Points clés:
- L’entraînement de haute intensité dans le sport d’élite augmente significativement le risque de maladie et diminue l’efficacité du système immunitaire à combattre les infections
- Des stratégies nutritionnelles tenant compte du sommeil, du stress et de la récupération et combinées à des suppléments pris avant, durant et après les séances d’exercice et les voyages aident à prévenir les infections chez les athlètes et à maintenir un système immunitaire fort et en santé
- Parmi les recommandations – isolement des athlètes malades, collaboration avec une nutritionniste pour répondre aux besoins spécifiques de l’athlète, diminution des agents de stress externes et un sommeil suffisant.
Il est bien démontré que l’exercice physique, réalisé de façon modéré, prévient de nombreuses infections et améliore grandement les fonctions du système immunitaire. À l’opposé, chez les athlètes élites s’entraînant à un rythme plus soutenu et à une intensité plus élevée, le risque de tomber malade augmente de façon marquée et réduit l’efficacité du système immunitaire à combattre les infections. D’autres facteurs incluant l’exposition à des pathogènes, les habitudes de vie, le sommeil et la récupération, la nutrition globale de l’athlète et l’aspect psychosocial sont tous à considérer en plus du volume d’entrainement et de l’intensité. Chaque épisode aigu d’effort prolongé, effectué à haute intensité provoque un stress physiologique important sur l’immunité et la défense hôte-pathogène, en plus d’avoir un effet au niveau des hormones de stress, des cytokines pro-et anti-inflammatoires et d’augmenter le stress oxydatif.
De par ces faits, de nombreux chercheurs ont examinés des stratégies nutritionnelles à mettre en place avant, pendant et après les entrainements et voyages en vue de compétitions importantes afin de mieux comprendre comment il est possible de prévenir les infections chez les athlètes et maintenir un système immunitaire fort et en santé. Voici, en bref, des solutions à intégrer pour minimer ces fâcheuses situations pouvant grandement affecter la performances de vos athlètes.
1. Alimentation et sommeil
L’aspect le plus important en terme de prévention de maladies et infections chez les athlètes passe part deux principaux facteurs qui vont de pair: l’alimentation et le sommeil. Les athlètes élites peuvent bénéficier d’un avantage lorsqu’ils portent attention à leur alimentation en s’assurant d’un apport énergétique adéquat, d’un apport en glucides et en protéines répondant à leurs besoins et d’éviter toutes restrictions qui mèneraient à une déficience en micronutriments. Il est clairement démontré qu’en répondant à leurs besoins nutritionnels, les athlètes maintiennent mieux leur fonction immunitaire. Les athlètes doivent être en mesure de consommer trois repas par jour entre-coupés de collations, au besoin et de porter attention à leur récupération après chaque entrainement afin de donner à leur corps ce dont il a besoin pour être fin prêt au prochain entrainement.
Plusieurs études ont montré des résultats significatifs entre la quantité totale de sommeil (nombre d’heures par nuit) et la qualité du sommeil (nombre de fois que se réveille la personne durant la nuit) comme effet protecteur de la prévention d’infections chez des adultes en santé. Une étude récente a montré que lors d’une exposition à un virus chez 143 adultes en santé pendant 14 jours, tous les sujets ayant une moins bonne qualité de sommeil (ceux qui se réveillaient plus souvent durant la nuit) avait 5 fois plus de risques de tomber malade par rapport à ceux qui avaient une qualité de sommeil supérieure. Il y a toutefois peu d’information entre le lien du sommeil et le taux d’infections chez les athlètes, mais il est important de mettre de l’avant ce facteur pour maximiser la récupération et la performance chez ces derniers et ainsi, réduire leur risque d’infections.
2. Glucides à l’effort et hormones de stress
Une stratégie nutritionnelle qui a montré des résultats très concluant à travers l’étude est l’apport en glucides lors d’efforts prolongés. Depuis les années 95 jusqu’à aujourd’hui, une série d’études ont montré que l’ingestion de glucides (~60g de glucides par heure) pendant un effort prolongé (> 2 heures) atténue de façon marquée l’augmentation du décompte de neutrophiles et des monocytes (globules blancs), les hormones de stress telles que le cortisol et l’épinéphrine et les cytokines telles que l’IL-6, l’IL-10 reconnues pour leur effet pro-inflammatoire. Par contre, la prise de glucides ne semble pas avoir d’effet sur la fonction immunitaire, ni sur le stress oxydatif engendré par l’effort prolongé. D’autres études se sont donc pencher sur des stratégies nutritionnelles pouvant mieux maintenir ces fonctions et s’il est possible d’ajouter quelque chose avant l’effort ou en plus des glucides consommés à l’effort.
3. Récupération après l’exercice
Il est bien démontré que suite à un effort d’endurance > 2 heures, il existe une fenêtre d’opportunité où la défence du système immunitaire envers les pathogènes est réduite, augmentant ainsi de façon marquée le risque d’infections. Cette période peut durer de 3 à 72 heures suivant un effort prolongé et intense. Des études menées auprès de marathoniens et athlète d’ultraendurance ont montré que ces athlètes présentaient plus d’IVRS (infections des voies respiratoires supérieures) suite à leur événement d’endurance que des athlètes s’entrainant sur de distances plus courtes et moins longtemps. Il est recommandé de manger dans un délai de 30 minutes suivant un effort physique d’une bonne intensité afin de refaire adéquatement les réserves énergétiques (glycogène) et réparer les fibres musculaires brisées lors de l’exercice. Cette durée post-entrainement permet de maximiser l’absorption des nutriments mais aussi de saisir l’opportunité métabolique et hormonales suite à un effort. Le corps est prêt ! Si l’athlète attend trop longtemps avant de manger (1 heure et plus) sa récupération est compromise et il augmente ses chances, à long terme, d’attraper régulièrement des infections.
4. Des suppléments pour diminuer les infections des voies respiratoires
Il y a de plus en plus d’évidence que certaines suppléments peuvent apporter un grand coup de main. Des suppléments tels que les flavonoïdes, la quercetine et certaines souches de probiotiques (Lactobacillus) peuvent augmenter certains aspects de la fonction immunitaire et ainsi, réduire le taux d’incidence de maladies chez les athlètes et ceux qui disposent d’un système immunitaire plus fragile. Des données limitées, contradictoires ou insuffisantes limitent l’intérêt de suppléments tels que les oméga-3, B-glucans, le colostrum bovin, le ginseng, l’échinacée ou encore, l’utilisation de grandes doses de certaines vitamines, comme la vitamine C et la vitamine E. Il n’y a également pas assez d’évidence que la glutamine et les acides aminés aident en quelque sorte la prévention d’infections. Le corps dispose d’un large bassin de stockage de ces nutriments et les études démontrent que l’exercice seul ne peut réduire de manière significative ces réserves.
Une récente hypothèse se propage au fil des dernières études. Étant donné que le système immunitaire est si complexe et diversifié, l’approche devrait plutôt se faire à l’aide d’une combinaison de suppléments plutôt que de les étudier seuls. Il est stipulé que de grandes doses d’un seul supplément ne sera peut-être pas aussi efficace qu’une stratégie type cocktail et la combinaison de plusieurs suppléments ensemble.
Le tableau ci-dessous représente une revue de l’ensemble des études disponibles sur l’usage de suppléments pouvant jouer un rôle sur l’immunité des athlètes ainsi que les recommandations quand à leur utilisation.
Supplément immunonutritionnel | Description et observation | Recommandation basée sur les évidences actuelles |
Glucides | Maintenir les niveaux sanguins de glucose durant l’exercice, diminuer la libération d’hormones de stress, limite les changements immunitaire négatifs suite à l’effort. | Recommendé: jusqu’à 60g par heure d’effort prolongé et de haute intensité aident à diminuer la réponse inflammatoire de l’exercice mais n’apporte pas d’effort sur la dysfonction immunitaire. |
Extraits de fruits et légumes riches en polyphénols et flavonoïdes. | Agissent en tant que substitut de l’ibuprofen en atténuant l’inflammation engendrée par l’exercice. Réduisent également le stress oxidatif. | Recommendé: La plupart des études se sont attardées au stress oxidatif. |
Quercetine (particulièrement de forme iso-quercetine) | Des études in vitro montrent de puissants effets anti-inflammatoires, anti-oxidatif et anti-pathogénique. Dans les études faites chez l’animal, elle améliore l’endurance et réduit l’incidence d’infections. | Recommendé: surtout lorsque combinée à d’autres flavonoides et nutriments. Les études faites chez l’humain montrent une forte réduction du taux d’infections lors d’efforts prolongés de haute intensité. La quercetine aurait un effet anti-inflammatoire et anti-oxidatif lorsque combinée avec de l’extrait de thé vert et les huiles de poisson. |
Probiotiques | Améliorer la flore bactérienne intestinale et ainsi, amélioré la fonction immunitaire de l’intestin et prévenir le passage en circulation sanguine d’agents pathogènes. | Résultats mixtes, associés à une grande variabilité du microbiote humain. Les souches Lactobacillus ont démontré des effets potentiels sur la réduction des infections. |
Colostrum bovin | Mélange de facteurs immunitaires et hormonaux qui améliorent la fonction immunitaire et diminue le risque d’infections. | Résultats mixtes, plus de données sont nécessaires avant de le recommander. |
β-glucan | Les récepteurs que l’on retrouve dans la barrière intestinale en lien avec les cellules immunitaires interagissent avec les β -glucan améliorant l’immunité innée | Résultats mixtes, le β-glucan de certains types de champignons donnent des résultats concluant (vs l’avoine) mais plus de données sont nécessaires avant de le recommander. |
Vitamine E | Réduit les molécules de radicaux libres suite à l’effort et augmente l’immunité. | Non recommandé: semble avoir des effets pro-oxidatif et pro-inflammatoire |
Vitamine C | Réduit les molécules de radicaux libres suite à l’effort et augmente l’immunité. | Non recommandé: les études révèle qu’elle ne serait pas différente d’un placebo |
Multivitamines : Vitamines et minéraux | Réduit les molécules de radicaux libres suite à l’effort et augmente l’immunité. | Non recommandé pas différent d’un placebo: une alimentation équilibrée est suffisante. |
Glutamine | Source d’énergie importante des cellules immunitaires qui s’épuise lors d’effort prolongé | Non recommandé: le corps dispose de suffisamment de de glutamine pour contrer les effets de l’exercice. |
Acides aminés à chaîne ramifiée (BCAA) | AACRs (valine, isoleucine et leucine) sont les acides aminés le plus impliqués au niveau de la synthèse protéique. | Non recommandé: résultats inconcluants, plus de données nécessaires sur l’efficacité sur l’immunité |
Acides gras polyinsaturés Oméga-3 (huiles de poisson) | Effets anti-inflammatoires et régulateur de l’immunité suite à l’exercice | Non recommandé: pas différent d’un placebo. Intéressant de le mélanger |
Herbes naturelles (ex., Ginseng, Échinacée) | Contiennent des molécules bioactives qui augmentent l’immunité et diminuent le risque d’infection | Non recommandé: les études faites chez l’humain ne sont pas en lien avec les besoins des athlètes |
Adapté et traduit de Walsh et al. 2011
Les effets physiologiques de certains polyphénols tels que la quercetine, EGCG (extrait de thé vert), le curcuma, le lycopène et le resveratrol démontrent beaucoup d’intérêts de la part d’immunologistes de l’exercice à cause de leur effet anti-oxidatif, anti-inflammatoire, anti-pathogène, cardioprotecteur, anti-cancérigène. Plusieurs études récentes de supplémentation en quercetine chez l’humain ont été réalisé afin de déterminer son mécanisme d’action sur l’inflammation post-exercice, le stress oxidatif, la dysfunction immunitaire, sa capacité d’améliorer l’endurance et de réduire l’incidence des infections suite à un stress physique. Lorsque la quercetine est combinée à d’autres polyphénols et nutriments tels que l’extrait de thé vert, l’iso-quercetine et les huiles de poisson, on note alors une réduction significative de l’inflammation induite par l’exercice et du stress oxidatif occasionné par l’effort. De plus, une amélioration des fonctions innées du système immunitaire, soit la capacité de se défendre et de se protéger des pathogène, sont largement augmentées. Une supplémentation en quercetine (1000 mg/jour pendant 2 à 3 semaines) réduit également le taux d’infections chez des athlètes soumis à un stress physique important. La quercetine dispose de plusieurs effets bioactifs et est le polyphénol le plus absorbé au niveau de l’intestin, il reste encore toutefois à déterminer la dose optimale auprès de la population athlète ainsi que le cocktail optimal dont ces derniers pourraient grandement bénéficier tant au niveau des périodes d’entrainements intense, des voyages, des compétitions que de leur récupération.
5. Des stratégies pour les voyages
Comme le proverbe le dit: Mieux vaut prévenir que guérir. Alors qu’il n’y a pas de méthode exacte pour éliminer complètement le risque d’attraper un rhume, ou quelconque infection, il y a différentes stratégies touchant le style de vie et la nutrition que chaque athlète peut implanter au quotidien, lors de périodes d’entrainements plus difficiles et lors de voyages. Les recommandations suivantes sont proposées par le groupe d’experts BASES afin de diminuer l’immuno-suppression rencontrée lors d’efforts prolongés de haute intensité et de réduire les risques d’infections.
- Tous les athlètes, entraineurs, intervenants de l’équipe de support devraient s’assurer d’avoir tous leurs vaccins à jour ainsi que pour les voyages. Le vaccin de la grippe devrait être donner à chaque année.
- Minimiser les contacts avec les personnes infectées, les jeunes enfants, les animals.
- Garder une distance des personnes qui toussent, éternuent ou le nez qui coule. Lorsque possible et approprié, exigez que ces personnes portent un masque jetable.
- Lavez les mains régulièrement: avant les repas, après avoir touché des objets appartenant à des personnes contagieuses, les animals, du sang, des sécrétions, les endroits publics, les toilettes, le transport en commun, etc.
- Tentez le mieux que possible de ne pas se mettre les doigts dans le visage ou la bouche. Trainez du gel pour se laver les mains à base d’alcool (ex. Purell)
- Ne partagez jamais de bouteille d’eau, tasses, serviettes, etc. avec vos proches ou entre athlètes.
- Lors de déplacements et de voyages, choisissez des breuvages froids de bouteilles sellées, évitez les légumes crus, ne consommez que des fruits que vous pouvez peler et éviter les viandes pas assez cuites.
- Isolez rapidement des autres les athlètes et individus qui présentent des symptômes d’infections des voies respiratoires supérieures (toux profonde, nez qui coule, éternuements, sécrétions, congestion nasale, etc.)
- Protégez les voies respiratoires d’être exposées à de l’air très froid ou très sec lors d’efforts éprouvants en portant un masque. L’usage d’un nébulisateur lors d’efforts répétés dans un environnement froid est aussi fortement recommandé.
- S’assurer d’un apport adéquat en énergie, protéines et micronutriments essentiels en travaillant avec une nutritionniste, qui saura conseiller les athlètes sur leurs besoins spécifiques.
- Évitez les régimes drastiques et la perte de poids rapide. Pour les sports de catégories de poids, assurez-vous d’un suivi auprès d’une nutritionniste pour les athlètes qui présentent plus de difficultés à faire le poids. Assurez-vous que cette catégorie de poids convient bien à la santé de l’athlète.
- Assurez-vous d’un apport en glucides adéquat avant et durant les efforts prolongés de forte intensité pour limiter la durée et la sévérité de l’immuno-dépression suite à ce type d’efforts. L’ingestion de 30-60g de glucides par heure durant des efforts prolongés a montré une réduction significative des hormones de stress et de la réponse des cytokines anti-inflammatoires durant l’effort. En minimisant ces effets, les risques d’infections sont moindres.
- L’efficacité de certains suppléments dits «immunostimulants» n’ont pas été confirmé (ex. Cold Fx, échinacée, etc.) Toutefois, il a suffisamment d’évidence dans la littérature que certains flavonoïdes (ex. quercetine) et les probiotiques de souches Lactobacillus peuvent réduire l’incidence des IVRS (infections des voies respiratoires supérieures) chez des individus actifs physiquement. L’ingestion quotidienne de probiotiques pourrait également réduire le risque d’infections gastrointestinales. Il est recommandé de débuter une supplémentation au moins une semaine avant un départ en voyage, de continuer pendant la durée du voyage et de continuer au retour. Des doses de 10 milliards de bactéries sont recommandées et doivent être ajuster en fonction de la tolérance individuelle.
- Portez des vêtements appropriés en fonction des saisons et de la température environnante et extérieure. Tentez de ne pas avoir froid et de rester dans des vêtements mouillés suite à l’effort.
- Dormez suffisamment (au moins 7 heures par nuit est recommandé). Si le sommeil n’est pas toujours adéquat, considérez surveillez et notez la quantité et qualité de sommeil à l’aide de méthode non-invasive tels que des capteurs de mouvements ou certaines applications iPhone permettent de mesurer de façon intéressante le sommeil.
- Gardez tous les autres stress à un minimum. Consultez avec un psychologue sportif ou un préparateur mental peuvent grandement aider à trouver des stratégies et solutions pour réduire ce stress et modifier certains comportement et trouver de meilleures adaptations.