux sens permet de s’assurer que les organisations prennent les décisions qui conviennent le mieux à leurs membres.

  1. Des politiques et des processus qui favorisent la transparence, le développement et la confiance : « Dire ce que l’on fait et faire ce que l’on dit 

La mise en place d’un processus de révision active des politiques internes peut promouvoir la transparence, le respect des autres et la responsabilité permanente d’évaluer les processus qui animent une organisation. Les politiques et les processus doivent évoluer au même rythme que les besoins et les intérêts des membres, afin de garantir que les priorités et les incitations de l’organisation sont alignées sur celles des communautés qu’elle sert. Idéalement, un cycle continu de réflexion partagée conduira à un cycle continu de révision organisationnelle. Cela contribuera à créer une boucle de rétroaction indiquant aux membres et aux principales parties prenantes que leur avis est apprécié et pris en compte dans la mesure du possible, et augmentant la probabilité d’instaurer une confiance mutuelle grâce à la transparence du processus de collaboration.

Les processus d’examen devraient être des activités formelles et planifiées et s’appuyer sur les commentaires des principales parties prenantes pour compléter d’autres données telles que les responsabilités en matière de sport, les résultats de la recherche et de l’évaluation et les principaux résultats sportifs et non sportifs (par exemple, l’engagement des jeunes ou de la communauté, le bien-être mental ou le sentiment d’appartenance) que l’organisme s’efforce d’atteindre.

  1. Normes et développement de l’entraînement : « Les jeunes d’abord, toujours »

Avec près de 60 % des jeunes qui réclament un sport et des programmes sportifs qui leur enseignent et les aident à apprendre et à développer des compétences sociales, émotionnelles et développementales, il est important de considérer et d’utiliser le sport comme un vecteur d’apprentissage et de développement. Les normes et le développement de l’entraînement doivent donc refléter ce sentiment et intégrer des stratégies de SDD, y compris le transfert explicite des aptitudes à la vie quotidienne, qui visent à favoriser le développement positif des jeunes.

Tout comme les exercices de basketball peuvent enseigner les techniques de drible et les exercices de hockey les techniques de maniement du bâton, ils peuvent aussi enseigner intentionnellement les compétences de la vie courante telles que le leadership, la pensée critique, les compétences sociales ou la résilience. Le sport peut et doit contribuer au développement holistique des jeunes qui ont partagé l’opinion selon laquelle « je suis plus qu’un athlète ». L’adoption d’un modèle de formation des formateurs, par exemple, peut encourager les organisations à revoir leurs programmes de formation des entraîneurs afin d’évaluer si ces normes sont prises en compte et si les entraîneurs sont formés pour encadrer la personne dans sa globalité. Veiller à ce que le personnel ait des possibilités de mentorat formel et informel offrira d’importantes possibilités de développement professionnel qui conduiront à un apprentissage continu et profiteront à l’ensemble de la communauté. En fin de compte, la direction d’un organisme devrait donner le ton dans l’ensemble de l’organisme et tenir compte de cet appel à donner la priorité au bien-être des jeunes dans la façon dont elle examine, met à jour et met en œuvre les modèles de formation pour un paysage sportif de la jeunesse dont l’avenir est enraciné dans un état d’esprit de SDD. 

En plus du « quoi » que les entraîneurs enseigneront et développeront, Change the Game met les organisations au défi de se concentrer sur le « qui ». Les jeunes réclament des « entraîneurs qui me ressemblent » et les organisations ont la responsabilité de s’assurer qu’elles mettent en œuvre des pratiques de recrutement et d’embauche inclusives. Si 82 % des jeunes déclarent n’avoir personne à qui parler de leurs expériences de racisme ou de discrimination dans le sport, la valeur de l’expérience vécue doit être ajoutée à la liste de l’expérience professionnelle, de l’éducation et des qualifications qui deviennent souvent les principaux facteurs d’embauche. Bien que cela puisse être légèrement différent en fonction de chaque membre de la communauté, l’intentionnalité derrière ces actions reste cohérente et soutient le rôle vital de l’entraîneur dans la facilitation d’un environnement accueillant, inclusif et sûr qui est nécessaire pour que les jeunes reconnaissent et atteignent leur plein potentiel. Ces considérations peuvent continuer à alimenter la formation de la prochaine génération de leaders dans les pratiques de SDD et contribuer véritablement à changer la donne.

  1. Des approches basées sur les données : « On ne peut pas gérer ce que l’on ne mesure pas »

Adopter une approche fondée sur des données pour contrôler la qualité de la culture interne. L’application d’une optique d’équité des données pour collecter, anonymiser et utiliser les données démographiques, y compris la race, le genre, les capacités et le revenu du ménage, aidera votre organisation à mieux comprendre l’évolution des besoins et des expériences des athlètes, des entraîneurs et du personnel.

En bref : recueillez des renseignements et, surtout, utilisez-les. Cela permettra d’approfondir la compréhension, d’identifier les zones nébuleuses, d’orienter la prise de décisions et de suivre les progrès au fil du temps. S’inspirer de la recherche externe pour piloter des expériences de courte durée dans les approches de développement durable – le Journal of Sport for Development et sportanddev.org sont d’excellents points de départ pour commencer à examiner des approches pratiques et fondées sur des preuves pour développer les compétences de la vie courante et d’autres résultats positifs du développement des jeunes par le sport.

Il n’y a pas de mal à commencer petit, tant que vous commencez quelque part. Si vous êtes un organisme de sport qui offre des opportunités aux jeunes et que vous souhaitez obtenir un avis ou des ressources sur ce que pourrait être une approche équitable de la collecte de données démographiques dans votre environnement, n’hésitez pas à contacter un membre de l’équipe de recherche et d’évaluation de la Fondation MLSE et de LaunchPad à n’importe quel moment.

Réflexions finales

Tous les sports sont des opportunités de SDD en ce sens que des bénéfices sociaux et économiques positifs peuvent et doivent être attendus des initiatives sportives à tous les niveaux. Dans l’ère post-pandémie et à l’heure des bilans pour le secteur du sport pour la jeunesse, les approches empruntées à l’espace de SDD offrent de riches perspectives sur la manière d’engager les jeunes de manière positive à tous les niveaux du système sportif. Les jeunes ont clairement fait savoir qu’il n’y a plus de place pour les programmes et les systèmes sportifs qui se concentrent exclusivement sur le développement physique au détriment des considérations sociales, émotionnelles et cognitives.

Faits saillants 

La plupart d’entre nous se sont déjà trouvés dans une situation où, en arrivant à un événement sportif en plein air, ils ont appris que le match avait été annulé ou reporté en raison de la foudre. Mais avez-vous déjà vécu la même chose à cause de la pollution de l’air? Si l’on sait généralement comment protéger les participants à un événement sportif contre des phénomènes environnementaux tels que la foudre, peu de gens savent ce qu’il faut faire lorsque la qualité de l’air est médiocre. 

Pour combler cette lacune, le Centre de documentation sur le sport (SIRC) et Santé Canada se sont associés pour créer et partager des ressources sur la qualité de l’air, y compris un module d’apprentissage en ligne, des infographies et un guide de politique, à l’intention des parties prenantes des sports de plein air. Dans cet article du SIRCuit, nous décrivons le partenariat entre le SIRC et Santé Canada, soulignons les renseignements clés sur la pollution de l’air et la sécurité de la pratique des sports de plein air, et décrivons les stratégies que les acteurs du sport peuvent mettre en œuvre pour aider à protéger les participants aux sports des effets nocifs de la pollution de l’air.

Tout au long de l’article, nous avons établi des liens vers des ressources qui vous aideront à sensibiliser les gens et à prendre des mesures dans votre sport. Ensemble, nous pouvons améliorer la qualité de l’air et la sécurité de la pratique des sports de plein air!

Le partenariat 

En 2022, Santé Canada a demandé au SIRC de soutenir ses initiatives axées sur la qualité de l’air et la sécurité des sports de plein air. Santé Canada a fourni au SIRC un soutien financier et scientifique pour la création de ressources et d’outils éducatifs destinés aux organismes de sport, notamment:

Santé Canada et le SIRC ont lancé le module d’apprentissage en ligne et les ressources connexes lors du Sommet du soccer de l’Ontario qui s’est tenu à Ottawa, en Ontario, le 25 février 2023. Nous continuerons à partager les ressources développées dans le cadre de ce partenariat dans le cadre d’une campagne d’éducation et de sensibilisation ciblant les organisations à tous les niveaux du sport au Canada.

Les bases de la pollution de l’air

La pollution atmosphérique est un mélange d’agents chimiques, physiques et biologiques qui contaminent les environnements intérieurs et extérieurs (OMS, 2022). Il existe de nombreux types de polluants atmosphériques. Parmi les polluants atmosphériques les plus nocifs pour la santé humaine, on peut citer :

Les polluants atmosphériques peuvent provenir de nombreuses sources. Au Canada, les émissions les plus importantes de polluants atmosphériques sont liées à la production d’électricité, à la construction, aux industries pétrolières et gazières, aux incendies de forêt, aux transports, à l’agriculture et à la combustion du bois (GC, 2022a). Les événements environnementaux peuvent également contribuer à une mauvaise qualité de l’air. Voici quelques exemples d’événements environnementaux qui peuvent contribuer à la pollution de l’air :

Les effets de la pollution atmosphérique sur la santé humaine

L’exposition à la pollution atmosphérique peut entraîner une série d’effets sur la santé à court et à long terme. Alors que l’exposition à court terme aux polluants atmosphériques a été associée à des symptômes tels que des vertiges et des maux de tête, l’exposition à long terme a été associée à un risque accru de maladies telles que le cancer du poumon et l’asthme (SC, 2021). En fait, au Canada, on estime que la pollution atmosphérique contribue à 2,7 millions de jours de symptômes d’asthme et à 15 300 décès prématurés chaque année (SC, 2021). 

Il est important de noter que si les effets à long terme de la pollution de l’air sur la santé peuvent prendre des années à se développer, les effets à court terme sur la santé peuvent survenir quelques minutes après avoir fait de l’exercice dans un environnement où la qualité de l’air est très mauvaise. Cela souligne l’importance de surveiller la qualité de l’air lors de la planification ou de la pratique d’une activité physique. 

Vous vous demandez peut-être : qui risque de subir les effets néfastes de la pollution atmosphérique? La réponse est que tout le monde est à risque. Toutefois, certains groupes, notamment les enfants, les personnes âgées et les personnes souffrant de maladies préexistantes, courent un risque accru. Même si vous ne le soupçonnez pas, les personnes qui font du sport et de l’exercice courent également un risque accru. 

Les effets de la pollution atmosphérique sur les sportifs de plein air

Pourquoi les athlètes courent-ils un risque accru? Lorsqu’une personne pratique une activité physique en plein air, elle a besoin de plus d’oxygène (Carlisle et Sharp, 2001; Giles et Koehle, 2014). Plus l’exercice est intense, plus le corps a besoin d’oxygène. Pour répondre à ce besoin accru, une personne doit respirer plus profondément et plus fréquemment (Carlisle et Sharp, 2001; Giles et Koehle, 2014; EPA, 2011). Si la qualité de l’air est médiocre, cette augmentation de la consommation d’air pendant l’exercice signifie qu’une personne respirera également plus de polluants atmosphériques. 

Une autre raison pour laquelle les participants aux sports de plein air courent un risque accru est que lorsqu’une personne fait beaucoup d’exercice, elle respire davantage par la bouche que par le nez (Carlisle et Sharp, 2001; Giles et Koehle, 2014). Cela signifie que moins d’air est filtré par le système de filtration naturel du corps dans le nez, ce qui signifie que plus de polluants atmosphériques ont le potentiel de pénétrer dans le corps (Bateson et Schwartz, 2007). 

En résumé, les athlètes modifient leur mode et leur style de respiration pendant l’exercice afin d’inhaler de plus grandes quantités d’air. S’ils se trouvent dans une zone où les niveaux de pollution atmosphérique sont élevés, par exemple à proximité d’une route très fréquentée, ils inhalent davantage de polluants atmosphériques, ce qui les expose à un risque accru de complications sanitaires.

Une mauvaise qualité de l’air peut également affecter les performances sportives. Lorsque les athlètes font de l’exercice dans des zones où les niveaux de pollution atmosphérique sont élevés, ils ont tendance à percevoir un effort plus important (Sandford et coll., 2020). Plus simplement, faire de l’exercice lorsque la qualité de l’air est mauvaise peut donner aux participants à des sports de plein air l’impression qu’ils travaillent plus dur pour accomplir la même tâche. Cela peut signifier que les athlètes ne peuvent pas être aussi performants que lorsque la qualité de l’air est bonne. Comme vous pouvez l’imaginer, cela peut avoir des conséquences considérables pour les événements sportifs de plein air nécessitant de l’endurance, comme le soccer, ou les épreuves chronométrées, comme celles de l’athlétisme.

La cote air santé 

À ce stade, vous vous demandez peut-être ce que vous pouvez faire pour protéger les sportifs de la pollution atmosphérique. La réponse est que vous pouvez surveiller la qualité de l’air au niveau local et prendre des décisions éclairées sur la sécurité de la pratique des sports de plein air. Pour ce faire, vous pouvez utiliser la CAS. 

La CAS a été créée pour aider les personnes à comprendre et à prendre des décisions concernant la sécurité de l’air qui les entoure. La CAS présente le risque relatif pour la santé associé aux effets combinés des polluants atmosphériques, notamment le dioxyde d’azote, l’ozone troposphérique et les particules. La CAS est présentée sur une échelle de 1 à 10+, subdivisée en quatre catégories de risque sanitaire allant d’un risque faible (1 à 3) à un risque très élevé (10+).

La CAS indique les valeurs observées et prévues, ce qui vous permet de mesurer la qualité de l’air avant et pendant votre événement. Les valeurs de la CAS sont accompagnées de messages sanitaires. Ces messages peuvent être utilisés pour vous aider à prendre des décisions concernant la sécurité de la pratique des sports de plein air. En lisant les messages sanitaires, il est essentiel de se rappeler que les participants aux sports de plein air sont considérés comme une population à haut risque. Il convient donc d’adopter des approches plus prudentes pour garantir leur sécurité.

Vous trouverez ci-dessous quelques lignes directrices générales sur la manière dont la CAS peut être utilisée pour planifier une activité de plein air. En tant qu’entraîneur, responsable sportif ou dirigeant, il vous appartient d’évaluer les besoins de vos participants ainsi que les conditions environnementales afin de déterminer si la pratique d’un sport en plein air est sans danger.

Pour consulter la CAS, visitez le site AirHealth.ca ou téléchargez l’application WeatherCAN sur Google Play ou dans l’App Store. 

Stratégies visant à limiter l’exposition des sportifs à la pollution atmosphérique

Les organismes sportifs, les entraîneurs et les officiels sont responsables de la sécurité de leurs participants. Voici quelques conseils pour rester informé et limiter l’exposition des sportifs à la pollution de l’air :

Réflexions finales 

Nous espérons que cet article vous aidera à réfléchir à la qualité de l’air et à la sécurité de la pratique des sports de plein air. Nous vous encourageons à utiliser ces renseignements pour entamer des discussions au sein de votre organisation ou de vos équipes sur l’importance de prendre en compte la qualité de l’air lors de la planification et de la participation à des sports de plein air. N’oubliez pas que lorsque la qualité de l’air est mauvaise, il est essentiel de modifier les activités de plein air pour protéger la santé des participants aux sports de plein air et aux activités physiques, car la mauvaise qualité de l’air peut avoir des conséquences sur la santé.

La prochaine étape importante pour les organisations sportives consiste à élaborer des politiques de qualité de l’air qui favorisent la pratique des sports de plein air en toute sécurité. Ces politiques devraient fournir des conseils sur les mesures à prendre en cas de mauvaise qualité de l’air et définir des attentes en matière d’éducation et de formation sur la CAS pour les entraîneurs et les responsables sportifs. Si vous avez des questions ou si vous avez besoin d’aide pour entamer ce processus, n’hésitez pas à contacter l’équipe du SIRC à l’adresse info@sirc.ca. 

Ressources à consulter pour approfondir votre apprentissage 

Vous trouverez ci-dessous quelques ressources qui pourraient vous être utiles pour en savoir plus sur la pollution de l’air et sur ce que votre organisation peut faire pour assurer la sécurité de vos participants :

Faits saillants :  

Dorothy Paul possède plusieurs décennies d’expérience en tant qu’athlète, mentore et animatrice dans le domaine du sport au Canada. Mais le sport organisé n’a pas toujours fait partie de sa vie.  

« En grandissant, j’étais l’aînée d’une famille de sept enfants, alors je n’avais pas beaucoup d’argent pour faire du sport », dit-elle. Mme Paul jouait dehors avec ses frères et sœurs, grimpant aux arbres et faisant la course en sautant d’un arbre à l’autre.  

Les choses ont changé lorsque Mme Paul et ses frères et sœurs ont regardé les Jeux olympiques de Montréal en 1976. Les Jeux olympiques ont inspiré de nouvelles versions de leurs anciens jeux : « Nous avons créé une course d’obstacles autour de la maison en utilisant des chevaux de scie, en sautant par-dessus la fosse septique, etc. Et nous faisions la course pour voir qui était le plus rapide. Et je pense que cela m’a accidentellement bien formé pour le cross-country du collège. » raconte Mme Paul.  

Le cross-country au collège a conduit à l’athlétisme, au soccer, au hockey sur gazon et au rugby au secondaire, puis à une carrière de plus de 30 ans dans la Victoria Women’s Premier Soccer League. Aujourd’hui, Mme Paul est maître facilitatrice pour les modules d’entraînement autochtones du Cercle sportif autochtone et a servi de mentore pour le parcours de développement des participants autochtones à long terme par l’intermédiaire de Sport pour la vie. Elle a occupé plusieurs postes aux Jeux autochtones d’Amérique du Nord, dont celui de chef de mission en 2002.  

Après avoir pris sa retraite du soccer, elle a fondé une équipe féminine de crosse en boîte, les Wolves de Victoria, avec laquelle elle joue toujours. Mais lorsque le monde s’est arrêté en raison de la COVID-19 et que Mme Paul a eu un peu plus de temps pour réfléchir, elle a commencé à penser à la façon dont le système sportif devait changer et à chercher des modèles de ce à quoi cela pourrait ressembler.   

« Cela fait 30 ans que j’entends les gens dire : “Nous devons sortir de l’isolement, nous devons détruire les silos, alors qu’est-ce que nous ne faisons pas? Qu’est-ce qui nous empêche de défaire les silos?” Peut-être devrions-nous envisager différemment le changement de système et peut-être que cela suscitera des conversations avec les gens et qu’ils commenceront alors à faire les choses un peu différemment », explique Mme Paul.  

C’est ainsi qu’elle est tombée sur la théorie du changement des deux boucles.  

Examen de la théorie du changement des deux boucles  

La théorie du changement des deux boucles a été élaborée par l’Institut Berkana (créé en 1992) et plus particulièrement par Margaret Wheatley et Deborah Frieze dans un article intitulé « Utiliser l’émergence pour mettre l’innovation sociale à l’échelle ». La théorie cherche à décrire et à modéliser les organisations comme des êtres vivants avec des cycles de vie, plutôt que comme des entités mécaniques immuables.   

Figure 1: Adapté de l’Institut Berkana

La théorie décrit les processus impliqués dans la transition d’un système (le système dominant) à un autre système (le système émergent). À l’intérieur de chaque système et entre les deux, les personnes assument une variété de rôles, notamment :  

Pionniers: Les personnes qui reconnaissent qu’un système doit changer et commencent à chercher des solutions de rechange, en formant éventuellement des réseaux qui mènent à un nouveau système émergent.  

Stabilisateurs: Les personnes qui reconnaissent le système émergent, mais comprennent que le changement prend du temps, et aideront à la transition.  

Résistants: Les personnes qui résistent au changement au sein du système dominant parce qu’il les sert et leur profite ou parce qu’ils pensent qu’ils n’ont pas de rôle à jouer dans le nouveau système.  

Développeurs de ponts: Les personnes qui aident les gens à passer du système dominant au système émergent.  

Aidants: Les personnes qui mettent fin au système dominant et redistribuent les ressources dans le système émergent.   

Cette théorie tient compte du fait que vous êtes à la fois une personne et un membre d’un système. Elle tient également compte du fait que le changement n’est pas linéaire, que les forces extérieures de la vie ont une incidence sur le fonctionnement d’un système, ce qui explique pourquoi un système ne peut jamais vraiment rester inchangé.  

C’est ce qui a attiré Mme Paul vers cette théorie et qui l’a amenée à réfléchir à la possibilité de l’utiliser comme modèle pour inspirer la réflexion et le changement au sein du secteur sportif canadien.  

« Le modèle des deux boucles est fluide, explique Mme Paul, il n’est pas concret. D’autres théories systémiques que j’ai vues l’abordaient d’un point de vue mécanique, du genre : “Oh, cette pièce ne fonctionne pas? Enlevons-la et remplaçons-la par quelque chose d’autre; oh, pourquoi cela n’a-t-il pas fonctionné?” Ces modèles ont oublié que toutes les pièces d’un système dépendent de toutes ces autres choses pour exister également. J’aime l’idée d’un changement de système d’un point de vue humain et du point de vue de la fluidité. »  

Dans leur article original, Wheatley et Frieze (2006) écrivent : « Malgré les publicités et les slogans actuels, le monde ne change pas une personne à la fois. Il change lorsque des réseaux de relations se forment entre des personnes qui découvrent qu’elles partagent une cause commune et une vision de ce qui est possible. C’est une bonne nouvelle pour ceux d’entre nous qui ont l’intention de changer le monde et de créer un avenir positif. Plutôt que de se préoccuper de la masse critique, notre travail consiste à favoriser les connexions critiques. »   

Presque tout le monde connaît l’idée de croissance au sein d’un système ou d’un secteur. Ce dont nous ne parlons pas souvent, c’est du déclin d’une organisation, d’un système ou d’un secteur. Le déclin n’est pas nécessairement synonyme d’échec, il peut simplement signifier que le contexte dans lequel le système existe a changé et qu’un autre système serait mieux adapté. 

Frieze prend l’exemple de l’industrie pétrolière. Nous connaissons tous probablement l’ascension du pétrole en tant que système dominant. Au fur et à mesure que les gens en apprenaient davantage sur la pollution, le changement climatique et les combustibles fossiles, les personnes ont commencé à remettre en question le système et à chercher des solutions de rechange. Dans la théorie des deux boucles, ces personnes sont appelées des pionniers. Ces pionniers gagnent véritablement en force lorsqu’ils commencent à se connecter les uns aux autres, à former des réseaux et à réfléchir à de nouveaux systèmes. Cela se produit au moment où ceux qui résistent à tout changement par rapport au système dominant disent des choses comme : « nous avons toujours fait comme ça » ou « nous sommes trop grands pour échouer ». 

Changer de système ne consiste pas à appuyer sur un interrupteur. Et les systèmes dominants ne sont pas mauvais en soi. Ils comportent souvent des éléments importants dont il faut s’inspirer ou dont il faut s’inspirer. C’est pourquoi les rôles des « stabilisateurs » et des « aidants » sont importants. Ce sont les personnes qui, au sein du système dominant, reconnaissent l’imminence du changement et s’efforcent d’aider l’ancien système à faire la transition vers le nouveau. Dans l’exemple de l’industrie pétrolière, il s’agit non seulement des personnes qui réfléchissent à la manière dont l’infrastructure peut passer du pétrole et du gaz aux énergies renouvelables, mais aussi de celles qui se penchent sur le sort des personnes actuellement employées par l’industrie pétrolière et qui aident à trouver des moyens de transférer leurs compétences dans d’autres secteurs.   

Ces rôles sont importants car il y a toujours un écart entre les systèmes dominants et émergents; c’est pourquoi dans le diagramme lui-même, les boucles ne se touchent pas. Le système émergent n’est pas prêt à prendre et à transporter immédiatement tous les membres du système dominant. L’ancien système a besoin d’être réduit en douceur et de manière respectueuse, ses ressources doivent être redistribuées et les leçons tirées de l’expérience doivent être mises à profit. Les développeurs de ponts sont les personnes qui aident tout le monde à passer du système dominant au système émergent. À ce moment-là, le cycle de vie du système recommence.  

Une conversation avec Dorothy Paul  

Dorothy Paul a fait des présentations à différents publics dans le secteur du sport canadien, utilisant la théorie des deux boucles pour proposer une voie de changement et susciter une réflexion chez les gens et les organisations. Le SIRC s’est entretenu avec Mme Paul pour approfondir certaines de ses réflexions sur l’évolution de l’environnement sportif.   

SIRC : Selon vous, quelles sont les questions les plus pressantes auxquelles le secteur du sport doit faire face en ce moment?  

DP : Notre système sportif actuel repose sur le bénévolat. Avec la COVID, le bénévolat a presque disparu. Donc, soit notre système va devoir s’adapter, soit nous allons devoir chercher des moyens de restructurer les choses, c’est-à-dire la façon dont nous faisons les choses à l’échelle communautaire, à l’échelle des organisations sportives provinciales et territoriales. Parce que nous aurons personne pour former les athlètes à progresser dans le système et nous ne pourrons pas miser sur nos entraîneurs et nos administrateurs du système de bénévoles comme nous l’avons fait jusqu’à présent. Je ne connais pas la réponse à cette question, mais je pense que nous devons nous demander comment d’autres pays ont effectué cette transition. Et qu’ont-ils fait pour gérer cette transition? Car je pense qu’au Canada, nous n’allons plus compter sur le bénévolat très longtemps.  

Même s’il s’agit d’une théorie du changement plus ancienne, je pense qu’elle a encore de la valeur parce qu’elle tient compte de toutes les influences extérieures. Ces derniers temps, toutes les choses qui se sont produites dans les médias, comme le sport sécuritaire, la diversité et l’équité, ont vraiment poussé le système actuel et ont été au premier plan au cours des 4 ou 5 dernières années. C’est pourquoi je pense que nous nous trouvons quelque part ici [montre le milieu des deux boucles où un système dominant passe par les aidants et se décompose, et un autre système émerge sur la voie des communautés de pratique].   

Par exemple, le système a créé des cours que les gens doivent suivre pour s’assurer qu’ils comprennent, en tant qu’accompagnateurs et travailleurs dans ce système, qu’ils sont formés à ces choses qui se présentent et qui poussent leur système dans une direction émergente. Mais pour les bénévoles qui arrivent, ils se disent : « Je veux juste être entraîneur, mais je dois maintenant participer à des ateliers sur la sécurité dans le sport et sur l’entraînement, et faire une vérification de mon casier judiciaire! Est-ce que je veux vraiment passer trois semaines à devenir entraîneur pour une saison de quatre mois? » Nous devons reconnaître que lorsque vous travaillez au niveau de la communauté, parfois les bénévoles ne veulent pas passer autant de temps, ils veulent juste aller entraîner. Ainsi, avec la règle de deux, le sport sécuritaire et tous les autres cours qui ont vu le jour au cours des cinq dernières années, les gens hésitent à participer au système sportif ou s’en détournent. J’observe également beaucoup de mouvements au sein des administrateurs sportifs, un fort taux de rotation dans les organisations. Ce qui me fait penser que nous pourrions encore être là [indique la partie gauche du modèle avec les pionniers qui quittent le système dominant].  

SIRC : Comment pouvons-nous utiliser le système des deux boucles pour réfléchir à ce problème?  

DP : Je pense que nous devons faire attention à la manière dont nous traitons les gens dans le système. Les personnes qui font partie de la résistance, ou des stabilisateurs, ou des aidants – cela prend beaucoup de temps et d’énergie. Nous devons faire preuve d’une grande compréhension : « Qu’est-ce que l’employé en face de moi apporte à la table et quels sont ses véritables points forts? Le poste dans lequel nous le plaçons est-il réellement adapté au fonctionnement de son cerveau? » Lorsque les gens occupent un poste qui leur convient parfaitement, ils accomplissent toutes sortes de tâches.    

Ce que j’ai vu dans le système actuel, c’est que si vous ne travaillez pas 100 heures par semaine, vous ne produisez pas, donc vous n’avez pas de valeur pour nous. Ce n’est pas viable. Je pense que la COVID a amené beaucoup de gens à se demander s’ils voulaient vraiment travailler 100 heures par semaine pour un système qui les considérait comme sacrifiables.  

Il s’agit donc de voir comment nous pouvons garder les bonnes personnes qui sont dans notre système et les soutenir pour qu’elles aient envie de rester plus longtemps. Je pense même qu’il est de plus en plus difficile d’être un employé à vie, ne serait-ce que dans le sport traditionnel [par opposition au sport autochtone]. Les gens arrivent, sont employés dans un domaine pendant 3 à 5 ans, puis passent à autre chose. Que devons-nous faire, en tant qu’employeurs, pour que nos employés se sentent soutenus et valorisés? 

Le système actuel donne l’impression d’être en sécurité, « c’est ce que nous connaissons, donc nous allons continuer à le faire ». Il s’agit maintenant de savoir comment partager les nouvelles informations de manière à ce que nous puissions les transposer sur notre lieu de travail, dans notre administration, dans notre organisation, comme c’est le cas avec tous les programmes de sport sécuritaire. C’est là que nous avons besoin de ces stabilisateurs, de ces développeurs de ponts et de ces aidants.  

SIRC : Quelle a été la réaction lorsque vous avez fait des présentations sur les deux boucles dans le secteur du sport? Est-ce qu’il y a un écho chez les gens?   

DP : Lors d’une de mes présentations, j’ai physiquement fait les boucles avec de la corde et j’ai demandé aux gens de se placer à l’endroit où ils pensaient avoir leur place dans le système. Personne n’a voulu se placer sur un système dominant en raison du type de conversation que nous avons eue à ce sujet. Mais il y a une raison pour laquelle nous avons besoin de ces personnes dominantes.   

J’aime les termes « dominant » et « émergent » plutôt que « nouveau » et « ancien » parce que « nouveau » implique que l’ancien est mauvais, mais ce n’est pas le cas. À mesure que le système évolue, nous devons déterminer quelles sont les parties du système dominant que nous allons conserver, parce que tout n’est pas terrible dans le système actuel, et qu’il y a beaucoup de bonnes choses. C’est de cela qu’il s’agit en matière d’aide et de décomposition.  

Plus de la moitié des participants sont allés vers le développement de ponts, ce qui en dit long sur la façon dont les gens absorbent le changement du système.  

SIRC : Quels sont les autres éléments qu’il est important de garder à l’esprit lorsque l’on utilise ce modèle pour réfléchir au changement dans le système sportif?  

Pour moi, ce qui revient sans cesse, c’est de réfléchir à la décomposition. Il y a beaucoup de bonnes choses dans le système actuel. Nous devons examiner attentivement ce qui doit réellement changer. Pour moi, c’est l’élément humain. C’est le point le plus important : comment traitons-nous les gens dans ce système? Et comment pouvons-nous les garder? J’ai été confronté à un nombre important de personnes qui ont tout simplement quitté le système pour aller voir ailleurs. Ces personnes possédaient d’énormes compétences et une longue expérience dans le secteur du sport. Comment se fait-il que nous n’ayons pas pu les garder? Comment se fait-il que nous n’ayons pas pu les affecter à un rôle différent?  

Ainsi, lorsque nous pensons au système dominant, nous ne pouvons pas nous contenter de considérer les personnes qui en font partie comme de la résistance. Nous devons trouver un moyen d’aborder cette résistance et de faire connaître l’évolution de ce nouveau système, ce en quoi il croit, et la manière dont il constitue une partie précieuse de ce système émergent; les gens ont un rôle à jouer.  

Questions à poser aux organisations sportives et aux personnes individuelles :  

Points saillants   

« Ce n’est pas toi qu’ils injurient : c’est ton maillot » est le refrain que Nicole Pagliaro, responsable de la lutte au harcèlement pour la Huronia District Soccer Association, répète à ses jeunes arbitres, afin qu’elles et ils soient armés de défenses mentales pour faire face aux abus.   

Mais de moins en moins d’officiels, jeunes et moins jeunes, estiment que les aspects positifs du travail compensent les abus et l’environnement stressant. De plus, la pandémie de COVID-19 a aggravé le déclin du nombre d’arbitres. Aujourd’hui, à travers le Canada, les sports font face à une crise de l’arbitrage.   

La pénurie d’officiels de match a été fréquemment évoquée lors du processus de renouvellement de la Politique canadienne du sport comme une situation urgente nécessitant une intervention coordonnée par l’ensemble du secteur. Cet article donne un aperçu du contexte culturel de la pénurie d’officiels au Canada et met en lumière les voix des officiels de match de tout le pays.  

S’attaquer à une culture de l’abus  

Hockey Canada a signalé une baisse de 33 000 à 16 000 officiels avant et après la pandémie (Fitz-Gerald, 2021). Le soccer ontarien est passé de 8500 officiels en 2019 à 4846 en 2022, dont 2000 nouveaux officiels (Fitz-Gerald, 2022).  

Bien qu’il n’y ait pas de recherches multidisciplinaires sur les officiels au Canada, des recherches menées aux États-Unis montrent que, dans une enquête menée auprès de 19 000 officiels du sport, 70 % ont classé « l’amour du sport » comme leur principale raison d’arbitrer, mais 55 % ont classé la violence verbale comme la principale cause des démissions (IUPUI, 2022). L’enquête a également montré que 59 % des officiels ne se sentent pas respectés par les parents ou les spectateurs, et 42 % estiment que les organisations avec lesquelles ils travaillent n’investissent pas suffisamment d’efforts pour lutter contre les comportements toxiques (IUPUI, 2022).  

Pagliaro, qui fait également partie du Comité de développement des officiels de match pour Ontario Soccer, explique que les arbitres plus âgés et plus chevronnés ont profité d’un répit pendant la pandémie et ont indiqué qu’elles et ils n’avaient guère envie de revenir. La pandémie a également mis en veilleuse les possibilités de mentorat et de développement des jeunes officiels.  

David Hancock, PhD, professeur à l’école de cinétique humaine et loisirs de l’université Memorial de Terre-Neuve, étudie les officiels. Il propose une explication légèrement différente : « Il est facile de dire que les abus sont la raison pour laquelle les officiels abandonnent, mais quelqu’un qui est victime d’abus et qui bénéficie d’un soutien adéquat au sein de son organisation n’est pas vraiment susceptible d’abandonner. Ils sont plus susceptibles d’abandonner pour des raisons comme l’absence de rémunération et le stress du travail lui-même. »  

Brooke Briscoe, officielle de basket-ball et ancienne directrice des officiels de Basketball BC, a été confrontée à ces problèmes entremêlés : « La plupart d’entre nous, les officiels adultes, avons un emploi à temps plein. Nous ne sommes pas arbitres pour le salaire, nous le faisons parce que nous aimons le sport. Les matchs ont généralement lieu le vendredi et le samedi soir, ce qui signifie que nous avons travaillé toute la semaine, que nous nous sommes battus contre les embouteillages pour arriver au gymnase une heure plus tôt pour ensuite nous faire abuser verbalement. Puis nous passons une heure ou deux après le match à débreffer et analyser les séquences, pour tenter de nous améliorer. »  

Rhonda Pauls, directrice générale de Baseball IPÉ, dit qu’elle comprend pourquoi les jeunes n’affluent pas pour s’inscrire comme arbitres : « Nous avons cette culture d’abus ridicule et de droit des entraîneurs et des fans qui se plaignent et insultent les officiels. Et à l’ère de la caméra vidéo, les gens disent aux officiels “Nous allons vous filmer et vous observer et nous allons publier sur les médias sociaux quand vous faites une erreur et nous allons nous moquer de vous, vous critiquer et vous blâmer”. Qui veut s’impliquer pour ça ? »  

Pagliaro prend les choses un peu plus à la légère : « J’ai commencé à arbitrer parce que je m’étais blessée au jeu et je ne voulais pas me blesser à nouveau, mais je voulais continuer à faire partie du jeu. J’aime plaisanter maintenant en disant que depuis que je suis arbitre, la seule chose qui est blessée, c’est mon orgueil. »  

Aptitude pour le mentorat  

Female football referee giving signals and blurred players in the backgroundDans le cadre du processus de renouvellement de la Politique canadienne du sport, les Canadiennes et Canadiens ont pu donner leur avis sur leur vision de l’avenir du sport au Canada. Dans le cadre de ce processus, les officiels et les gestionnaires ont réitéré l’importance des programmes de mentorat pour aider les officiels à faire face aux abus, à travailler à l’amélioration de leurs aptitudes et à sentir qu’ils font partie d’une communauté branchée.  

Un programme de mentorat à Edmonton a été crucial à la continuation de Brooke Briscoe en tant qu’arbitre : « On parle constamment du mentorat, mais c’est parce que c’est très important. Il fait partie intégrante de l’aide apportée aux officiels pour qu’ils aient un sentiment d’appartenance, qu’ils se sentent soutenus et qu’ils évoluent. » Lorsque Brooke était rattachée à un mentor, les officiels seniors qui souhaitaient être affectés à des matchs ou des championnats de haut niveau devaient participer au programme de mentorat. Ainsi, le mentorat était ancré dans la structure de formation.  

Mais lorsqu’il n’y a déjà pas assez d’officiels pour couvrir les matchs, trouver des personnes supplémentaires pour se tenir sur les côtés afin d’observer, de soutenir et de débreffer avec l’officiel en fonction semble être une utopie pour de nombreuses organisations.  

« Ce que les gens n’ont plus, c’est la main-d’œuvre nécessaire pour superviser la programmation », note Rhonda. « De nos jours, nous n’avons pas de personnel rémunéré au niveau des organisations, il n’y a que des bénévoles. Et ils subissent déjà la pression d’être sollicités : “Pouvez-vous s’il vous plaît arbitrer ce match, pouvez-vous s’il vous plaît diriger ce programme, s’il vous plaît donner cette rétroaction, s’il vous plaît faire cette paperasse, s’il vous plaît conduire trois heures jusqu’à cet endroit parce que nous n’avons personne pour le couvrir”, pour ensuite vous faire manquer de respect pendant que vous êtes là… »  

David Hancock note que les efforts de recrutement et de rétention (tels que les programmes de mentorat) visant à diversifier les cohortes officielles sont essentiels. « Trop peu d’organisations sportives font quelque chose pour recruter des personnes qui pourraient ne pas être des hommes blancs. Dans les sports d’équipe traditionnels, 10 % environ des officiels sont des femmes. Si vous voulez remédier à la pénurie d’officiels et que vous pouviez porter ce chiffre à 30 %, vous feriez un grand pas en avant. »    

Mais les femmes et les officiels racisés sont davantage exposés aux abus sexistes et racistes.    

Ce constat rejoint les appels plus généraux lancés par les participantes et participants et les parties prenantes au processus de renouvellement de la Politique canadienne du sport en faveur d’une augmentation de la formation à la lutte contre le racisme et des efforts en matière de diversité dans les organismes sportifs.  

Nicole Pagliaro est toujours déconcertée par les façons dont le genre se manifeste sur le terrain. Les spectateurs crient aux joueurs d’écouter madame l’arbitre, « et je me demande pourquoi on ajoute “madame” à l’avant », dit-elle. 

Le rôle des parents  

Back view of male parents cheering their childrens playing football in school.Les parents ont un rôle clé à jouer dans la modélisation d’un comportement respectueux dans les estrades, mais ils font souvent partie du problème. C’est pourquoi Nicole estime que les matchs de jeunes sont difficiles à gérer.  

« Je trouve que plus la tranche d’âge est jeune, plus les spectateurs sont erratiques, explique-t-elle. Je suis allée à un festival des moins de 12 ans le week-end dernier. C’était le tout premier match de la matinée. Nous étions à court d’arbitres. Nous n’en avions pas assez pour couvrir les matchs. Nous étions déjà en train de nous surmener. Lors de mon tout premier match, il y a eu une décision de hors-jeu et je ne l’ai pas bien vue. Tout le camp s’est levé et m’a injuriée. »  

Nicole s’est donc adressée directement aux spectateurs : « Je me suis approchée et je leur ai dit “La raison numéro un pour laquelle nous avons une pénurie d’officiels dans la province de l’Ontario aujourd’hui, c’est l’abus. Moi, je suis ici aujourd’hui. Notre équipe couvre 47 matchs aujourd’hui et nous le faisions sans arbitres adjoints parce que nous n’arrivions pas à en faire venir suffisamment. J’apprécie votre soutien. Je vais prendre de bonnes décisions et je vais en manquer. Mais j’ai besoin que vous compreniez que nous faisons de notre mieux aujourd’hui. S’il vous plaît, travaillons ensemble.” » 

Les officiels de match sont formés pour ne pas parler aux parents, car les joueurs et les entraîneurs, et non les parents, sont sous leur responsabilité. La chaîne d’engagement normale serait qu’un arbitre parle à l’entraîneur d’un spectateur ou d’un parent qui dépasse les bornes, et que l’entraîneur leur parle. 

Mais ce jour-là, Nicole a estimé qu’il était important que les spectateurs sachent où elle voulait en venir. Et les spectateurs ont répondu de la même manière : « Des parents applaudissaient et criaient “Yeah l’arbitre !”. » 

Colin Cameron, arbitre en chef du Milton Youth Soccer, et Pauls sont tous deux tombés (ou revenus) dans l’arbitrage en raison de leur rôle de parents. Cameron a commencé à arbitrer lorsqu’il était adolescent, mais a cessé lorsqu’il est entré à l’université, car il n’y avait pas de possibilité de progression. Vingt-cinq ans plus tard, il a repris la formation, cette fois avec son enfant aîné, en partie par amour du jeu, et en partie par désir de protéger son fils : « Je me suis souvenu des aspects difficiles de la fonction d’arbitre de mes débuts en tant qu’adolescent. Il y avait une partie de moi en tant que parent qui voulait être là pour mon fils. » 

La carrière d’arbitre de Rhonda Pauls a commencé par erreur, lorsqu’aucun officiel ne s’est présenté à l’un des matchs de baseball de son enfant. Elle a donc arbitré le match elle-même. Elle a ensuite progressé jusqu’à devenir arbitre internationale et s’est engagée auprès de Baseball Canada.   

Le fait d’être à la fois parents et officiels permet à Cameron et Pauls de parler aux autres parents de l’interaction avec les officiels de match.   

« Je regardais l’un de nos jeunes arbitres et le parent de l’arbitre est venu me voir, raconte Cameron. Elle m’a dit “Vous savez, Colin, regarder ma fille arbitrer m’a changée. Avant, j’étais le parent qui criait à l’arbitre qu’il avait commis une erreur. Maintenant, tout ce que je peux faire quand je regarde l’arbitre et que j’ai envie de crier, c’est de penser à mes filles. Maintenant, je dis aux autres parents qui se mettent en colère de se taire.” L’un de ses amis proches dans le cercle des parents lui a dit “Tu as changé. Qu’est-ce qui se passe ?” Et elle a répondu “Tu n’as aucune idée de ce que c’est que d’être un arbitre.” »  

La voie à suivre  

Il existe des programmes qui cherchent à lutter contre les abus des arbitres, mais il y a encore beaucoup de chemin à faire pour améliorer le nombre et les expériences des officiels sportifs au Canada.   

Par exemple, vous avez peut-être vu des officiels de première année ou des arbitres de moins de 18 ans porter un brassard ou une chemise de couleur pour les identifier comme étant “en formation”. Bien que ce soit une bonne idée d’essayer de protéger les officiels vulnérables, des initiatives comme celles-ci peuvent avoir des conséquences inattendues.   

« L’Europe fait cela depuis quelques années maintenant, et ce qu’on semble constater, c’est que cela diminue un peu les abus envers les mineurs, mais que cela augmente les abus pour les autres personnes, explique Hancock. Si vous avez 18 ans et plus, vous ne pouvez plus porter le brassard vert. Et maintenant, votre abus est un peu plus marqué qu’il ne l’aurait été avant la mise en place du programme. » 

Ici, au Canada, Sport Manitoba a lancé une campagne « No Ref, No Game » (Pas d’arbitre, pas de jeu) en 2020 pour attirer l’attention sur les mauvais traitements infligés aux officiels. La campagne a gagné en popularité, et de nombreux médias se sont manifestés, désireux de faire passer le message sur la nécessité de respecter les officiels de match. En 2021, Sport Manitoba a modifié la campagne #NoRefNoGame pour se concentrer sur le recrutement d’officiels.  

La signalisation autour des terrains, des courts et des patinoires, rappelant aux spectateurs d’être respectueux des officiels de match, est également utile. Lors des séances d’engagement pour le renouvellement de la politique canadienne du sport, les officiels ont également suggéré l’établissement d’une association nationale d’officiels, comme l’Association canadienne des entraîneurs, afin de fournir un centre unique de soutien, de formation et d’information.  

De nombreux officiels désignent les entraîneurs, ainsi que les parents, comme des acteurs clés dans la lutte contre les abus des officiels.  

Hancock raconte : « Lorsque je jouais au hockey à l’école secondaire, il y a des dizaines d’années, j’avais un entraîneur qui nous disait “Vous ne dites rien à l’arbitre à part ‘Hé, comment ça va ?’” Si vous étiez impoli envers l’arbitre, vous étiez assis le reste du match. Aucun d’entre nous ne s’est jamais plaints. Nous avons besoin que les entraîneurs prennent le leadership dans ce domaine pour changer la culture. »  

Hancock organise souvent des ateliers avec des athlètes également : « Je leur demande “Combien d’erreurs votre équipe commet-elle par match ?” Ils me répondent “Je ne sais pas, peut-être 50 ?” Puis je leur demande “Combien l’arbitre en fait-il ? Si l’arbitre a un très mauvais match, c’est peut-être 10. Ne vous concentrez donc pas sur les erreurs d’une seule personne plus que sur celles de votre propre équipe.” » 

De nombreuses organisations disposent déjà de codes de conduite, mais le problème réside surtout dans l’application de ces codes ou dans le manque de clarté quant à ce qui dépasse les limites de l’inacceptable. Il pourrait être utile que des représentants des organisations sportives assistent aux événements et réprimandent les spectateurs abusifs, mais là encore, les organisations gérées par des bénévoles sont déjà à court de ressources humaines.  

« Il suffit de penser à la campagne de promotion de la sécurité dans le sport dans laquelle nous nous trouvons et à toute la formation que les gens doivent suivre pour devenir un entraîneur ou un officiel qui travaille avec les jeunes, note Pauls. La nécessité d’un environnement sportif sécuritaire pour les officiels, y compris, mais sans s’y limiter, pour les jeunes officiels, n’a pas été soulignée. »  

L’essentiel est que les organisations sportives, les parents, les entraîneurs et les athlètes doivent travailler ensemble avec les officiels pour lutter contre les abus. Comme le décrit Briscoe : « La baisse du nombre d’officiels n’est pas un problème d’officiels. C’est un problème de culture sportive. » 

Et malheureusement, le problème ne va qu’empirer. Selon une enquête menée auprès des officiels par Officially Human (2022), une organisation américaine qui se consacre au respect et au traitement positif des officiels du sport, 50 % des officiels ont 55 ans ou plus, et seulement 12 % ont moins de 34 ans. De plus, 45 % d’entre eux déclarent qu’il leur reste moins de six années d’activité en tant qu’officiels.   

Bien que ces chiffres soient américains, Hancock prévient que le Canada est dans une situation similaire : « Nous ne voyons que la pointe de l’iceberg ici. » 

Comme le résume la campagne « No Ref No Game » de Sport Manitoba, les officiels de match sont essentiels au fonctionnement du système sportif canadien. Les organisations sportives, les parents, les athlètes et les spectateurs mettront en danger leurs propres expériences sportives s’ils ne s’attaquent pas aux problèmes auxquels les officiels de match sont confrontés en matière d’abus, de soutien et de rémunération. 

Points saillants

Au Canada, le sport chez les jeunes est souvent associé à des cas de mauvais comportement de la part de parents ou tuteurs. Les reportages sur les arrestations de parents ou de tuteurs et les altercations verbales et physiques autour des événements sportifs de leurs enfants sont malheureusement courants (Bell, 2020; Crosier, 2022; Kaufmann et coll., 2019). De plus, pour de nombreux jeunes athlètes, le fait d’avoir affaire à des parents ou à des tuteurs (les leurs ou d’autres) qui exercent des pressions, qui parlent fort et qui sont agressifs peut être embarrassant, stressant et peut les amener à envisager d’abandonner le sport à un jeune âge (Cumming et Ewing, 2002; Smoll et coll., 2011). 

De même, de nombreux entraîneurs de sports de jeunes et les parents et tuteurs avec lesquels ils travaillent connaissent divers conflits, ont du mal à communiquer efficacement les uns avec les autres et ne parviennent souvent pas à établir des objectifs communs (Erdal, 2018; Horne et coll. 2022). Les arbitres de sports de jeunes décrivent également avoir des interactions négatives avec les parents et les tuteurs. Certains officiels citent le comportement des parents et des tuteurs comme l’une des principales causes d’attrition des arbitres, en raison de préoccupations liées à la sécurité et aux abus (Ackery et coll., 2012; Warner et coll., 2013). 

Si les comportements négatifs des parents ou des tuteurs peuvent avoir un effet négatif sur les expériences des athlètes, les manifestations d’un comportement parental positif peuvent mener à des résultats positifs pour les athlètes. Par exemple, des chercheurs ont découvert que les comportements de soutien des parents et des tuteurs pendant les pratiques et les compétitions sportives permettaient de prédire les niveaux de plaisir et de motivation déclarés par leurs enfants (Sánchez-Miguel et coll., 2013). En outre, lorsque les parents et les tuteurs félicitent et encouragent leurs enfants de manière appropriée, les jeunes athlètes semblent vouloir que leurs parents s’impliquent dans leurs activités sportives et sont plus susceptibles de solliciter la rétroaction et le soutien des parents (Strand et coll. 2022). 

Père et enfant jouant au football dans un parc.Sachant que les parents et les tuteurs sportifs ont le pouvoir d’influencer le déroulement des expériences sportives de leurs enfants, il est important de s’interroger sur les raisons pour lesquelles ces personnes peuvent agir de manière nuisible. Le contexte compétitif qui fait partie intégrante de la pratique sportive joue un rôle important dans la facilitation de certains de ces comportements parentaux intensifiés. Cependant, il est également important d’examiner l’ensemble de l’environnement actuel du sport chez les jeunes afin de déterminer quelles autres conditions pourraient exacerber ces problèmes. 

Cet article se concentre sur la façon dont le comportement des parents pourrait être modifié pour améliorer l’environnement du sport chez les jeunes. En tant que chercheur qui étudie actuellement les raisons des comportements négatifs des parents dans le sport des jeunes, je tenterai de décrire certains facteurs et conditions qui peuvent contribuer à ces événements. Ensuite, je formulerai des recommandations et des suggestions à l’intention des praticiens du sport pour les jeunes, des parents et des tuteurs, dans l’espoir de créer des changements réalisables et d’améliorer l’expérience sportive des jeunes pour tous les enfants et adultes concernés. 

Facteurs de stress à l’origine de l’expérience des parents dans le sport 

Lorsque l’on examine les recherches antérieures sur les raisons pour lesquelles les parents et les tuteurs peuvent se comporter de manière négative pendant les activités sportives de leurs enfants, deux questions principales sont souvent abordées : le phénomène des parents ou des tuteurs qui « vivent par procuration » à travers leurs enfants et la montée de la professionnalisation du sport chez les jeunes.  

La tendance des parents et des tuteurs à « vivre » l’engagement sportif par procuration à travers leurs enfants pourrait être mieux décrite comme le désir d’un parent de voir son enfant atteindre des étapes ou des niveaux de réussite qu’il ne pourrait pas atteindre lui-même (Knight et coll., 2016). Les exemples pourraient inclure l’obtention d’une bourse d’études liée au sport ou la pratique d’un sport au niveau professionnel. La quantité de capital social souvent associée au succès d’un jeune athlète dans le sport est également liée à ces désirs parentaux. Les enfants sont tout à fait capables d’influencer la vie sociale et le statut de leurs parents et de leur famille dans son ensemble, en particulier par l’entremise d’activités axées sur la réussite telles que le sport chez les jeunes (Brown, 2020). Cela peut être observé dans les histoires de jeunes athlètes prodiges dont les parents sont souvent tenus en haute estime, voire bénéficient d’un niveau de célébrité au sein de leur communauté et au-delà (Sandstrom, 2022; Williams et Cotton, 2019). Des exemples récents de ce phénomène sont la représentation et la glorification du père des vedettes du tennis Serena et Venus Williams dans le film King Richard, nommé aux Oscars (Stinson, 2021) et l’attention portée aux parents du phénomène du hockey junior mondial canadien Connor Bedard (Masters, 2022). Dans un cas comme dans l’autre, lorsque l’on considère les avantages offerts aux parents si leurs jeunes athlètes réussissent dans le sport pour les jeunes, il est important de reconnaître que des incitations autres que le développement, la croissance et le plaisir du sport de leur enfant pourraient jouer un rôle dans l’influence des comportements des parents. 

Le deuxième problème systémique auquel de nombreux jeunes athlètes et leurs familles sont confrontés est la montée de la professionnalisation du sport chez les jeunes. La professionnalisation d’un programme de sport pour les jeunes se produit lorsque les objectifs du programme semblent s’aligner plus étroitement sur ceux qui semblent plus appropriés dans un contexte de sport professionnel ou adulte plutôt que dans un contexte ciblant les enfants ou les adolescents (Erdal, 2018). Par exemple, si un programme de hockey pour les jeunes exige des familles qu’elles se déplacent en autobus d’équipe pour se rendre à des matchs à l’extérieur, qu’il nécessite un plan d’entraînement hors glace intense et qu’il se concentre sur l’enseignement et la mise en œuvre de systèmes de jeu avancés plutôt que sur le développement individuel et le plaisir, il pourrait être considéré comme plus professionnalisé que récréatif.  

Bien que l’on puisse supposer que les enfants et leurs familles peuvent tirer divers avantages de leur participation à ces milieux intensifiés, le problème le plus critique associé à la professionnalisation du sport chez les jeunes est peut-être son coût financier. Depuis plusieurs décennies au Canada, le prix croissant des programmes de sport pour les jeunes a de plus en plus dissuadé les jeunes, en particulier ceux des communautés marginalisées et les personnes de faible statut socio-économique, de s’engager dans le sport ou de rester engagés dans le sport pendant plusieurs saisons. Dans l’ensemble, l’élimination progressive des programmes sportifs communautaires (comme les programmes récréatifs après l’école) en faveur de ligues plus formelles et de haute performance a eu pour effet de réduire l’accès aux programmes sportifs pour de nombreux jeunes (Grueau, 2016).  

Étant donné que le coût moyen d’inscription à un programme sportif compétitif pour les jeunes est d’environ 774 $ par saison et que le coût d’un programme non compétitif est de 320 $ dans une ville canadienne de taille moyenne, on peut supposer que la plupart des participants aux programmes sportifs pour les jeunes sont des personnes issues de familles dont le statut socioéconomique est moyen ou élevé et qui disposent de suffisamment de temps libre pour s’impliquer (Robertson et coll., 2019).  

Même pour les parents et les tuteurs de statut socioéconomique moyen à élevé, la pression pour continuer à financer le sport de leurs enfants peut être intense. Les rapports de parents ouvrant des marges de crédit supplémentaires pour payer l’équipement, les frais de ligue et les possibilités d’entraînement supplémentaires nécessaires pour que leurs enfants continuent à pratiquer un sport de haut niveau sont de plus en plus nombreux (Adams et Johnson, 2018). De plus, la compétition sociale et la comparaison entre les familles sportives que ces environnements créent sont également problématiques. Au cours d’une étude récente que j’ai menée, les parents de hockey ont décrit la participation de leur famille au sport comme étant davantage liée à des idées et des notions autour de la façon dont ils devraient apparaître comme de « bons Canadiens » et de bons membres de la communauté plutôt qu’aux résultats liés au contenu ou à la qualité du programme de leurs enfants (Murata et Côté, 2022).  

Améliorer le sport chez les jeunes pour les athlètes et leurs familles 

Il est clair que les parents sont souvent confrontés à une variété de défis personnels en ce qui concerne la participation sportive de leurs enfants. Si l’on considère les engagements financiers et les environnements sociaux dans lesquels les parents et les tuteurs doivent naviguer au sein du sport des jeunes, leurs manifestations de frustration et autres comportements négatifs peuvent être un peu plus faciles à comprendre. À ce titre, la pression associée à la participation ainsi que le coût financier de la pratique sportive doivent être abordés.  

Étant donné que la majorité des programmes de sport pour les jeunes semblent être de nature plus compétitive que récréative, le fait de rendre obligatoire et de financer des offres plus occasionnelles (celles qui n’impliquent pas de déplacements, pas d’entraînement spécifique au sport et moins de séances par semaine) pourrait être un moyen d’égaliser les chances pour un plus grand nombre de familles. Cependant, les coûts associés à l’utilisation des installations sont souvent prohibitifs pour ces types de programmes, et un soutien gouvernemental ou de la gouvernance du sport serait donc nécessaire.    

Un changement de culture concernant le statut associé aux programmes sportifs de haute intensité est également nécessaire dans le sport des jeunes au Canada. Les pressions actuelles ressenties par les parents, les tuteurs et leurs enfants seraient peut-être allégées si la participation était davantage axée sur la croissance, les loisirs et le plaisir plutôt que sur des critères de réussite. La réduction du coût financier du sport ferait également des merveilles pour que la participation semble être moins un symbole de statut pour les familles concernées. Une culture sportive qui décourage la glorification de la participation à des programmes sportifs de haut niveau dès le début de la vie d’un athlète peut constituer une étape raisonnable dans la création d’environnements sportifs plus équitables et positifs.  

Dans la lignée d’un changement de culture à grande échelle, les praticiens et les chercheurs du sport pour les jeunes ont commencé à spéculer sur la façon dont les comportements négatifs des parents pourraient être atténués au niveau administratif (Gould, 2019; Ross et coll., 2015; Wiersma et Sherman, 2005). Par exemple, des recherches antérieures suggèrent que les administrateurs devraient: 

Même lorsque les administrateurs sportifs suivent ces suggestions, les parents ont toujours la responsabilité d’être conscients de leur propre comportement et de le contrôler en tant que membres clés du système sportif des jeunes. Des recherches influentes menées par Knight et coll. (2010) et Tamminen et coll. (2017) suggèrent que les parents peuvent accomplir cela en:  

Le sport peut être un moyen important de favoriser des expériences agréables, d’enseigner des aptitudes de vie et de promouvoir des habitudes de santé physique et mentale positives pour les enfants et les adolescents athlètes. En tant que tel, il est important que tous les adultes impliqués dans l’animation et la prestation de programmes sportifs à ces populations visent à créer des environnements qui permettront aux participants de se développer, de s’épanouir et de rester impliqués sur une longue période de temps.  

Étant donné que les parents jouent un rôle essentiel dans le soutien de leurs enfants, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du sport, il est important de s’assurer que ces personnes disposent des compétences nécessaires et d’un environnement qui leur permettra de réussir. Avec les connaissances et les outils nécessaires, les parents et les tuteurs peuvent s’efforcer de favoriser des expériences sportives positives pour leurs enfants, pour eux-mêmes et pour toutes les personnes impliquées dans le sport des jeunes.

Points saillants:

Aisulu Abdykadyrova se souvient d’un arrêt d’autobus à Edmonton, en Alberta, par une froide nuit d’hiver, le vent glacial donnant l’impression qu’il faisait -30 degrés Celsius. Sa fille, qui venait de terminer son entraînement au club de gymnastique rythmique d’Edmonton, avait tellement froid qu’elle s’est mise à pleurer. Il leur fallait encore deux bus et deux heures avant d’arriver à la maison.

Mme Abdykadyrova a quitté le Kirghizistan pour venir au Canada afin de terminer son doctorat à l’Université de l’Alberta. Elle est arrivée à Edmonton avec son mari et ses deux enfants, alors âgés de 8 et 10 ans, en 2014. Mme Abdykadyrova étant inscrite à un programme d’études supérieures à temps plein et son mari travaillant dans la construction, la famille avait souvent du mal à joindre les deux bouts.

« Les frais d’entraînement s’élevaient à environ 600 dollars par mois… C’est pourquoi j’ai commencé à travailler alors que j’étais encore aux études », dit-elle, faisant référence au coût de la participation de sa fille à la gymnastique rythmique après qu’elle ait atteint le niveau national. « Cela a été tellement difficile. Personne ne nous a accordé de rabais », ajoute-t-elle.

Les frais d’entraînement et les longs trajets en transports en commun ne sont que quelques-uns des nombreux défis qu’Aisulu a dû relever pour permettre à ses enfants de participer à un sport organisé. Le sport peut contribuer à promouvoir la santé physique et mentale, à tisser des liens sociaux et à favoriser l’intégration des nouveaux arrivants dans les communautés canadiennes (par exemple, l’apprentissage de l’anglais ou du français). Mais la recherche montre que les nouveaux arrivants, y compris les immigrants récents et les réfugiés, sont confrontés à des obstacles uniques à la participation au sport. Le coût des frais d’inscription et de l’équipement, le transport vers et depuis les installations sportives, l’accès à l’information sur les programmes sportifs et les expériences de racisme et de discrimination empêchent de nombreux nouveaux arrivants de pratiquer un sport, malgré tout ce qu’il a à offrir.

Pourquoi le sport est important

Gololcha Boru ne connaît que trop bien ces obstacles. La famille de Gololcha, originaire d’Éthiopie, est arrivée au Canada en tant que réfugiée alors qu’il était un jeune enfant. Ils se sont installés à Winnipeg, au Manitoba, où Gololcha fut initié au sport à l’école. Ses premières expériences dans le système sportif n’ont pas été entièrement positives, de sorte qu’il n’y est pas resté longtemps.

« Une grande partie de ces problèmes était due au fait que l’on n’avait pas d’argent pour s’inscrire, et parfois les entraîneurs en parlaient devant l’équipe, de sorte que tout le monde savait que l’on n’avait pas d’argent pour jouer », explique-t-il. « Et puis il y a aussi les cas de microagressions. Si vous parlez, on considère que vous manquez de discipline. Un joueur blanc qui parle, on considère qu’il a des qualités de leader. »

Gololcha est revenu au sport au début de la vingtaine lorsqu’il a commencé à entraîner l’équipe de soccer jeunesse de l’Immigrant and Refugee Community Organization of Manitoba (IRCOM). C’est en tant qu’entraîneur qu’il a réalisé l’impact positif que la participation au sport pouvait avoir sur les jeunes nouveaux arrivants.

« Je pense que le sport en soi est un outil ou un mécanisme qui peut être utilisé pour améliorer sa vie, non seulement pour être physiquement actif toute sa vie, mais aussi… pour apprendre d’importantes leçons de vie. Donc, vous savez, l’importance du travail acharné, l’importance de la persistance, l’importance du travail d’équipe », dit-il.

Il considère le sport comme un moyen de faire des jeunes nouveaux arrivants des leaders qui donnent en retour à leur communauté, mais seulement si l’environnement sportif est intentionnellement conçu pour favoriser des expériences et un développement positifs. Tel était l’objectif de son travail avec l’IRCOM : « Nous avons essayé de créer des environnements dans lesquels les jeunes se sentent en sécurité et éprouvent un sentiment de fierté et d’autonomie qui leur permet non seulement de pratiquer un sport, mais aussi de jouer un rôle actif en tant qu’entraîneur, arbitre et ainsi de suite. »

Gololcha travaille maintenant dans la division des services communautaires de la ville de Winnipeg, où il a joué un rôle clé dans la rédaction et la mise en œuvre de la politique d’accueil et d’inclusion des nouveaux arrivants de la ville. Il est également l’un des responsables de la campagne contre le racisme dans le sport d’Immigration Partnership Winnipeg.

Défendre les intérêts des nouveaux arrivants dans le sport

Comme Boru, Abdykadyrova est devenue une championne acharnée de la participation au sport des nouveaux arrivants dans sa communauté. Tout a commencé lorsqu’elle a inscrit sa fille à la gymnastique rythmique, un sport populaire au Kirghizistan, d’où sa famille est originaire. Mme Abdykadyrova savait que le coût de ce sport empêchait d’autres familles de nouveaux arrivants de s’y adonner, et elle voulait changer cela.

« J’ai dit à notre entraîneur-chef que nous pouvions créer un programme accessible gratuitement aux nouveaux arrivants, et tout le monde me disait que ce n’était pas possible. J’ai répondu “si, c’est possible”. »

Abdykadyrova fut vice-présidente, puis présidente bénévole du club de gymnastique rythmique de sa fille de 2015 à 2020. Pendant cette période, elle a collecté des fonds et présenté des demandes de subventions jusqu’à ce que le club ait assez d’argent pour offrir des camps d’été gratuits et un programme de gymnastique rythmique récréative pour les filles nouvellement arrivées. Une centaine de filles participent chaque année à ces programmes gratuits. Le club a engagé Abdykadyrova en tant que directrice des programmes en 2020.

Elle est également une fervente partisane du club de natation de son fils, le Race-Pace Swim Club, une organisation basée à Edmonton qui dessert la communauté ukrainienne, y compris les nouveaux arrivants au Canada. Le club s’est vu refuser l’affiliation à Natation Alberta en 2019 parce qu’il se trouve dans une région déjà bien desservie par des clubs existants. Cela signifiait que les membres du Race-Pace Swim Club ne pouvaient pas participer à des compétitions sanctionnées. Bien que Natation Alberta ait offert d’aider à transférer les nageuses et nageurs dans des clubs existants, ces clubs n’offraient pas la communauté culturelle et les barrières réduites que Race-Pace offre, explique Abdykadyrova.

« Quelle est la différence entre ce club et les autres ? Il a une composante culturelle », explique-t-elle. « Et notre club, les membres du conseil d’administration et le personnel d’entraînement [ont créé un programme qui] aide les nouveaux arrivants à s’intégrer dans la société canadienne grâce au programme de natation. »

Abdykadyrova et d’autres supporters du club ont continué à défendre le club. Les nageurs de Race-Pace ont pu participer à des compétitions sanctionnées pour la première fois en décembre 2022.

En dehors de ses rôles au sein des clubs sportifs de ses enfants, Abdykadyrova travaille comme coordinatrice de projet à Action for Healthy Communities, une organisation d’établissement qui fournit des services de renforcement des capacités aux nouveaux arrivants, y compris dans le domaine du sport. Elle coordonne le programme PASS (Participating in Arts, Sports, and Society), qui offre aux jeunes des programmes de sport après l’école, des activités d’initiation au sport, des séances d’information communautaires axées sur le sport, un forum pour partager les meilleures pratiques en matière de programmes sportifs inclusifs, et une recherche axée sur les obstacles à la participation au sport chez les jeunes nouveaux arrivants racialisés. Elle siège également au conseil d’administration de l’Edmonton Sport Council.

L’Académie sportive des nouveaux arrivants de Winnipeg

Photo: Winnipeg Newcomer Sport Academy

De retour à Winnipeg, Ali Aljoumah, 16 ans, a profité des avantages d’un programme sportif conçu pour et avec les nouveaux arrivants. Ali est né en Syrie et a déménagé au Canada en 2019. À l’époque, il ne parlait pas l’anglais. Il était difficile pour lui de participer à des activités organisées comme le sport en raison de cette barrière linguistique. Cela a changé lorsqu’il a découvert la Winnipeg Newcomer Sport Academy [l’Académie sportive des nouveaux arrivants de Winnipeg] (WNSA).

La WNSA a été fondée en 2016 pour offrir aux enfants et aux jeunes nouveaux arrivants de Winnipeg, au Manitoba, des programmes multisports de qualité et abordables. Non seulement la WNSA vise à être à la fois abordable et accessible pour les familles de nouveaux arrivants, mais elle s’efforce également d’offrir des programmes multisports de qualité qui sont adaptés au développement et à la culture des enfants et des jeunes nouveaux arrivants.

« L’un des avantages [de la WNSA] est de pouvoir pratiquer tous ces sports différents, littéralement gratuitement, le transport étant assuré pour toutes les familles, la nourriture étant comprise, etc. C’est vraiment amusant de participer au programme en pratiquant tous ces sports différents, sans rien recevoir en retour », déclare Ali.

En se concentrant explicitement sur l’amélioration de la croissance et du développement des participantes et participants à la fois dans le sport et dans leurs communautés, la WNSA cherche à promouvoir la forme physique et les compétences sportives, à améliorer la santé et le bien-être, et à offrir des possibilités d’engagement civique et de leadership. Par exemple, la WNSA offre aux jeunes plus âgés des possibilités de développement du leadership par le biais de l’entraînement et de l’arbitrage, y compris une assistance pour l’obtention de diplômes qui les aideront dans leur futur emploi. Quand Ali a eu 13 ans, il s’est inscrit au programme de leadership et travaille maintenant comme entraîneur de la WNSA.

« J’adore entraîner, vous savez, j’aime tout ce qui s’y rapporte », dit-il. « J’aime aider les enfants à se déplacer, apprendre à connaître les nouveaux enfants, d’où ils viennent, ce qu’ils aiment, ce qu’ils n’aiment pas. J’aime aussi aider la WNSA parce que j’ai déjà été comme l’un de ses enfants. »

Grâce au sport, la WNSA initie les familles de nouveaux arrivants à la culture canadienne dans un environnement sécuritaire. Sa devise, « réinstallation, intégration, inclusion », témoigne du rôle essentiel que le sport peut jouer dans le processus d’établissement. « Vous êtes dans une toute nouvelle culture. Vous ne savez pas ce qui se passe autour de vous », explique Aljoumah. Mais essayer de nouveaux sports (par exemple, apprendre à patiner) l’a aidé à se sentir davantage chez lui.

Compte tenu du succès que connaît le programme à Winnipeg, il y a deux choses qui empêchent Carolyn Trono, fondatrice et directrice générale bénévole de la WNSA, de dormir la nuit : la qualité de la programmation sportive offerte aux nouveaux arrivants à travers le pays, et comment rendre le système sportif canadien plus accueillant.

Mme Trono croit que la conception d’espaces sportifs accueillants et inclusifs pour les nouveaux arrivants doit « commencer dès qu’ils quittent la maison ». Tout doit être pris en compte, depuis le coût, la langue et le transport jusqu’aux relations que les participantes et participants établissent avec leurs pairs et les leaders du programme, dit-elle.

Mme Trono insiste également sur le fait que les voies d’accès au sport et les moyens de le pratiquer peuvent être différents pour les nouveaux arrivants. Par exemple, les programmes axés sur les traumatismes et la culture peuvent jouer un rôle important dans l’initiation des immigrants et des réfugiés récents au sport au Canada, mais il doit y avoir des voies pour « combler le fossé » vers les programmes généraux, en particulier pour ceux qui ont la motivation et les compétences nécessaires pour pratiquer un sport de compétition. Cela signifie que les responsables des programmes de sport traditionnels doivent être accueillants et prêts à découvrir d’autres cultures, explique Mme Trono.

Grâce à un financement de Patrimoine canadien, Mme Trono fait partie d’une équipe qui élabore des ateliers fondés sur des données probantes pour enseigner aux dirigeants et aux organisations sportives comment créer des environnements accueillants dans le sport pour les nouveaux arrivants. 

L’initiative WinSport Welcomes Newcomers

children on spin bikes at Winnipeg Newcomer Sport Academy
Photo: Winnipeg Newcomer Sport Academy

L’initiative WinSport Welcomes Newcomers (WWNI) est un autre programme qui vise à réduire les obstacles à la participation au sport pour les nouveaux arrivants. WinSport possède et exploite le Parc olympique du Canada à Calgary, en Alberta, l’une des principales installations héritées des Jeux olympiques d’hiver de 1988. Il offre des programmes et des installations qui aident les personnes de tous âges à découvrir, s’améliorer et exceller dans le sport. Simon Barrick, alors doctorant à l’Université de Calgary, a co-fondé WWNI en 2017. Barrick s’est associé à WinSport, au Centre pour les nouveaux arrivants et à l’Association des femmes immigrantes de Calgary pour concevoir WWNI, un programme d’initiation au sport pour les nouvelles Canadiennes et nouveaux Canadiens de Calgary, dans le cadre de sa recherche doctorale.

« Nous avons conçu ce programme. Ma thèse visait à explorer les expériences vécues par les nouveaux arrivants dans le cadre de ces programmes et à fournir une sorte d’examen critique de la façon dont le programme a été mis en place, de son fonctionnement, de certains des résultats et de certains des obstacles qui persistent malgré les efforts visant spécifiquement à initier les nouveaux arrivants au sport », explique Barrick.

Barrick, qui est maintenant professeur adjoint à l’Université du Cap-Breton, se passionne pour la transformation du sport, de l’activité physique et des loisirs au Canada afin qu’ils soient accueillants pour toutes les Canadiennes et tous les Canadiens, en particulier les communautés marginalisées et sous-représentées. Dans le cadre de son travail avec WinSport, Barrick a exploré des moyens novateurs de réduire les obstacles et de favoriser l’inclusion des nouveaux arrivants dans le sport.

Par exemple, les systèmes d’inscription complexes qui exigent une connaissance de la langue, de la technologie et de la plateforme d’inscription, ainsi qu’un accès à la technologie ou à Internet pour utiliser le système, peuvent constituer un obstacle important à l’entrée dans les programmes. Dans le cadre du WWNI, M. Barrick et ses partenaires ont essayé différents moyens de faciliter l’inscription en demandant aux conseillers des services d’établissement de travailler directement avec les familles pour les inscrire aux programmes ou en envoyant une équipe de WinSport dans les bureaux des services d’établissement pour guider les participants tout au long du processus.

« Je pense que la leçon à en tirer est d’envisager un processus étape par étape pour en faire une expérience vraiment positive [pour les nouveaux arrivants] », dit-il.

Les leçons tirées de l’inscription au programme se sont étendues à d’autres défis pour les participants. Par exemple, bien que WinSport ait renoncé au coût de location de l’équipement et que les organisations partenaires aient organisé une collecte de vêtements d’hiver pour les partager gratuitement, de nombreux participants ont eu besoin d’être informés sur le type de vêtements appropriés (pour les sports d’hiver en particulier) ou sur la façon d’ajuster correctement l’équipement. Le processus d’inscription a donc évolué à nouveau. Les familles de nouveaux arrivants pouvaient se rendre aux bureaux des services d’établissement lors de journées ciblées et passer d’une pièce à l’autre pour accéder à tout ce dont elles auraient besoin, depuis les informations sur le programme et l’inscription jusqu’aux vêtements et à l’équipement, y compris la formation dont elles ont besoin pour l’utiliser.

Selon Jennifer Konopaki, vice-présidente du sport de WinSport, il est essentiel de comprendre les besoins des nouveaux arrivants et de savoir où ils en sont dans le processus d’établissement :

« Ce que les [nouveaux arrivants] vivent au cours du premier mois, des six premiers mois, de l’année suivante ou des cinq années suivantes est très différent. Et leurs exigences et leurs besoins tout au long de ce processus ou de ce voyage sont très différents. Ainsi, en tant qu’opérateur ou programmeur, vous devez savoir où vous vous situez dans leur parcours. Ensuite, vos services et la conception de ce que vous offrez doivent refléter le point où ils en sont dans leur parcours pour devenir un nouveau Canadien ou une nouvelle Canadienne. »

Plus de 600 nouveaux arrivants ont participé au WWNI depuis sa création en 2017 et le programme a continué d’évoluer pour répondre aux besoins des nouveaux arrivants à Calgary et dans les environs pendant cette période. Par exemple, WinSport a organisé une journée annuelle de divertissement familial pour les nouveaux arrivants, rendue possible grâce au parrainage de Capital Power, au cours des deux dernières années.

« Les familles ont adoré. Cela a permis d’éliminer certains des défis liés aux programmes d’engagement plus longs avec lesquels nous avons commencé. En effet, dans le cas des programmes à engagement plus long, il faut participer, se présenter, être régulier, et c’était un élément difficile pour certaines [familles] de nouveaux arrivants », explique Jennifer.

WinSport est actuellement engagé dans un nouveau partenariat de recherche avec Matthew Kwan, professeur agrégé au département des études sur l’enfance et la jeunesse de l’Université Brock. Le projet explorera les programmes de littératie physique pour les jeunes nouveaux arrivants.

Mme Konopaki estime qu’il est très utile de faire appel à des chercheurs pour soutenir la conception et la mise en œuvre des programmes : « C’est vraiment génial. Simon [Barrick] a joué un rôle déterminant pour nous aider à démarrer. Et Matt [Kwan] a contribué à nous aider à devenir de meilleurs opérateurs et programmeurs. »

Conseils pour créer des espaces accueillants et équitables dans le sport pour les nouveaux arrivants

  1. Co-concevoir des programmes avec les nouveaux arrivants à travers une lentille intersectionnelle.

Dans la mesure du possible, les programmes sportifs destinés aux nouveaux arrivants devraient être conçus conjointement avec ces derniers et les agences ou organismes de services qui les défendent. Il s’agit d’une étape importante pour s’assurer que les obstacles pertinents sont abordés et que le programme dans son ensemble répond aux besoins du groupe cible. Elle est également importante pour établir la confiance entre l’organisation qui offre le programme et la communauté des nouveaux arrivants. 

« Lorsque vous faites participer quelqu’un, n’importe quel groupe historiquement exclu, ou du moins qui n’est pas présent dans votre espace sportif… je dirais que vous devez surtout l’impliquer directement », dit Barrick. « Donc, travailler avec ces entités, dès le premier jour, pour identifier les besoins des individus et des communautés dans leur ensemble, et commencer à établir cette confiance. »

En tant que nouvelle arrivante elle-même, Abdykadyrova a souligné l’importance de comprendre la situation dans laquelle se trouvent les nouveaux arrivants et de faire preuve de compassion. Pour cela, il faut parler aux nouveaux arrivants de leurs expériences : « Vous savez comme il fait froid à Edmonton [en hiver], moins 20, mais on a l’impression qu’il fait moins 30. Et nous sommes restés à l’arrêt d’autobus à attendre le bus. Et ma fille pleurait parce qu’elle avait si froid. Personne au conseil scolaire ou les parents locaux ne vivent pas cela, n’est-ce pas ? »

Boru ajoute que la conception de programmes à travers une lentille intersectionnelle est importante pour comprendre l’influence superposée de diverses identités et barrières sur la participation au sport.

  1. Collaborer et partager les ressources et les capacités avec les partenaires concernés

Selon Mme Konopaki, le succès de WWNI est dû en grande partie aux partenariats. « Ce qui est essentiel, c’est le partenariat entre l’exploitant de l’installation et le programmateur, l’organisme qui entretient la relation et qui s’occupe actuellement des nouveaux arrivants, et les chercheurs. Lorsque ces trois groupes d’experts se réunissent et conçoivent ensemble, c’est magnifique », dit-elle.

Barrick, le chercheur qui a cofondé WWNI, a souligné comment des collaborations significatives avec des partenaires pertinents peuvent réduire la charge de travail d’une organisation grâce au partage des ressources et des capacités (telles que les coûts, l’expertise et l’accès aux équipements ou aux installations). « Lorsque vous travaillez avec différentes organisations, il y a un certain partage des coûts qui s’opère, notamment en termes de soutien en nature », explique-t-il. « Par exemple, lorsque nous travaillions avec des organismes d’aide à l’établissement, ils proposaient de fournir des services de traduction, et différentes choses de ce genre. »

  1. Trouver des moyens innovants de réduire les obstacles à la participation des nouveaux arrivants

L’une des questions clés de l’inclusion dans le sport est de savoir s’il s’agit d’un élément performatif ou structurel, explique M. Barrick. Un élément performatif de l’inclusion qui pourrait être problématique est le fait qu’un club ou une organisation sportive publie une déclaration disant : « Nous accueillons tout le monde, venez ». Oui, c’est agréable à entendre. Et cela peut, dans certains cas, faire venir des gens. Mais si l’organisation n’a pas réfléchi à des stratégies innovantes pour soutenir ces personnes une fois qu’elles sont dans l’espace, alors cela devient une performance. Et c’est un problème. »

Pour être réellement inclusives, les organisations doivent, dans la mesure du possible, s’attaquer aux obstacles à la participation, notamment le coût, l’équipement, le transport, l’accès à l’information et les considérations religieuses ou culturelles. Par exemple, Aljoumah a souligné la nécessité d’obtenir l’adhésion des parents lors de la promotion d’un programme sportif pour les enfants et les jeunes nouveaux arrivants : « Si les parents sortent et voient ce que nous faisons, je pense que ce sera beaucoup mieux pour les parents de savoir ce que nous faisons [et] d’apprécier ce que nous faisons. »

  1. Pensez au-delà des obstacles à la qualité des programmes que vous offrez.

Carolyn Trono, fondatrice et directrice générale bénévole de la WNSA, souligne que la qualité des programmes sportifs est un problème majeur pour les nouveaux arrivants. La réduction des obstacles est le moyen de faire venir les participantes et participants, mais des espaces accueillants et inclusifs sont nécessaires pour favoriser la croissance, le développement et les compétences de vie, dit-elle.

Aljoumah, ancien participant et actuel responsable de programme à la WNSA, souligne l’importance de favoriser des relations positives entre les responsables de programme et les participantes et participants. Selon lui, il est important que ces relations aillent au-delà du sport. « Nous ne parlons pas seulement du score, mais aussi de leur journée, de la façon dont les choses se passent, des autres sentiments. Il s’agit donc de bien plus que de leur arrivée. Ils ne se contentent pas de faire du sport et de partir, mais il s’agit d’établir de bons, bons rapports entre les enfants et les dirigeants. »

Un dernier conseil : « Il ne faut pas que ce soit trop strict. Ils sont là pour s’amuser », ajoute-t-il.

Programmes et ressources recommandés

Points saillants

« Vous pouvez être une ou un athlète pendant encore plus de 50 ans ! » dis-je à mes étudiants en leadership dans le sport et l’activité physique.

Ils répondent avec stupéfaction : « Quoi ? »

Personne ne leur a dit ceci auparavant. Mais c’est vrai. 

La participation des adultes au sport est fréquemment oubliée. Elle n’est pas abordée aussi souvent que le sport jeunesse. Elle est rarement considérée comme une priorité par les organisations et les systèmes sportifs, que ce soit en matière de politiques, de programmation et de recrutement, d’entraînement ou de logistique d’utilisation des installations. Cela est vrai même pour les adultes qui aiment le sport et qui ont été fortement impliqués dans le sport dans leur enfance et leur jeunesse. 

Nous savons que la pratique du sport peut prévenir les pressions sur la santé publique, maintenir les adultes et les personnes âgées heureux et en bonne santé, et les encourager à rechercher la maîtrise et de nouvelles expériences. Pourtant, on l’oublie. 

Cet article examine la recherche et les réalités de la façon dont le système sportif peut mieux favoriser la participation sportive tout au long de la vie, et non seulement pendant la jeunesse. Il est important de comprendre les besoins des athlètes maîtres, des athlètes matures et des adultes plus âgés qui participent à des activités sportives.

Comment nous avons négligé les athlètes maîtres et les adultes plus âgés

Une grande partie de la recherche dans le domaine du sport est axée sur la haute performance ou la pratique du sport chez les jeunes. En tant que rédactrice en chef de l’International Sport Coaching Journal, moi, Bettina (premier auteur), je vais m’en prendre à moi-même pour faire cette remarque (bien que de façon facétieuse, car je ne choisis pas les sujets des manuscrits soumis à la revue). Si nous examinons le numéro le plus récent au moment de la rédaction de cet article (volume 9, numéro 3, septembre 2022), nous constatons la répartition suivante (généralisée) des publications de recherche originale : 12 % sur la formation des entraîneurs, 38 % sur l’entraînement des jeunes et 50 % sur l’entraînement des athlètes d’élite/collégiens/professionnels. 

Remarquablement, si l’on examine le modèle 3.0 du développement à long terme dans le sport et l’activité physique (DLT), on peut constater une orientation parallèle ainsi que la manière dont il influence la pratique. Le DLT utilise un diagramme rectangulaire pour définir un cadre pour les parcours de développement dans le sport et l’activité physique. Il comporte une grande section consacrée à la vie active comme alternative à la voie du podium vers la haute performance. C’est excellent, car cela inclut le grand nombre de personnes (y compris les adultes et les personnes âgées) qui ne sont pas sur la trajectoire vers les performances de podium au plus haut niveau du sport et qui continuent pourtant à pratiquer le sport et l’activité physique. 

Cependant, bien que le DLT reconnaisse que les adultes âgés constituent un groupe mal desservi et mal soutenu dans l’écosystème du sport et de l’activité physique, les informations contenues dans le cadre lui-même sont principalement associées aux enfants, aux jeunes et aux jeunes adultes. Le DLT définit également une activité physique et sportive de qualité comme étant adaptée au développement, bien gérée, sécuritaire et inclusive. Mais les besoins et les préférences des adultes dans le sport doivent être compris pour créer une programmation et un développement appropriés, et pour que les gens se sentent en sécurité et inclus.   

En réalité, le développement des adultes dans le sport est souvent axé vers une carrière d’entraîneur ou d’officiel, la participation à un conseil d’administration d’équipe ou de club de sport jeunesse, la collecte de fonds et le bénévolat. Cependant, il existe de nombreuses façons dont les adultes peuvent et doivent poursuivre leurs propres activités sportives. L’obtention d’un diplôme secondaire, collégial ou universitaire ne doit pas être synonyme de retraite sportive. Il y a encore plusieurs décennies de participation sportive et de joie de vivre. Pour promouvoir, recruter et poursuivre la pratique du sport tout au long de la vie, il faut mettre en place des mesures de soutien.

Le rôle des entraîneurs dans le sport pour adultes

Les entraîneurs qualifiés sont des acteurs importants qui animent une grande partie du sport. En effet, il nous a été suggéré un jour que sans entraîneurs, il n’y aurait pas de sport. Mais c’est une vision à court terme : le sport pour adultes existe souvent sans entraîneurs. S’il existe des sports pour adultes récréatifs et des « ligues de bière » qui, le plus souvent, n’ont pas d’entraîneurs, nous tournons l’attention du lecteur vers le sport des maîtres, où les entraîneurs peuvent jouer des rôles importants dans le système sportif (Callary et al., 2021). 

Le sport des maîtres est défini comme des événements sportifs, des ligues et des compétitions pour les adultes généralement âgés de plus de 35 ans (bien que cela diffère selon le sport et inclure des adultes aussi jeunes que 18 ans), avec des participants qui s’inscrivent (paient), et qui pratiquent ou s’entraînent généralement à des fins compétitives, et qui ont souvent un entraîneur (Young et al., 2018). Au sein de cette cohorte d’athlètes adultes plus sérieux, les entraîneurs efficaces jouent un rôle important en répondant aux besoins psychosociaux des athlètes et en validant leur décision de poursuivre la pratique d’un sport. Les athlètes, les entraîneurs et les personnes proches du système sportif qui ne connaissent pas, ou qui sous-estiment peut-être la valeur du sport des maîtres, peuvent saper ce rôle (Callary et al., 2017).

Certains se demandent pourquoi les adultes devraient avoir besoin d’être entraînés. Il existe des hypothèses âgistes selon lesquelles les adultes ne s’améliorent pas, et qu’ils sont simplement là pour une activité de loisirs sociale et de remise en forme. Dans notre recherche (Callary et al., 2017), nous avons constaté que cet âgisme peut amener les entraîneurs et les athlètes à croire qu’ils n’ont pas vraiment besoin d’entraîner les athlètes maîtres. C’est-à-dire qu’ils n’ont pas besoin de développer et de préparer des plans d’entraînement, de fournir une rétroaction, d’appuyer l’apprentissage des athlètes et d’investir dans des relations entraîneur-athlète de qualité. Des hypothèses similaires seraient absurdes dans le sport des jeunes. Exigeons-nous toujours un entraînement de qualité si les jeunes athlètes ne deviennent pas des Olympiens ou des athlètes professionnels ? Oui, bien sûr. Cette même logique doit s’appliquer au niveau du sport adulte. En d’autres termes, un encadrement de qualité devrait être une caractéristique inhérente au sport des maîtres et au sport des adultes plus âgés. 

Néanmoins, il faut tenir compte d’importantes considérations psychologiques et sociales lorsque l’on entraîne des adultes afin de garantir une expérience sportive de qualité pour les maîtres (Young et al., 2021). Dans notre livre Coaching masters athletes : Advancing research and practice in adult sport (Callary et al., 2021), nous présentons les principales considérations psychosociales qui ont émergé de notre programme de recherche des dix dernières années. 

En particulier, le livre est basé sur la prémisse qu’il existe cinq approches d’entraînement orientées vers les adultes que les entraîneurs et les athlètes souhaitent, et qui sont alignées sur les principes d’apprentissage des adultes qui amélioreront l’expérience sportive (Callary et al., 2021). Ces approches d’entraînement orientées vers les adultes ont été développées par des recherches qualitatives approfondies (comme Callary et al., 2015 ; 2017 ; MacLellan et al., 2019) et validées par des analyses quantitatives. 

Par exemple, l’enquête sur l’entraînement sportif orienté vers les adultes (AOSCS ; Rathwell et al., 2020) définit nos cinq thèmes comme suit : 

Ces cinq thèmes, qu’ils soient appliqués collectivement ou utilisés de manière flexible par les entraîneurs d’adultes, représentent une palette de pratiques d’entraînement fondées sur des preuves. 

Nos recherches en cours montrent que les entraîneurs trouvent que les différentes compétences et stratégies de chacun des cinq thèmes, ainsi que le thème lui-même, sont utiles et pertinentes pour l’entraînement. Ils notent que ces nuances des approches d’entraînement orientées vers les adultes peuvent être utilisées au besoin, pas nécessairement toujours en tandem, mais plutôt comme une « boîte à outils » pour une pratique d’entraînement continue au fil du temps (Callary et al., en cours de révision). Ceci est important, car les entraîneurs peuvent travailler avec les mêmes athlètes maîtres pendant plusieurs décennies. Ainsi, l’adoption et l’essai de nouvelles approches orientées vers les adultes peuvent s’avérer particulièrement importantes pour l’entraînement de cette cohorte en permettant de garder les choses fraîches et en suscitant éventuellement un développement supplémentaire chez les entraîneurs.

En gardant à l’esprit les centaines de choses que les entraîneurs peuvent faire et essayer avec leurs athlètes, Motz et ses collègues (2022) ont indiqué que l’utilisation de ces cinq approches d’entraînement orientées vers les adultes était particulièrement associée à des relations positives entre l’entraîneur et l’athlète. Plus précisément, ces chercheurs ont constaté que ces approches expliquaient 63 % des raisons pour lesquelles les athlètes maîtres se sentent engagés envers leurs entraîneurs, 40 % des raisons pour lesquelles les athlètes maîtres se sentent proches de leurs entraîneurs, et 41 % de la façon dont les athlètes maîtres voient que les comportements de leurs entraîneurs complètent les leurs. 

Lorsque les entraîneurs « tenaient compte de l’individualité de leurs athlètes » et « respectaient les préférences des adultes en matière d’effort, de responsabilité et de rétroaction », les athlètes maîtres se sentaient proches de leur entraîneur et estimaient que les comportements de ce dernier correspondaient aux leurs. Lorsque les entraîneurs « créaient des programmes personnalisés », les athlètes maîtres se sentaient fortement engagés envers leur entraîneur (Motz et al., 2022). Les approches d’entraînement orientées vers les adultes s’intéressent également à la manière dont l’entraîneur peut créer une expérience sportive de qualité, au-delà de l’établissement de relations. En effet, lorsque les entraîneurs incarnaient ces cinq thèmes, Motz et ses collègues ont rapporté que les athlètes maîtres appréciaient davantage la participation aux pratiques et voulaient s’investir plus dans leur sport que lorsque les entraîneurs utilisaient moins ces approches (Motz et al., 2022). La recherche fondée sur des preuves suggère que l’entraîneur qui utilise des approches d’entraînement orientées vers les adultes peut être considéré comme un atout important pour attirer les adultes et maintenir leur investissement dans le sport, améliorer leur goût pour l’entraînement et maintenir leur engagement. 

Néanmoins, il n’existe pas de parcours identifié pour les entraîneurs dans le sport de niveau maître. Ceux qui entraînent le sport des maîtres sont généralement des athlètes maîtres eux-mêmes ou des entraîneurs de jeunes à qui l’on a demandé d’entraîner également le groupe des maîtres. Il est difficile pour les entraîneurs de voir l’intérêt de se développer en tant qu’entraîneurs d’adultes alors que, pour la plupart, le système n’accorde aucune valeur à ce développement. Il n’existe aucune formation d’entraîneur spécifique à un sport et très peu d’autres moyens pour les entraîneurs de développer leur métier et de devenir « qualifiés » pour entraîner des athlètes maîtres (Callary et al., 2018). 

Aller de l’avant: Bâtir un meilleur avenir pour les athlètes âgés

Grâce au travail que nous avons effectué, les organisations sportives du monde entier font de plus en plus appel à nous pour animer des ateliers et des webinaires, notamment parce que les entraîneurs de leurs organisations ont demandé ce type d’information. Ce regain d’intérêt est remarquable. Par conséquent, nous avons mis en place des programmes de formation des entraîneurs en personne et en ligne dans divers pays et dans un large éventail de sports. Lors de ces séances de développement professionnel, nous présentons les cinq approches d’entraînement orientées vers les adultes et utilisons souvent des enquêtes telles que l’AOSCS pour faire réfléchir les entraîneurs sur la manière dont ils appliquent ces approches ou comment ils pourraient le faire. 

Nous avons récemment été chargés d’animer une série d’ateliers en ligne sous forme de webinaires avec un groupe de maîtres entraîneurs issus de divers sports. Au cours de ces séances, des discussions animées ont eu lieu sur les caractéristiques d’une expérience sportive intégrale pour adultes, une expérience qui mérite d’être investie et qui génère des avantages considérables pour les participantes et participants. Nous avons exploré les caractéristiques d’une expérience sportive de qualité pour les maîtres (voir Young et al., 2021 pour une description détaillée), et les entraîneurs ont échangé entre eux sur la manière dont elles et ils abordaient ces caractéristiques, ce qui leur a permis de constituer un répertoire d’idées provenant d’autres entraîneurs de maîtres. Dans d’autres séances, nous avons invité les entraîneurs (et parfois aussi leurs athlètes) à remplir l’AOSCS et leur avons fourni leurs scores afin d’identifier leurs points forts et les domaines à développer. 

Il est important de noter que ces discussions sont toujours centrées sur le contexte de l’entraîneur, et sur la question de savoir si ces thèmes orientés vers les adultes (et les éléments spécifiques de l’enquête) sont ou pourraient être utiles pour elle ou lui. Les entraîneurs font le travail de réflexion sur la manière dont elles et ils veulent se développer. La métaphore que nous avons utilisée est la suivante : nous leur donnons les couleurs et une palette de peinture, mais elles et ils ont les pinceaux et la toile. Elles et ils peuvent choisir les couleurs, la quantité de chaque couleur et l’endroit où les mélanger pour les rendre uniques. 

En conclusion, de nombreux athlètes maîtres investissent beaucoup dans leur pratique sportive. Ils veulent que les programmes et l’encadrement soient à la hauteur de leurs investissements en temps, en énergie et en argent. Ils cesseront également de payer pour le sport s’il n’est pas bon. Reléguer le sport des maîtres à des heures d’entraînement moins idéales (comme tard le soir), les marginaliser dans l’utilisation des installations et ne pas fournir un encadrement de qualité sont des oublis très regrettables. Ne pas aider les entraîneurs à se qualifier pour travailler efficacement avec cette cohorte est une opportunité sérieusement manquée. Les entraîneurs ne savent pas ce qu’ils ne savent pas, et donc en l’absence de formation pour les entraîneurs spécifiques aux maîtres, ces opportunités d’entraînement ne sont souvent pas dans la mire. 

Pour en revenir aux étudiantes et étudiants de ma classe en tant que futurs (et actuels) dirigeants sportifs, nombre d’entre eux ont réfléchi avec enthousiasme aux possibilités de travailler avec des adultes et des personnes âgées, et de rester eux-mêmes impliqués alors qu’ils vieillissent. À cet égard, nous encourageons les dirigeants sportifs à réfléchir aux façons dont ils peuvent soutenir le développement professionnel de leurs entraîneurs dans le sport des maîtres. 

Mettre davantage l’accent sur la formation de grands entraîneurs pour travailler avec des groupes de maîtres en insistant sur les cinq approches orientées vers les adultes (en plus de donner une formation sur l’enseignement technique et tactique), est une formule gagnante. Nous exhortons les clubs et les installations à accorder une plus grande priorité aux groupes de sport des maîtres en leur donnant un accès équitable aux places d’entraînement. En effet, les systèmes sportifs prospéreront lorsque les adultes seront dûment pris en considération. 

Ressources recommandées

www.coachingmastersathletes.com — Contient un catalogue des travaux des auteurs, des infographies relatives à la pratique fondée sur les preuves, des informations sur les outils de l’AOSCS et le site du réseau de recherche Coaching Masters Athletes.  

Points saillants

Lors des Jeux d’été du Canada qui se sont déroulés à Niagara pour les athlètes de la relève en août, le pouvoir du sport de transformer des vies a été pleinement démontré par des histoires qui ont mis en évidence la joie pure, l’enthousiasme et le plaisir que le sport peut offrir. Le lutteur adolescent Eekeeluak Avalak est devenu le tout premier médaillé d’or du Nunavut aux Jeux. Un extrait vidéo émouvant est devenu viral lorsqu’il a dit dédier sa victoire à son frère décédé et expliqué comment le sport lui avait sauvé la vie.

Cet exemple de la façon dont le sport peut transformer des vies est bien loin des gros titres de l’année dernière, qui ont montré un côté plus sombre du sport. Des dizaines d’athlètes de différents sports se sont exprimés en 2022 sur les mauvais traitements subis, au cours d’une année d’activisme sportif sans précédent. Certains ont décrit un environnement toxique dans le sport et ont exigé un changement immédiat.

Avant d’en apprendre plus sur certaines des plus grandes préoccupations des athlètes, il est important d’ajouter un peu de contexte. Le sport de haut niveau, de par sa nature même, ne convient pas à tout le monde et n’est pas toujours l’activité la plus saine.

Allison Forsyth a participé à deux Jeux olympiques et a été l’une des meilleures skieuses du monde pendant près de dix ans : « Je vais chez mon chirurgien orthopédique aujourd’hui et il me dit : “Bonne nouvelle, vous avez 43 ans, mais vos genoux en ont 72 maintenant”. Nous poussons notre corps à un tel point à un jeune âge que je suis encore plus mal en point à 43 ans que si j’étais restée assise à ne rien faire toute ma vie. »

Natalie Durand-Bush est professeure de psychologie du sport, scientifique et praticienne à l’École d’activité physique de l’Université d’Ottawa. Elle est également directrice générale du Centre canadien pour la santé mentale et le sport. Lorsqu’on lui demande si le sport de haut niveau est bon pour la santé, elle répond : « Il y a certainement des inconvénients parce que vous êtes hyper concentré sur cette chose particulière dans laquelle vous êtes tellement investi. Vous travaillez au-delà de ce que les gens normaux feraient pour y parvenir. » Selon elle, il en va de même pour d’autres domaines de haute performance comme la médecine, les affaires et les arts du spectacle.

Selon Mme Durand-Bush, malgré les inconvénients potentiels, le sport offre de nombreux avantages. Il permet d’enseigner d’importantes leçons de vie sur le fait de gagner et de perdre et de faire partie d’une équipe. Les participants développent également des amitiés qui se prolongent longtemps après avoir quitté le sport. Selon Mme Durand-Bush, il est devenu tout à fait clair que nous devons mesurer le succès dans le sport d’une nouvelle manière et par bien plus que les médailles. Par exemple, le succès peut signifier considérer les athlètes comme des personnes avant tout, donner la priorité à leur bien-être mental et physique, retenir les athlètes, les entraîneurs et le personnel, et offrir des expériences positives et enrichissantes.

Pour les athlètes, c’est le podium ou l’échec

L’année dernière, de nombreux athlètes ont raconté des histoires horribles de mauvais traitements et d’abus remontant à plusieurs années. Nombreux sont ceux qui pensent que l’une des causes profondes de la crise est que le système sportif de haut niveau est trop étroitement axé sur les médailles comme marqueur de réussite, ce qui laisse parfois libre cours à des comportements toxiques. Le médaillé d’or olympique en gymnastique Kyle Shewfelt a déclaré au National Post que cela devait changer. « Je pense que le sport de haut niveau doit se regarder dans le miroir et se poser la question : “Quelle est la valeur de tout cela?” ». Il a ajouté : « Il y a une façon de créer des champions et des athlètes de haut niveau dans un environnement très positif où les athlètes ont beaucoup d’indépendance, ils ont beaucoup d’agences et nous n’utilisons pas la peur et la manipulation et ces autres tactiques pour amener les athlètes à travailler fort et à être excellents. »

Alison Forsyth affirme que les athlètes sont parfois considérés comme des marchandises. Avant les Jeux olympiques de Salt Lake City en 2002, Mme Forsyth était classée troisième au monde et portait le poids de l’équipe sur ses épaules lors de ses premiers Jeux olympiques. « Lorsque je suis allée à ces Jeux, on m’a dit que je n’irais pas aux cérémonies d’ouverture parce que j’étais un espoir de médaille. Le conseil d’administration m’a fait asseoir et m’a dit : “Tu ferais mieux d’obtenir une médaille, sinon nous n’aurons pas de financement”. » Elle ajoute : « C’est beaucoup pour quelqu’un. Vous ressentez déjà la pression de tout votre pays, de votre famille et de vous-même. Ensuite, sentir que vous avez la pression de la carrière d’autres personnes entre vos mains, c’est trop. »

Mme Forsyth a fini 7e au slalom géant de Salt Lake City après avoir souffert d’une crise de panique et n’avoir pas pu dormir la veille de sa course à cause de cette pression. C’est quelque chose qu’elle porte en elle depuis. « Si vous me demandez ce que je ressens encore maintenant à propos de ma performance olympique, je suis détruite par ma 7e place. Détruite, parce que j’étais classée troisième au monde et que je voulais gagner. Chaque athlète sait que c’est le podium ou l’échec. » 

De nombreux athlètes ont une expérience tellement négative du sport de haut niveau qu’au moment de leur retraite, ils ne veulent plus rien avoir à faire avec le sport. Mme Durand-Bush affirme que cette situation est déchirante : « Certains ont mentionné qu’ils se sentaient comme un numéro, comme s’ils étaient des marchandises pour produire des médailles pour le pays. Mais comme tout le monde, ces athlètes méritent d’être traités comme des êtres humains. » C’est pourquoi Mme Durand-Bush pense qu’il est nécessaire de revenir à une approche du sport de haut niveau plus centrée sur l’humain.

Comment créer un système où l’on place l’humain au premier plan

Tout commence par la nécessité de redéfinir le succès dans le sport. Mme Forsyth explique que, tout au long de sa carrière, elle a été malheureuse plus souvent qu’elle n’a été heureuse. Elle affirme que « si l’on soulage une partie de cette pression et que l’on soutient les athlètes, ils gagneront quand même. Je pense même qu’ils gagneront davantage. » Mme Forsyth est maintenant consultante pour des organisations sportives nationales, dont Aviron Canada, où elle tente de reconstruire une culture sportive sûre. Aviron Canada a récemment mené une étude qui a révélé que 50 % de ses participants à des compétitions de haut niveau au cours de la dernière décennie ont qualifié leur expérience de négative.

Mme Forsyth préconise d’humaniser l’expérience sportive et les organisations sportives afin de créer un respect mutuel pour tous, des administrateurs sportifs aux entraîneurs, en passant par les athlètes. Dans son esprit, cela signifie inclure les athlètes à chaque étape du processus, les traiter comme des professionnels et les inclure comme membres des conseils d’administration. Dans le cadre de son travail avec Aviron Canada, elle a encouragé l’organisme à faire du plaisir l’une de ses valeurs fondamentales et l’un de ses principaux piliers. Ce conseil lui est venu de son expérience d’entraînement pendant des mois, avec peu de pauses et pas beaucoup de plaisir : « Le fait de prendre un peu de recul par rapport au micro-environnement délirant du sport de haut niveau permet d’améliorer les résultats globaux. »

La perception est la réalité

L’un des organismes souvent critiqués par les athlètes, les entraîneurs et les administrateurs pour avoir lié le financement à la haute performance est À nous le podium (ANP). Certains ont l’impression que le financement des athlètes de haut niveau est lié uniquement à la performance, ce qui alimente une mentalité de « podiums plutôt que les personnes ».

La PDG d’ANP, Anne Merklinger, reconnaît que « la perception est la réalité ». Mais Mme Merklinger affirme qu’il n’est pas correct et que c’est une idée « erronée » de penser que si un athlète gagne une médaille, le sport est financé. Selon Mme Merklinger, ANP formule des recommandations de financement non pas en fonction des résultats passés, mais plutôt en fonction de l’avenir sur un horizon de huit ans qui prend en compte de nombreux facteurs et pas seulement la victoire.

« En tant qu’organisation, je pense que nous devons faire un meilleur travail de sensibilisation et de compréhension de ce que nous faisons », concède-t-elle. Selon Mme Merklinger, les histoires qui ont été révélées au cours de l’année écoulée ont amené tous les acteurs du système sportif à faire un examen de conscience pour voir comment améliorer les choses. « Nous entendons des circonstances horribles autour de situations où les athlètes n’ont pas été dans un environnement sûr. Chacune de ces circonstances est une de trop », dit-elle.

Depuis plus de trois ans, ANP se concentre sur l’amélioration de la culture dans le sport de haut niveau. Selon Mme Merklinger, l’organisme a fait de la « culture » une partie de son mandat, afin d’aider les organismes nationaux de sport (ONS) à atteindre l’excellence grâce à un ensemble de valeurs claires, notamment la création d’un environnement sûr et inclusif dans le programme de haute performance.

Par exemple, ANP a fourni des outils d’évaluation et de vérification de la culture pour aider les ONS à identifier les domaines dans lesquels ils peuvent avoir des difficultés et comment s’améliorer. Afin de créer une meilleure compréhension avec les athlètes, ANP a récemment créé un conseil des athlètes lié à la Commission des athlètes du Comité olympique canadien et du Comité paralympique canadien. ANP en est également aux dernières étapes de la nomination d’un athlète comme membre de son conseil d’administration.

En réponse à certains des problèmes mis en évidence dans le sport au cours de la dernière année, ANP a également introduit un nouveau plan intégré de bien-être. L’un des principes directeurs de ce plan est qu’« un recentrage ou une réorientation du système est nécessaire pour s’assurer que la santé psychologique et physique, le bien-être et la sécurité de tous les athlètes, entraîneurs, dirigeants techniques, équipes de soutien intégré et personnel de haute performance sont prioritaires dans le plan de haute performance de l’organisme national de sport. » 

Le plan de bien-être d’ANP offre des exemples de pratiques exemplaires actuelles au sein des ONS et aide les autres organismes de sport à identifier leurs lacunes. ANP embauche également des facilitateurs du bien-être culturel pour aider les ONS et les met en contact avec des experts d’organismes tels que Plan de match et le Centre canadien pour la santé mentale et le sport. Les sports peuvent utiliser le plan de bien-être d’ANP comme point de départ, mais ils doivent prouver qu’ils ont mis en œuvre des éléments du plan d’ici avril de cette année.

« Afin d’être considéré pour une recommandation de financement, le sport doit avoir développé une sorte de cadre de bien-être. Il peut être rudimentaire », explique Mme Merklinger. Elle ajoute qu’« il est essentiel de le faire démarrer. Il s’agit de donner aux ONS les outils nécessaires pour identifier ce qu’ils peuvent améliorer. Ensuite, s’ils ont des faiblesses ou des lacunes, il faut trouver les experts qui peuvent les aider. »

Le cas de Natation Canada

Après que la médaillée olympique Emily Overholt a partagé publiquement son combat contre la dépression quelques semaines seulement après son retour de Rio 2016, elle a ressenti un énorme soulagement à s’ouvrir sur la santé mentale. Cette révélation a également été l’un des principaux problèmes qui ont forcé Natation Canada à réfléchir à la façon dont elle pourrait faire de la santé mentale et du bien-être une plus grande priorité. Les dirigeants du sport voulaient offrir le soutien d’experts tout en équilibrant le besoin de confidentialité pour toute personne qui pourrait avoir accès à ces services. Maintenant, Natation Canada a un responsable de la santé mentale qui fait partie du programme.

« Nous avons toujours pris notre médecin d’équipe qui s’occupe des problèmes physiques. Mais maintenant, nous avons aussi un médecin psychiatre qui peut s’occuper de l’esprit en cas de besoin. Je pense que lorsque nous avons des experts comme ça dans l’équipe, cela envoie un message que c’est aussi important », dit John Atkinson, directeur de la haute performance de Natation Canada.

Plus récemment, Natation Canada a vu à quel point la santé mentale est importante. En décembre 2021, la vedette de natation Taylor Ruck a parlé publiquement de certains des défis qu’elle a dû relever à cause d’un trouble alimentaire dans le cadre d’une enquête du Globe and Mail, dans l’espoir que cela aide d’autres personnes. 

Selon M. Atkinson, pour de nombreux membres des équipes olympiques et paralympiques, la pandémie a fait des ravages et a obligé l’équipe à adopter de nouvelles méthodes de travail. Il a eu des conversations avec des médaillés des Jeux olympiques et des championnats du monde qui avaient besoin de faire une pause dans la compétition.  Les Jeux olympiques, retardés d’un an à Tokyo, ont entraîné un certain nombre d’événements à forte pression, notamment les essais canadiens, les championnats du monde et les Jeux du Commonwealth. Certains athlètes n’ont pas pu tout faire et, selon M. Atkinson, ce n’est pas grave.

« L’année a été difficile pour le personnel comme pour les athlètes. Tout le monde a été un peu épuisé par la pandémie. Il y a eu beaucoup de problèmes différents auxquels les gens ont dû faire face. Nous avons reconnu au début de l’année 2022 que certaines personnes allaient devoir emprunter un chemin légèrement différent de celui qui aurait été la norme. Il y a une acceptation du fait qu’il ne s’agit pas d’obtenir des résultats à tout prix », déclare M. Atkinson. Il ajoute : « Je pense que nous sommes encore en train de trouver notre voie, mais en tant que sport, nous devons avoir cette empathie. »

Dans ses centres de haute performance olympiques et paralympiques, l’équipe travaille quotidiennement avec différents psychologues du sport. Selon M. Atkinson, les entraîneurs peuvent surveiller l’humeur des athlètes et remarquer s’il y a des changements importants sur une longue période et demander l’avis d’experts pour les soutenir. Il ajoute qu’ils doivent s’assurer qu’ils communiquent le soutien disponible. En raison de la confidentialité, il arrive que le travail effectué ne soit pas bien connu.

« Nous devons nous demander si nous avons réellement communiqué sur l’existence d’un soutien dont ils ne sont peut-être même pas au courant. Et qu’il pourrait même s’agir de quelque chose auquel ils peuvent avoir accès avant d’en arriver au point où le bouton de panique est actionné », déclare M. Atkinson.

En utilisant le nouveau cadre de bien-être d’ANP, la natation a été en mesure de voir où il y a des lacunes, en particulier pour les athlètes dans le sport au-delà des membres de l’équipe nationale dans les centres de haute performance. Par exemple, il affirme que les athlètes des provinces et territoires et des clubs ne bénéficient pas des mêmes avantages parce qu’ils n’ont pas les mêmes ressources. M. Atkinson applaudit le récent investissement de 2,4 millions de dollars du gouvernement fédéral pour le soutien de la santé mentale et du bien-être. 

Le bien-être mental doit occuper une place plus centrale dans le sport de haut niveau

En ce qui concerne le sport de haut niveau, Mme Durand-Bush estime que la santé mentale et le bien-être, comme dans l’exemple de Natation Canada, devraient être au cœur des préoccupations de tous les ONS. Elle pense que c’est la meilleure façon de cultiver des cultures psychologiquement saines et sûres. Selon Mme Durand-Bush, il ne suffit pas de créer des environnements pour éviter les cas de maltraitance. Le système sportif doit créer des espaces pour que chacun puisse discuter de la santé mentale de la même manière qu’il discute de la santé physique et des blessures. « Cela ferait une énorme différence. Imaginez dire aux athlètes : “Nous voulons que vous réussissiez, mais pas au prix de votre santé mentale et physique. Nous ferons tout ce que nous pouvons pour vous protéger et vous soutenir” », dit-elle. 

Mme Durand-Bush note que la santé mentale et le bien-être peuvent varier d’un jour à l’autre et que les conversations autour de ce sujet devraient faire partie de l’environnement d’entraînement quotidien afin que les équipes puissent développer des stratégies pour y faire face. « Les athlètes ont encore peur d’en parler parce qu’ils pensent qu’ils vont être perçus négativement ou qu’ils seront punis. J’entends cela tout le temps. C’est très triste. » Mme Durand-Bush affirme qu’il n’en serait jamais ainsi avec une blessure physique : « Si vous vous faites une élongation musculaire, combien de fois l’entraîneur ou le personnel vous demanderont-ils : “Comment allez-vous aujourd’hui?”. C’est une évidence, et les athlètes n’ont aucun mal à en parler. Mais lorsqu’il s’agit de leur bien-être psychologique, ils ont peur d’y aller. » 

Selon Mme Durand-Bush, la santé mentale et le bien-être doivent être mesurés et récompensés dans le système sportif de haut niveau du Canada. « Tant que nous ne dirons pas que la santé mentale sera un indicateur de performance, une variable de performance, un élément dont nous allons parler, et que nous nous assurerons de le promouvoir et de le nourrir, nous serons très limités dans ce que nous accomplirons », dit-elle. Mme Merklinger est d’accord, jusqu’à un certain point : « Oui, cela pourrait être l’objectif final, mais nous n’y sommes pas encore. » Selon elle, les ONS ont besoin de l’aide de tous pour y arriver, y compris du Comité olympique canadien, du Comité paralympique canadien, de Plan de match et du Centre canadien pour la santé mentale et le sport.

« Nous essayons de promouvoir et d’entretenir le bien-être mental au sein des ONS. Certains font tout ce qu’ils peuvent, d’autres ne savent même pas quoi faire. Il est donc beaucoup trop tôt dans le système, à mon avis, pour dire que les sports doivent obtenir un score obligatoire dans le cadre du bien-être », déclare Mme Merklinger.

La présidente du Comité olympique canadien, Tricia Smith, qui a participé quatre fois aux Jeux olympiques, affirme que l’année 2022 a montré que les athlètes ont besoin d’avoir davantage voix au chapitre auprès de leur ONS et que le bien-être doit être une priorité à l’avenir : « Ça implique beaucoup de choses. Lorsque l’équilibre est rompu, les choses peuvent mal tourner. » Elle ajoute : « Nous nous concentrons beaucoup sur nos programmes de haute performance au Canada et sur l’obtention du podium, mais je pense que certaines personnes prennent cela à contre-pied et pensent que c’est la seule chose sur laquelle il faut se concentrer. On oublie que les athlètes sont d’abord des êtres humains. Nous devons nous assurer qu’il y a un meilleur équilibre à l’avenir. »