Bien que la société mondiale dans laquelle nous vivons soit assoiffée de connaissances, nous ne pourrons jamais connaître tout ce que nous devons savoir pour réussir – une réalité que la pandémie a mise en évidence. Les dirigeants sportifs ont besoin d’une méthode agile, capable de rassembler de l’information provenant de nombreuses sources et qui encourage les nouvelles pensées et l’innovation pour relever des défis toujours nouveaux. De plus en plus souvent, les dirigeants sportifs s’engagent dans des espaces d’apprentissage social (EAS) sans le savoir, et sans savoir explicitement comment rendre ces interactions les plus efficaces possible. En réponse à cette situation, le présent article vise à contribuer à la connaissance des EAS – un outil innovant visant à aider les dirigeants sportifs à s’attaquer plus efficacement aux problèmes clés d’aujourd’hui et de demain.
Qu’est-ce qu’un espace d’apprentissage social?
Pour bien des gens, le terme « espace d’apprentissage social » est moins connu que le concept semblable de « communauté de pratique » (Wenger, 1998). Les deux concepts sont ancrés dans la théorie de l’apprentissage social et reposent sur trois hypothèses de base :
- les humains sont fondamentalement des êtres sociaux;
- l’apprentissage est au cœur de notre existence;
- au fur et à mesure que nous apprenons, nous devenons.
Comprendre l’apprentissage de cette manière signifie qu’à mesure que nous apprenons en interagissant avec les autres et le monde, nous développons notre identité; la personne que nous sommes à tout moment est la somme de toutes nos expériences précédentes (Jarvis, 2006).
Une communauté de pratique efficace est une forme d’EAS. D’autres formes comprennent les conversations individuelles ou le mentorat, les conférences ou les ateliers, et les réseaux en ligne de centaines de personnes. Les EAS sont un mécanisme d’apprentissage et de changement qui permet aux participants de créer des connaissances et de formuler de nouvelles façons de faire les choses qui leur tiennent à cœur. Cette action est notre pratique et peut se référer à n’importe quelle chose, de l’entraînement d’un groupe spécifique d’athlètes au développement de leaders sportifs, en passant par la promotion de la justice sociale au sein d’une organisation. Les EAS ne sont pas définis par la zone physique, mais par les relations sociales des participants ainsi que par la compréhension mutuelle qu’ils peuvent apprendre ensemble (Wenger-Trayner et Wenger-Trayner, 2020). Les trois caractéristiques importantes d’un EAS, qui le rendent différent de la participation à d’autres lieux d’interaction, sont que les participants :
- ont le souci de faire une différence relativement à un élément précis;
- s’engagent dans l’incertitude;
- portent attention aux données.
Il est nécessaire vouloir faire une différence (c’est-à-dire avoir la passion d’apprendre et d’apporter des changements), mais cela n’est pas suffisant pour créer un EAS. Ce qui distingue un EAS des autres groupes où les gens se réunissent et discutent d’une passion, par exemple un groupe de lecture, c’est que les autres participants apprécient, et même accueillent, l’incertitude découlant de la « tension entre le souci de faire une différence et le fait d’avoir un chemin clair pour y parvenir » (Wenger-Trayner et Wenger-Trayner, 2020, p. 21); et qu’ils s’engagent à travailler ensemble pour résoudre les problèmes clés, tout en prêtant attention aux effets de tout changement apporté à la pratique.
Cet article s’appuie sur notre travail avec les EAS depuis 2000 par l’intermédiaire de notre laboratoire, le Groupe de recherche pour le développement des entraîneurs de l’Université d’Ottawa. Ce travail comprend au moins sept projets avec dix organisations hôtes (par exemple, des clubs locaux et des organisations provinciales et nationales) qui ont réuni des entraîneurs et des administrateurs de sport pour s’engager dans des cycles de réflexion collective et individuelle. Ces cycles sont entrecoupés par l’application de nouvelles façons de faire dans la pratique, le tout dans le but de promouvoir l’apprentissage qui vise à faire une différence pour un élément donné.
Exemples de résultats obtenus grâce aux EAS auxquels nous avons participé :
Personnel | Groupe | Organisation |
Des entraîneuses ont compris qu’elles pouvaient continuer à entraîner et devenir des mères | Changements majeurs de perspective, comme les entraîneuses qui partagent leurs connaissances plutôt que les garder | Augmentation du nombre d’entraîneuses, de formatrices d’entraîneuses et d’arbitres recrutées et formées |
Crédits de développement professionnel pour la formation des entraîneurs | Compréhension commune des termes techniques et des nouvelles technologies | Meilleure harmonisation entre les normes de haute performance et les programmes de développement |
Espaces d’apprentissage social et création de valeur
La création de valeur dans les EAS est un processus plutôt qu’un objectif final. Lorsque les participants d’un EAS estiment que leur participation les aide à faire la différence qu’ils souhaitent faire, ils y voient une valeur (Wenger-Trayner et Wenger-Trayner, 2020). Dans les EAS auxquels nous participons, nous utilisons le Cadre de création de valeur que nous proposons pour guider la façon dont nous générons de la valeur, dont nous traduisons cette valeur en faisant quelque chose avec elle, dont nous fixons nos espoirs et nos attentes vis-à-vis un EAS et dont nous évaluons si la valeur fait une différence. Le Cadre propose huit cycles de valeur décrits dans le tableau 2, soit immédiate, potentielle, appliquée, réalisée, habilitante, stratégique, orientation et transformatrice.
Tableau 2 : Descripteurs du Cadre de création de valeur et exemples de dimensions
Cycle de valeur | Descripteur | Exemple de dimensions |
Orientation | Interactions avec l’environnement au sens large | Examen des liens dans l’environnement |
Immédiate | Votre expérience de l’EAS | Le plaisir d’être entouré de personnes partageant les mêmes idées |
Potentielle | Ce que le EAS vous apporte | Capital social, outils, conseils |
Appliquée | Ce que vous faites avec ce que vous avez acquis | Confiance; mise en œuvre d’une idée |
Réalisée | Le résultat de la valeur appliquée | Changements au niveau personnel, du groupe et de l’organisation |
Transformatrice | Effets plus profonds ou plus larges | Nouvelles identités et recadrage des perspectives |
Stratégique | Conversations avec les parties prenantes | Alignement et planification délibérée |
Habilitante | Ce qui devrait être mis en place pour rendre l’idée possible | Logistique, éléments secondaires |
Adapté de : Duarte, Culver et Paquette (sous presse).
Par exemple, notre groupe de recherche a créé et soutenu des EAS pour le développement d’entraîneurs de parasports. En utilisant le Cadre, nous avons aidé les participants à organiser leur environnement d’apprentissage afin de mieux comprendre où et avec qui ils ont développé leur pratique. Cela nous a permis de créer collectivement une approche visant à tirer parti des structures existantes dans le système sportif pour renforcer la capacité d’apprentissage, en élargissant le flux et la nature des connaissances. Le succès du projet a été soutenu par une réflexion stratégique sur la manière de favoriser les possibilités d’apprentissage (valeur stratégique et habilitante). Par exemple, la planification de réunions en conjonction avec des moments où les participants se trouveraient déjà au même endroit, comme les tournois nationaux. Ces réunions visaient à co-créer des connaissances (valeur immédiate et potentielle), et ont stimulé la réflexion sur la manière d’utiliser les nouvelles idées et connaissances créées dans cet espace (valeur appliquée). Au cours de ce processus, nous avons écouté attentivement et observé comment et quand les participants appliquaient les nouvelles pratiques, en cherchant des preuves des résultats positifs et négatifs (valeur réalisée). De cette manière, nous pensons avoir modifié la façon dont l’organisation sportive pense à la manière d’apporter des changements (valeur transformatrice).
Mettre en pratique les EAS : Une histoire de création de valeur
La meilleure façon d’expliquer le processus qui peut mener à la création de valeur dans un EAS est de raconter une histoire sur la création de valeur. L’histoire fictive ci-dessous est basée sur nos recherches et est conçue pour vous présenter les huit cycles de création de valeur et certains des éléments cruciaux de l’élaboration d’un EAS efficace. Notre histoire commence lorsque Alex, qui supervise le développement d’une organisation de sport provinciale, nous a téléphoné.
Alex : Bonjour, Diane. Merci de prendre mon appel. La semaine dernière, nous avons tenu notre assemblée générale annuelle et de nombreux participants ont exprimé leur inquiétude quant au fait que les filles abandonnent le sport à l’âge de 14 ou 15 ans. Ce qui est un peu frustrant, c’est que nous avons eu la même conversation l’année dernière. À l’époque, nous avions identifié une certaine lacune et nous avions même assisté à un atelier sur le sujet qui suggérait de créer une communauté de pratique. Ainsi, au début de la saison, nous avons tenu une « communauté de pratique » lors d’une de nos compétitions et nous avons partagé quelques idées qui concernaient les membres de tout le pays. J’ai appris quelques conseils lors de cette réunion, mais personne n’a assumé de leadership et nous ne nous sommes pas rencontrés depuis.
Diane : Bonjour Alex. Malheureusement cela n’arrive pas seulement dans votre sport. Je fais référence à la fois au décrochage des filles et à la mauvaise interprétation par les organisations de ce qu’est une communauté de pratique et de ses limites. Vos commentaires sont pertinents à plusieurs niveaux. Premièrement, le fait d’être enthousiaste lorsqu’on rencontre des gens qui partagent la même passion et qui veulent apprendre est un exemple de ce que la théorie de l’apprentissage social appelle la valeur immédiate. Deuxièmement, les idées, les conseils et l’accès au réseau de personnes sont des dimensions de la valeur potentielle.
Alex : J’aimerais beaucoup en savoir plus sur les autres types de valeur.
Diane : Bien sûr. Ce que votre organisation a fait est un excellent début! Par exemple, rechercher les lacunes dans votre propre sport et m’appeler pour trouver de nouvelles façons de procéder sont deux exemples de valeurs d’orientation. De plus, votre organisation a fait du décrochage des filles une priorité, ce qui est un exemple de valeur stratégique. Une fois qu’une priorité est identifiée et communiquée avec précision aux autres membres de l’organisation, il devient plus facile de justifier l’investissement de ressources pour s’attaquer à cette priorité.
Alex : Des ressources! J’ai peur de ne penser qu’à l’argent et à la manière de gérer toutes les priorités de notre organisation qui est essentiellement bénévole.
Diane : N’ayez pas peur Alex. La valeur habilitante ne se réfère pas seulement aux ressources financières, mais aussi aux ressources humaines, aux connaissances, à la structure, aux médias, etc. Je vais vous donner un exemple. Notre recherche avec Curling Canada a révélé que les entraîneurs de curling en fauteuil roulant en phase de développement voulaient avoir davantage accès aux entraîneurs du programme de l’équipe nationale et discuter de leurs outils et stratégies d’entraînement. Curling Canada a donc apporté une valeur ajoutée de plusieurs façons, notamment en fournissant le logiciel pour les réunions en ligne et en demandant aux entraîneurs de haut niveau de se joindre aux entraîneurs en développement lors de nos réunions et des forums de discussion virtuels.
Alex : Si je suis votre raisonnement, ce que nous avons appelé à tort une « communauté de pratique » n’avait pas l’aspect permanent de l’exemple que vous venez de donner.
Diane : Vous avez raison, mais pour l’instant, concentrons-nous sur ce que l’engagement continu nous permet de produire. Le simple fait d’organiser des réunions, des cours ou des webinaires en ligne ne permet pas aux gens de profiter de ce qu’un EAS peut offrir.
Alex : Comment cela?
Diane : Je vais vous donner un autre exemple tiré de nos recherches : les EAS pour les femmes leaders. Certaines de ces réunions étaient éducatives et les expertes partageaient leurs connaissances et leur expérience par l’entremise d’un webinaire ou d’un atelier. D’autres réunions comprenaient des groupes plus petits où les dirigeantes réfléchissaient et partageaient la façon dont elles appliquaient ce qu’elles avaient appris et les résultats qu’elles avaient obtenus. Ce qui nous amène aux deux valeurs suivantes : appliquées et réalisées. Mais comme on peut s’y attendre, certains changements sont plus faciles à appliquer que d’autres; certains auront besoin d’une valeur habilitante au sein de l’organisation. Bien entendu, négocier les stratégies qui méritent d’être investies et mises en œuvre prend du temps, et il est peu probable qu’une seule réunion suffise. Les valeurs appliquées et réalisées pour le changement nécessitent des conversations stratégiques continues entre des personnes de différents niveaux au sein d’une organisation ou d’un système (par exemple, les formateurs d’entraîneurs, les administrateurs de sport, les bailleurs de fonds, les athlètes, les bénévoles).
Alex : Et pourriez-vous nous faire part des résultats finaux de cette démarche?
Diane : Absolument. Une association sportive a mis en place une politique (valeur appliquée et habilitante) exigeant la présence d’une entraîneuse sur le banc pour toutes les équipes féminines. Ainsi, les athlètes féminines ont bénéficié de la présence d’un modèle féminin (valeur réalisée). De plus, les organisations ont dû investir des ressources pour s’assurer que ces entraîneuses avaient une formation appropriée (valeur stratégique). Un cours réservé aux femmes a ensuite été conçu (valeur habilitante) et a été dispensé avec succès à plusieurs reprises au cours du projet (valeur appliquée et réalisée). Comme vous pouvez le voir, une stratégie peut entraîner divers types de valeur, créant ainsi un effet domino.
Alex : Un effet domino! Ainsi, nous pouvons voir les étapes pour atteindre nos objectifs stratégiques comme des pièces de domino.
Diane : C’est une excellente métaphore, et en utilisant le Cadre de création de valeur, il serait plus facile d’orienter vos pièces de domino, ou vos actions, et d’évaluer leur incidence. Cette évaluation, ou l’attention portée aux effets de la participation à un EAS, peut être formelle ou informelle. Bien que les exemples suivants soient plus structurés, des méthodes simples telles que la désignation d’un ou deux participants pour enregistrer les arrivées et départs à tous les rassemblements peuvent également évaluer la valeur créée, surtout s’il y a un suivi avec les participants concernant leurs histoires de valeur. Certaines mesures du succès sont quantifiables, comme le nombre d’entraîneurs impliqués dans un programme – une grande partie de ce type de données est déjà collectée par les organisations. Dans le cadre de nos recherches, nous avons également utilisé des outils d’évaluation tels que des sondages, des entrevues et des groupes de discussion pour évaluer la valeur. Les sondages sont utiles pour obtenir des évaluations sur l’utilité des informations reçues dans un EAS. Les entrevues et les groupes de discussion sont utilisés pour amener les participants à réfléchir sur leur expérience de participation aux EAS. Par exemple, vous pouvez leur poser des questions sur la façon dont leur participation a changé leurs pratiques ou sur l’influence qu’ils pourraient avoir dans leur organisation. Vous pouvez leur demander des histoires spécifiques sur quelque chose qu’ils ont appris ou changé, et comment cela s’est produit. Ces récits décrivent les activités (valeur immédiate), les résultats (valeur potentielle), les applications (valeur appliquée), les effets (valeur réalisée) et les nouvelles définitions du succès (valeur de transformation).
Alex : Les projets devraient-ils viser à créer de la valeur à chaque cycle?
Diane : Le Cadre de création de valeur ne classe pas les valeurs selon leur importance, et tous les projets ne soutiendront pas la création de valeur dans tous les cycles. De plus, la valeur est dans l’œil du spectateur – les expériences d’un participant peuvent ne pas être les mêmes que celles d’un autre.
Alex : C’est plus complexe que ce que j’avais prévu.
Diane : En effet. Les organisations ne sont souvent pas conscientes de la quantité de travail qu’il faut pour mener un EAS. Nous appelons ce travail « leadership d’apprentissage social ». La recherche autour des communautés de pratique suggère que sans leadership, les initiatives ne continueront pas ou dériveront vers des réunions sans valeur spécifique pour les participants. Le travail des leaders de l’apprentissage social comprend les actions suivantes :
- engager les participants afin d’identifier leurs priorités d’apprentissage;
- organiser des opportunités d’apprentissage;
- tenir des conversations stratégiques au besoin;
- porter attention à la valeur créée (ou non) et aider les participants à reconfigurer l’espace pour mieux permettre des résultats positifs.
Alex : Cela semble être un rôle important. De quelles compétences un leader de l’apprentissage social a-t-il besoin?
Diane : Tout d’abord, le rôle de leader d’apprentissage social peut être partagé au sein de votre groupe, avec différentes personnes qui dirigent des aspects distincts du rôle – que ce soit la communication, l’évaluation, la planification/l’organisation, le réseautage. Un leader d’apprentissage social doit être quelqu’un qui connaît votre contexte, mais pas nécessairement un expert dans votre sport. Il doit faire du travail préalable et connaître qui sait quoi dans le contexte. De plus, un leader d’apprentissage social doit comprendre les rouages du Cadre de création de valeur.
Pour vous aider à comprendre ce rôle, je vais partager un jeu de cartes de réflexion (voir figure 1) qui sert de rappel des huit valeurs et des types de données auxquelles nous devons prêter attention lorsque nous encadrons et évaluons un EAS. L’idée derrière ces cartes est que les leaders d’apprentissage social doivent les garder facilement accessibles et les vérifier régulièrement pour les aider à réfléchir sur l’état de l’EAS. Par exemple, vous pouvez avoir une idée claire de vos aspirations – le changement que vous souhaitez voir. Vous commencerez par la carte de la valeur réalisée. De là, en travaillant dans votre EAS, vous explorerez ce qui doit être mis en place pour atteindre cette valeur réalisée. Ainsi, vous pourriez ensuite considérer quelle valeur potentielle et immédiate doit se produire, et s’il existe des valeurs stratégiques et/ou habilitantes qui devraient être prises en compte. Vous pouvez aussi avoir un exemple de valeur réalisée dans un autre contexte que vous décidez de présenter à notre EAS, et qui peut alors devenir une valeur potentielle pour votre EAS. L’utilisation des cartes de valeur pour réfléchir sur les EAS n’est pas une activité unique. Elle doit être menée tout au long de votre projet. Ainsi, les activités d’évaluation de la valeur et de cadrage sont des processus qui s’entrecroisent.
Figure 1. Jeu de cartes de réflexion sur la création de valeur
Alex : C’est très utile. Par où dois-je commencer?
Diane : Après avoir désigné (et formé si nécessaire) votre ou vos leaders d’apprentissage social, voici quelques étapes simples qui pourraient faciliter votre parcours. Tout d’abord, trouvez d’autres personnes qui veulent faire une différence. Nos recherches montrent qu’il n’est pas si difficile de les trouver. Vous pouvez commencer par un problème ou une lacune qui vous tient vraiment à cœur, ou rassembler les gens et leur demander quelle différence ils veulent apporter. Rien ne rapproche mieux les gens qu’une raison qui les tient éveillés la nuit. Par exemple, l’objectif principal des exemples d’EAS dont j’ai parlé plus tôt était la passion pour l’amélioration du sport pour les personnes handicapées et la recherche de l’égalité des sexes dans le sport. Aller de l’avant avec votre désir de vous attaquer au problème du décrochage scolaire des filles est un excellent point de départ!
Ensuite, encouragez des personnes de différents niveaux de votre organisation ou de votre communauté à participer à votre initiative. Le plus souvent, les problèmes complexes ne peuvent être résolus efficacement par une seule personne ou organisation, mais exigent un effort de collaboration pour les surmonter. Par exemple, le projet Alberta Women in Sport Leadership a réuni des personnes de l’Association canadienne des entraîneurs, six mentors ayant des contacts dans tout le pays et la province, des responsables sportifs de 12 organisations sportives provinciales, ainsi que de nombreuses personnes travaillant au niveau provincial et dans des clubs. Ce qui est important ici, c’est d’encourager la participation de personnes ayant des expériences et des perspectives différentes. C’est la divergence respectueuse et bien gérée, et non le consensus, qui fait avancer un EAS.
Alex : Comment sommes-nous sûrs de trouver la meilleure façon de relever ces défis complexes? Existe-t-il une seule et unique façon de faire les choses?
Diane : C’est une excellente question! Ce que d’innombrables études ont proposé, c’est qu’il existe de nombreuses façons de faire les choses. La créativité, l’intelligence émotionnelle et la collaboration sont considérées comme des compétences majeures du XXIe siècle. Il y a beaucoup d’incertitude quant aux nombreux défis complexes auxquels nous sommes confrontés, et c’est normal. Reconnaître notre incertitude nous conduit à la troisième étape du parcours pour créer un EAS : prêter attention au changement au niveau de l’individu, du groupe et de l’organisation. Permettez-moi de vous présenter à nouveau quelques exemples tirés de nos recherches. Au niveau individuel, certains de nos entraîneurs participants, qui travaillaient dans des régions isolées du pays, ont commencé à se sentir plus confiants en s’engageant avec d’autres entraîneurs dans le cadre de l’EAS. Au niveau du groupe, la légitimité a été donnée à l’EAS lorsque les dirigeantes sportives ont fait une présentation lors d’une conférence sportive provinciale, discutant des avantages de participer à l’initiative et contribuant à promouvoir l’égalité des sexes. Au niveau du changement organisationnel, de nombreuses politiques ont été mises en œuvre à la suite du travail effectué au sein de l’EAS. Par exemple, Curling Canada invite désormais des entraîneurs en développement à participer à des camps d’entraînement pour les athlètes de la prochaine génération, ce qui augmente les possibilités d’apprentissage social parmi les entraîneurs, les athlètes et les équipes de soutien intégrées.
Alex : Je vois. Y a-t-il autre chose que je dois prendre en compte?
Diane : Oui. Avant de vous donner mes derniers conseils, permettez-moi de souligner que cette conversation est un exemple de « valeur potentielle » pour vous, Alex; vous pouvez prendre les conseils de cette conversation et essayer de les appliquer à la question du décrochage des filles dans votre organisation. Mais revenons à mes derniers conseils, qui peuvent sembler évidents : gardez à l’esprit qu’entretenir une communauté de pratique ou un autre EAS consiste à faire interagir les gens dans un environnement sans jugement et sans ego. Cela demande du travail! Quelques petites choses, mais importantes, peuvent aider :
- Encouragez les interactions individuelles ou en petits groupes, que ce soit en personne ou en ligne;
- Organisez des réunions en face à face, si nécessaire, dans le respect des restrictions de santé publique; envisagez de les planifier en conjonction avec des événements organisés, tels que des compétitions ou des assemblées générales;
- Utilisez de manière appropriée les salles scindées en petits groupes lors des rencontres en personne ou virtuelles pour favoriser l’engagement, le temps de réflexion et les discussions en petits groupes. Nourrissez les interactions en ligne et veillez à fournir un soutien technique à chaque participant qui en a besoin. Cela peut nécessiter des vérifications techniques individuelles avant les réunions prévues.
Ces possibilités d’interaction avec les autres participants de l’EAS facilitent le développement de relations et donc de la confiance au sein du groupe. Et la confiance est essentielle pour un EAS efficace. Alex – J’ai hâte d’en savoir plus sur votre EAS et sur la valeur qu’il crée pour les participants et votre organisation!
Conclusion
Bien encadrés et soutenus, les EAS peuvent être utilisés par toute organisation ou tout groupe soucieux de faire une différence en matière de développement professionnel, de diversité et d’inclusion, ou toute initiative de croissance. Un EAS est un outil d’apprentissage pour le XXIe siècle, car il exige des personnes qu’elles travaillent en collaboration pour co-créer des possibilités d’innovation; il les amène à des perspectives nouvelles sur le plan de la pratique. Un EAS est ainsi agile.
Vous souhaitez en savoir plus ? Regardez la présentation de Diane sur la Promotion et évaluation de l’apprentissage social chez les entraîneurs et les organisations de parasports, qui a été présentée à la conférence 2020 de l’Initiative de recherche de Sport Canada.