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Le projet « Settler Colonial Sport Venues » (Sites sportifs coloniaux) explore l’histoire de la colonisation des lieux sportifs et le rôle qu’ont joué les sites sportifs dans la colonisation et la carcéralité. Il vise à remettre en question l’idée selon laquelle la construction d’installations sportives est toujours positive, en montrant au contraire comment ces lieux ont souvent contribué à la dépossession et à l’effacement des peuples autochtones. Pour ce blogue, nous nous concentrons sur le Stade du Commonwealth d’Edmonton. En 1971, la ville s’est vu attribuer les Jeux du Commonwealth de 1978. Le stade de 56 000 places a coûté 21 millions de dollars et a été financé par trois niveaux de gouvernement. Cette analyse historique fournit un ensemble de considérations sur la façon dont les nouvelles installations patrimoniales devraient être développées à l’avenir.  

Ce projet s’ancre dans l’étude de documents historiques trouvés dans les archives de la ville d’Edmonton, des collections en ligne de Bibliothèque et Archives Canada, et des Archives provinciales de l’Alberta. Ces collections ont fourni un dossier historique stratifié d’histoires dynamiques à travers lesquelles nous avons retracé l’histoire de l’emplacement du Stade du Commonwealth pour analyser comment les relations de pouvoir ont façonné son développement.  

Principales conclusions sur le Stade du Commonwealth  

Notre analyse du Stade du Commonwealth commence au début des années 1970 à Edmonton. Les promoteurs civiques et les élites économiques ont finalement réussi à mobiliser l’idée qu’un nouveau terrain de football permettrait d’atténuer le « fléau urbain » dans les communautés ouvrières avoisinantes. C’est l’un des arguments utilisés pour obtenir le financement du stade par la ville.    

La première de nos principales conclusions a consisté à retracer la manière dont les communautés ouvrières et raciales voisines du stade ont été considérées comme superflues à la fin des années 1960. Pour comprendre cette évolution du milieu du 20e siècle, il faut tenir compte du début de la colonisation dans les années 1870. Le traité n° 6 a été signé en 1876 dans un contexte de famine et de maladie pour les nations Cries. Ce traité a fonctionné comme une forme de vol de terres alors que l’idée de propriété privée des colons était imposée dans la région d’Edmonton. La colonisation a été rendue possible par des vagues successives d’extraction de ressources. Le site du stade a fait l’objet d’une exploitation privée du charbon entre les années 1880 et 1901, et un pénitencier fédéral a fonctionné sur le site entre 1906 et 1920, tirant profit du travail forcé des prisonniers.  

Cette découverte illustre un deuxième résultat clé de cette recherche. La carcéralité, ou les logiques de contrôle, de surveillance et de criminalisation, est un élément clé du fonctionnement du colonialisme de peuplement. L’incarcération des nations autochtones dans les réserves à la fin des années 1800 était un précurseur de la présence carcérale administrée par le gouvernement fédéral dans les prairies au début des années 1900. Un siècle plus tard, le Stade du Commonwealth est utilisé depuis 2020 pendant les mois d’hiver pour abriter des sans-abri dans des conditions sur-sécurisées, semblables à celles d’un entrepôt. La population sans-abri d’Edmonton est composée de manière significative et disproportionnée d’autochtones. Depuis la Grande Dépression, le site du stade a été utilisé pour le sport professionnel. En 1930, l’ancien site de la prison a été loué à la ville pour y aménager des terrains de sports récréatifs. Le stade Clarke a été construit en 1938, alors que le football professionnel masculin s’établissait à Edmonton.   

Une troisième constatation clé est la façon dont les discours sur la « participation » ont été mobilisés pour obtenir le soutien du gouvernement à la construction de stades de sport professionnel. Dans les années 1930, les promoteurs civiques à la recherche de profits se sont appuyés sur la rhétorique classiste et eugéniste du mouvement des terrains de jeux, vantant les bienfaits moraux de l’offre de loisirs publics pour garantir la quasi-gratuité de la propriété foncière. Dans les années 1970, la Fondation des Jeux du Commonwealth a suggéré que les installations des Jeux soient cédées à un usage public abordable après les Jeux. Malgré la stratégie de promotion de la « participation », rien n’indique que le Stade du Commonwealth ait jamais été aménagé pour des activités récréatives importantes. Au contraire, le principal locataire de cette installation a toujours été les Eskimos d’Edmonton (aujourd’hui les Elks d’Edmonton) de la LCF.   

Dans les années d’après-guerre, au milieu du XXe siècle, les habitants blancs de la classe moyenne ont quitté le centre d’Edmonton pour s’installer dans une banlieue en pleine expansion. Les communautés de la classe ouvrière, diversifiées sur le plan racial, sont demeurées dans les quartiers abordables du centre de la ville. Elles sont également devenues des cibles pour les urbanistes, car les partisans de la ville ont mobilisé les discours sur la rénovation urbaine dans la période précédant la décision sur le stade.   

La quatrième et dernière conclusion de ce projet est le rôle central que le débat sur la politique des stades a joué dans ce processus d’expulsion et de dépossession. De la fin des années 1950 aux années 1970, les partisans du développement des stades (principalement les représentants du sport professionnel masculin) ont cherché à dépeindre ces quartiers et leurs habitants comme dysfonctionnels et dangereux. Cette rhétorique a contribué à convaincre les habitants d’Edmonton de financer la construction du Stade du Commonwealth. Des centaines de logements sociaux ont été détruits et des ligues communautaires ont disparu dans six quartiers centraux. Le « fléau urbain » que le développement du stade était censé améliorer a simplement été exacerbé pendant que la franchise professionnelle de la LCF d’Edmonton a pu emménager dans ses nouvelles installations ultramodernes.  

L’un des points forts de ce projet est qu’il insiste pour que la recherche sur le sport prenne au sérieux son rôle (à la fois historique et actuel) dans la dépossession (en cours) sur laquelle la nation canadienne a été fondée et continue de fonctionner. Il démontre l’importance d’historiciser les développements d’infrastructures sportives en tant que projets coloniaux.  

L’une des limites de ce type de critique structurelle est qu’il est difficile d’opérationnaliser ces types d’idées dans des situations politiques, en particulier lorsque les gouvernements exigent des objectifs d’évaluation à court terme.   

Prochaines étapes  

Les histoires populaires du sport à Edmonton ont raconté une histoire de célébration. Avec ce contre-récit, nous avons mis en lumière certains des processus violents de la colonisation et des tactiques carcérales qui y sont associées dans cette histoire du site du Stade du Commonwealth. Les Elks d’Edmonton de la LCF ont été félicités pour leur acte de réconciliation en changeant le nom de leur équipe, autrefois raciste. Cependant, cette analyse nous apprend que pour déstabiliser de manière significative le développement des infrastructures sportives, il faut passer à des étapes ultérieures qui impliquent une historicisation critique et une analyse structurelle pour aller au-delà des simples changements de surface. Pour comprendre ce qui est en jeu dans les nouvelles installations sportives, il faut poser des questions qui prennent sérieusement en compte les structures du colonialisme d’implantation, du capitalisme racial, de la suprématie blanche et de l’hétéropatriarcat.  

Remerciements pour le financement: Ce blogue s’appuie sur des recherches soutenues par le Conseil de recherches en sciences humaines et Sport Canada dans le cadre de l’Initiative de recherche sur la participation au sport.   


A propos de(s) l'auteur(s)

Judy Davidson est professeure agrégée à la Faculté de kinésiologie, de sport et de loisirs de l’Université de l’Alberta.   

Matt Ormandy est coordinateur de recherche à l’École de santé publique de l’Université de l’Alberta. 


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