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L’une des plus grandes réussites des Jeux olympiques d’hiver de 2018 a été le succès de l’équipe norvégienne, qui a remporté 39 médailles (7,33 médailles par million d’habitants), comparativement à la troisième place du Canada avec 29 médailles (0,81 médaille par million d’habitants). Dans les vestiaires des équipes et dans les médias, tout le monde se demandait comment un si petit pays a pu produire une performance aussi dominante aux Jeux olympiques.

Bien que de nombreuses raisons expliquent le succès de la Norvège, une entrevue avec Tore Øvrebø, directeur du sport d’élite pour les Olympiatoppen, une organisation de scientifiques, d’entraîneurs et de nutritionnistes qui travaille avec les athlètes olympiques des fédérations sportives de Norvège, a attiré l’attention sur les différences importantes dans la façon dont le sport et l’activité physique sont pratiqués en Norvège par rapport aux autres pays olympiques. Il décrit une philosophie de participation qui se concentre sur les résultats en matière de développement.

Le sport devrait être un programme de développement humain. Les athlètes doivent acquérir des aptitudes sociales et apprendre à suivre des instructions et à réfléchir par eux-mêmes. Ils doivent apprendre les règles; apprendre pourquoi on fait des choses en équipe. Il y a donc un système de valeurs qui passe par l’[activité] et qui vise en fait à développer les gens. C’est l’objectif principal du sport : développer les gens.

Cela dit, la notion de « gagner à tout prix » s’est répandue dans le sport chez les jeunes au Canada, dégradant la qualité de l’expérience sportive et entraînant une diminution de la participation (Brenner, 2016) et une augmentation des blessures (Jayanthi et coll., 2013). On oublie grandement le développement des habiletés psychologiques, cognitives, sociales et émotionnelles, qui sont pourtant des ingrédients essentiels à la réussite des athlètes de haut niveau, particulièrement pour les athlètes en développement (Bailey, 2012). Les facteurs qui différencient les « super champions » des autres comprennent l’engagement, la réaction au défi, la réflexion et la récompense, ainsi que le rôle des entraîneurs et des personnes importantes (Collins et coll., 2016).

Le présent article vise à susciter une réflexion et un dialogue sur les façons dont nous développons nos jeunes athlètes, particulièrement dans les trois premières étapes du parcours de développement à long terme de l’athlète canadien (enfant actif, s’amuser grâce au sport, et apprendre à s’entraîner). C’est au cours de ces étapes que le sport peut jouer un rôle dans le développement des fonctions essentielles des athlètes et de leur capacité d’apprentissage social et émotionnel – les bases du développement humain. Un sport de qualité peut offrir à nos jeunes athlètes des milieux et des occasions d’apprentissage exceptionnels, mais cela exige une planification et une prestation délibérées. Dans un esprit d’amélioration continue, cet article vise également à favoriser des discussions et des relations dans l’ensemble du système sportif, en particulier les écoles, qui apportent une contribution extraordinaire au développement de nos jeunes.

Les fonctions essentielles : les fondements de la réussite

La réussite scolaire et professionnelle exige créativité, flexibilité, maîtrise de soi et discipline (Diamond, 2016). Derrière ces attributs se cachent des fonctions essentielles : une série de processus mentaux qui nous permettent de planifier, de concentrer notre attention, de nous souvenir d’instructions ou de règles, de voir les choses sous un autre angle, de réagir à des circonstances nouvelles ou imprévisibles et de mener à bien de multiples tâches (Diamond, 2013).

Les parties du cerveau qui développent ces fonctions essentielles sont souvent comparées à un système de contrôle de trafic aérien. Les aéroports achalandés doivent gérer en toute sécurité les arrivées et les départs de nombreux avions qui utilisent plusieurs pistes en même temps. De même, notre cerveau doit fonctionner comme une tour de contrôle de trafic aérien pour identifier et gérer les distractions, établir les priorités des tâches, et fixer et atteindre des objectifs tout en contrôlant les paroles et les actions impulsives (Center on the Developing Child, Université Harvard).

Les fonctions essentielles sont très interdépendantes, et pour bien les appliquer dans des situations réelles, les opérations effectuées doivent être bien organisées les unes avec les autres. Il est généralement reconnu qu’il existe trois fonctions essentielles :

  • La mémoire de travail régit notre capacité de conserver et de manipuler des éléments d’information distincts sur de courtes périodes de temps.
  • La flexibilité mentale nous aide à maintenir ou à rediriger l’attention en réponse à diverses demandes ou à appliquer des règles différentes dans des contextes variés.
  • La maîtrise de soi nous permet d’établir des priorités et de résister aux actions ou aux réactions impulsives. (CDC, Université Harvard)
Comment les fonctions essentielles sont-elles développées?

Les enfants ne naissent pas avec ces compétences. La figure ci-dessous montre les résultats de tests mesurant les différentes fonctions essentielles. Celles-ci commencent à se développer peu après la naissance, avec une période de développement importante entre l’âge de trois et cinq ans. Le développement se poursuit tout au long de l’adolescence jusqu’au début de l’âge adulte. (CDC, Université Harvard)

Les parents, les tuteurs et les autres adultes responsables d’enfants sont collectivement chargés d’assurer des « environnements propices à la croissance » pour permettre aux enfants de pratiquer et de développer ces compétences là où ils vivent, apprennent et jouent.

Les adultes peuvent faciliter le développement des fonctions essentielles d’un enfant en établissant des routines, en modelant le comportement social et en créant et en maintenant des relations de soutien et fiables. Il est également important pour les enfants d’exercer leurs compétences de développement par l’entremise d’activités qui favorisent le jeu créatif et les liens sociaux, qui leur apprennent à faire face au stress, qui impliquent de l’exercice actif et qui, avec le temps, leur donnent l’occasion de diriger leurs propres actions avec une supervision adulte décroissante. (CDC, Université Harvard)

Développer les fonctions essentielles grâce au sport et à l’activité physique

Diamond (2015) examine les effets de l’exercice physique sur les fonctions essentielles et identifie les meilleurs types d’activités qui ont un effet positif. Il s’agit notamment d’exercices stimulants sur le plan cognitif, d’activités nécessitant une coordination des deux mains et une coordination œil-mains (p. ex. le cirque social), et d’activités qui exigent de traverser fréquemment la ligne médiane et/ou des mouvements rythmiques, comme la danse ou le tambour, surtout lorsque d’autres personnes sont impliquées. Nos connaissances sur les mécanismes qui sous-tendent l’amélioration des fonctions essentielles s’approfondissent et comprennent des changements structurels et fonctionnels dans des régions spécifiques du cerveau (Cotman et coll., 2007). Bien que notre compréhension du sujet progresse, Diamond (2015) mentionne aussi que les fonctions essentielles s’améliorent avec des activités promouvant la condition physique, mais aussi celles qui « (a) entraînent et mettent au défi diverses habiletés motrices et les capacités liées aux fonctions essentielles; (b) apportent joie, fierté et confiance en soi; et (c) fournissent un sentiment d’appartenance sociale (p. ex. l’appartenance à un groupe ou une équipe) ».

Apprentissage social et émotionnel : s’appuyer sur les fondements des fonctions essentielles

L’établissement d’une base de fonctions essentielles assure le développement ultérieur de compétences d’apprentissage social et émotionnel (Diamond, 2013). Il s’agit notamment de la conscience de soi, de l’autogestion, de la prise de décisions responsable, d’aptitudes relationnelles et de la conscience sociale (voir le le tableau ci-dessous).

L’apprentissage social et émotionnel est le processus par lequel les enfants et les adultes acquièrent et appliquent efficacement les connaissances, les comportements et les compétences nécessaires pour comprendre et gérer les émotions, fixer et atteindre des objectifs positifs, ressentir et montrer de l’empathie pour les autres, établir et maintenir des relations positives, et prendre des décisions responsables.

Les interventions du programme sont-elles efficaces ?

Depuis le milieu des années 1990, la Collaborative for Academic, Social, and Emotional Learning (CASEL) utilise la recherche, la pratique et les politiques pour faire de l’apprentissage social et émotionnel (ASE) fondé sur des preuves une partie intégrante de l’éducation, du niveau préscolaire au secondaire. Ces programmes ont été mis à l’essai à la fois en milieu scolaire et à l’extérieur.

Les recherches ont permis de constater que lorsque le programme est mis en œuvre dans tout le système, on voit des améliorations statistiquement significatives des capacités cognitives, de la cohésion sociale et de l’agilité émotionnelle (Durlak et coll., 2011).  Des études récentes ont démontré des effets positifs durables sur la prise de décisions intelligente, l’établissement de relations saines et l’établissement d’objectifs, tout en apprenant à appliquer ces compétences à d’autres aspects de la vie (Taylor et coll., 2017).

Pour avoir un effet durable, la CASEL a élaboré trois stratégies interconnectées sur lesquelles on doit se pencher :

  1. Renforcer les compétences et les habiletés des élèves par une approche intentionnelle. Cela devrait inclure des leçons autonomes conçues pour améliorer les compétences sociales et émotionnelles des élèves et l’utilisation de pratiques d’enseignement qui favorisent l’ASE, comme l’apprentissage coopératif et l’apprentissage par projet.
  2. Concevoir un environnement dans lequel tous les élèves s’épanouissent. Nous savons que l’environnement dans lequel les élèves apprennent influence leur développement social et émotionnel, leur croissance et leur réussite. Il est donc nécessaire de créer un sentiment d’appartenance dans des lieux sûrs, accompagné d’une solide relation enseignant-élève.
  3. Utiliser des stratégies organisationnelles pour créer un climat et une culture propices à l’ASE et qui développent et soutiennent la capacité des enseignants à promouvoir l’ASE.
Développer les fonctions essentielles et l’ASE par l’entremise du sport

Bien qu’une grande partie du travail sur les fonctions essentielles et l’ASE ait été menée par le secteur de l’éducation, nous pourrions facilement remplacer « étudiant » par « athlète » et « enseignant » par « entraîneur » et examiner les possibilités de programmes de loisirs communautaires et de clubs sportifs.

La plupart des entraîneurs conviendraient que les athlètes qui font preuve d’autogestion, de respect de soi, de respect des autres, d’effort, de prise de décisions et d’établissement d’objectifs présentent des atouts favorables dans une perspective sportive de compétition. Les programmes qui valorisent ces éléments auraient plus de chance que leurs athlètes pratiquent leur sport et restent dans le programme probablement longtemps. Les entraîneurs sont des facilitateurs essentiels pour donner mettre en pratique ces attributs dans le sport et peuvent fournir des liens clairs avec d’autres aspects de la vie de l’athlète. « L’entraîneur doit vraiment valoriser les principes du respect des joueurs en leur donnant les moyens d’avoir une voix et en mettant l’accent sur le respect des autres et la capacité de travailler de façon indépendante et de faire des efforts, peu importe le public. » (Balague et Fink, 2016). La mise en œuvre efficace de cette approche nécessite de « donner la priorité à l’athlète et non aux victoires et aux défaites, de mettre l’accent sur les relations, d’adopter une approche globale du développement des athlètes et de comprendre que le modèle est une “façon d’être”, et non seulement un ensemble de techniques à suivre (Balague et Fink, 2016) ».

Il existe de nombreuses façons d’intégrer cette approche dans l’environnement sportif. Voici un processus recommandé :

  1. Tenir une discussion pré-saison avec les athlètes sur le type de culture que l’équipe souhaite créer. Voici quelques questions pour orienter cette discussion : « Quels sont les éléments qui nous définissent? Comment voulons-nous être vus par les autres? » Cela peut aussi inclure des objectifs de saison individuels et pour toute l’équipe.
  2. Permettre à l’équipe de créer ses propres moyens de se rassembler et de décider des conséquences pour les joueurs qui ne respectent pas les normes convenues.
  3. Tenir une discussion de sensibilisation avant chaque séance d’entraînement afin d’identifier les objectifs personnels et de groupe qui ciblent les composantes de l’ASE. Par exemple, l’accent pourrait être mis sur les aptitudes relationnelles. Pendant la discussion de sensibilisation, on peut demander aux athlètes de décrire à quoi ressemblent ces aptitudes dans les situations sportives et non sportives. Cela aide à établir le sentiment d’appartenance et la responsabilisation lors de la séance.
  4. À la fin de chaque séance d’entraînement, effectuer un retour rapide avec les joueurs pour réfléchir à leurs contributions et à ce que cela pourrait donner dans d’autres sphères de leur vie. Les athlètes peuvent cibler comment ils ont géré les aptitudes ciblées au point 3 durant la séance d’entraînement, ce qu’ils ont fait ou dit pour promouvoir l’établissement de relations ou ce qu’ils pourraient faire différemment la prochaine fois.
  5. Bien que les entraîneurs facilitent les éléments précédents, ils doivent honorer et respecter la voix des athlètes en appuyant leurs choix. Par exemple, pendant l’entraînement, l’entraîneur doit intégrer les idées des athlètes soulevées lors de la discussion de sensibilisation au début de la séance.
L’avenir est prometteur

 Le système sportif pour les jeunes doit trouver des moyens de garder les enfants et les adolescents engagés dans le sport. En faisant du sport un choix plus inclusif et attrayant, plus de jeunes seront attirés et continueront d’y prendre part. De nombreux entraîneurs reconnaissent l’importance de l’ensemble des habiletés sociales et émotionnelles d’un athlète, mais ils ne savent pas comment développer, entraîner et faire progresser ces habiletés dans leur milieu d’entraînement. La mise en œuvre de la plupart des nouvelles idées est difficile, mais elle peut commencer par des dialogues et l’apprentissage de cette approche. Les récents travaux de Jean Côté dans le domaine du leadership transformationnel (Turnnidge, 2017) offrent d’excellentes occasions d’examiner des façons d’aider les entraîneurs à offrir des expériences sportives de qualité à leurs athlètes. En mettant l’accent sur le développement des fonctions essentielles et de l’ASE au cours des premières années de la vie sportive d’un jeune, on peut créer un environnement plus propice à son développement et accroître les capacités et l’expertise de notre bassin d’athlètes canadiens.

Ressources recommandées

Vidéo

Visionnez cette vidéo de six minutes d’Edutopia pour avoir un aperçu des cinq clés du succès de l’apprentissage social et émotionnel. Lorsque vous regarderez la vidéo, pensez aux façons que cette approche pourrait améliorer votre environnement sportif pour vos athlètes, les parents et les entraîneurs.

Sites Web éducatifs

Center on the Developing Child (Université Harvard)

Collaborative for Academic, Social, and Emotional Learning (CASEL)


A propos de(s) l'auteur(s)

Vicki Harber est professeure émérite à la Faculté de kinésiologie, de sport et de loisirs de l’Université de l’Alberta. Elle contribue à Au Canada, le sport c’est pour la vie en faisant progresser le savoir-faire physique, le développement à long terme des athlètes et le sport de qualité partout au Canada. En 2011 et 2012, Mme Harber a été honorée par l’Association canadienne pour l’avancement des femmes, du sport et de l’activité physique comme l’une des femmes les plus influentes dans le sport et l’activité physique. L’expérience qu’elle a acquise au sein de deux équipes olympiques d’aviron combinée à son parcours universitaire sous-tend son désir d’établir des liens efficaces entre le sport de haut niveau et la littérature scientifique.

Références

Bailey, R. (2012). What is Developmentally Appropriate Sport? Active & Healthy Magazine 19(2):21 à 24.

Balague, G. et Fink, C. (2016). Teaching Personal and Social Responsibility in competitive sport. Active & Healthy 23:51 à 54.

Brenner, J. S. (2016). Sports specialization and intensive training in young athletes. Pediatrics 138(3), e20162148. doi:10.1542/peds.2016-2148

Center on the Developing Child à l’Université Harvard: https://developingchild.harvard.edu/.

Collaborative for Academic, Social, and Emotional Learning (CASEL): https://casel.org/.

Collins, D., Macnamara, A. et McCarthy, N. (2016). Super champions, champions, and almosts: Important differences and commonalities on the rocky road. Frontiers in Psychology, 6, 2009. doi:10.3389/fpsyg.2015.02009 [doi].

Cotman, CW., Berchtold, NC. Et Christie. LA. (2007). Exercise builds brain health: key roles of growth factor cascades and inflammation. Trends in Neurosciences 3:464 à 472.

Diamond, A. (2013). Executive functions. Annual Review of Psychology, 64(1), 135 à 168.

Diamond, A. (2015). Effects of physical exercise on executive functions: Going beyond simply moving to moving with thought. Annals of Sports Medicine and Research, 2(2), 1011 à 1015.

Diamond, A. (2016). Executive Function in Preschool-Age Children: lntegrating Measurement, Neurodevelopment and Translational Research, J. A. Griffin, P. McCardle et L. S. Freund (éditeurs) American Psychological Association.

Durlak, JA., Weissberg, RP., Dymnicki, AB, Taylor, RD. et Schellinger, KB. (2011). The impact of enhancing students’ social and emotional learning: a meta-analysis of school-based interventions. Child Development 82(1):405 à 432.

Jayanthi, N., Pinkham, C., Dugas, L., Patrick, B. et LaBella, C. (2013) Sports specialization in young athletes. Sports Health: A Multidisciplinary Approach, 5(3), 251 à257. doi:10.1177/1941738112464626

Taylor, RD., Oberle, E., Durlak, JA. et Weissberg, RP. (2017) Promoting positive youth development through school-based social and emotional learning interventions: a meta-analysis of follow-up effects.  Child Development 88(4):1156 à 1171.

Turnnidge J. et Côté, J. (2017) Transformational Coaching Workshop: Applying a Person-Centred Approach to Coach Development Programs. International Sport Coaching Journal 4:314  à 325.


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