
Résumé du projet
L’appartenance à une équipe sportive donne aux gens des occasions de travailler ensemble à la réalisation d’un but commun et à l’établissement de relations sociales coopératives. En fait, elle est associée à une foule de bienfaits sur le plan psychologique. Toutefois, se joindre à une nouvelle équipe sportive peut être une expérience stressante pour l’athlète qui n’est pas certain de son rôle et de ses responsabilités à titre de nouveau membre au sein du groupe et qui se demande s’il sera accepté socialement par les autres membres. C’est pourquoi l’arrivée dans une équipe sportive aura une incidence décisive sur la qualité des expériences sportives de l’athlète. Pour établir les pratiques exemplaires liées à la gestion des premières interactions d’un nouveau membre au sein d’une équipe sportive, nous avons examiné les stratégies que les équipes sportives emploient pour l’intégration des nouveaux (c.àd. les stratégies de socialisation). Dans l’étude 1, nous avons mené une enquête qualitative sur la façon dont les athlètes sont intégrés dans les équipes sportives. Dans l’étude 2, nous avons élaboré un questionnaire afin de pouvoir examiner les stratégies de socialisation les plus avantageuses pour créer une ambiance positive dans le groupe. Tout particulièrement, nous avons documenté comment les stratégies de socialisation influaient sur les perceptions des athlètes concernant la cohésion du groupe, leur engagement à l’égard des entraîneurs et des coéquipiers, ainsi que leur intention de continuer de faire partie de l’équipe la saison suivante. Dans l’ensemble, nos constatations ont révélé que les équipes fonctionnent différemment pour l’intégration des nouveaux membres dans leur groupe. Plus important encore, les constatations initiales indiquent que certaines stratégies de socialisation renforcent davantage (a) les perceptions de la cohésion du groupe, (b) l’engagement à l’égard des entraîneurs et des coéquipiers et (c) l’intention de retourner au sein de l’équipe.
Méthodes de recherche
Nous avons utilisé une approche multiméthodes pour examiner de manière systématique l’utilisation des stratégies de socialisation au sein d’équipes sportives. Dans l’étude 1, nous avons mené des entrevues semistructurées auprès de douze entraîneurs et de douze athlètes d’équipes de Sport interuniversitaire canadien (basketball, football, hockey, crosse, soccer). Dans le cadre de chaque entrevue, les participants expliquaient en détail leur expérience au sujet de l’intégration des nouveaux dans leur groupe. Les entrevues duraient en moyenne 40 minutes, ce qui a entraîné la transcription de 425 pages de données. Nous avons ensuite analysé ces données pour en dégager des thèmes communs. Dans l’étude 2, nous avons élaboré un questionnaire fondé sur les thèmes cernés dans l’étude qualitative susmentionnée. Les éléments du questionnaire ont été peaufinés grâce à des procédures quantitatives et qualitatives qui consistent à recueillir les observations des athlètes et des experts (universitaires d’un domaine pertinent). Pour documenter les liens entre les différentes stratégies de socialisation et l’expérience des athlètes à titre de membre d’un groupe, nous avons distribué une version papier du questionnaire à des athlètes féminins et masculins au début de leur saison (197 athlètes, dont 104 femmes) et, à nouveau, à la fin de la saison (218 athlètes, 84 femmes). Diverses disciplines de Sport interuniversitaire canadien (CIC) étaient représentées, dont le basketball, le football, le hockey et le volleyball. En plus d’évaluer les processus auxquels sont soumis les nouveaux d’un groupe (c.àd. les stratégies de socialisation au sein des équipes sportives), nous avons mesuré les perceptions des athlètes au sujet de la cohésion du groupe, de l’engagement et de l’intention de revenir jouer pour l’équipe la saison suivante.
Résultats de la recherche
Dans l’étude 1, nous avons dégagé six grands thèmes englobant les problèmes que rencontrent les nouveaux dans un groupe et la façon dont les groupes tentent de gérer leur intégration. Les observations des entraîneurs et des athlètes ont révélé qu’à son arrivée dans un nouveau groupe, l’athlète doit, dans un premier temps, bien comprendre son rôle au sein de l’équipe et que les processus de socialisation diffèrent selon la capacité et la situation du nouvel athlète. Les athlètes ont néanmoins souligné à quel point ils trouvaient important de se sentir acceptés par les membres du groupe. Les stratégies employées par les équipes sportives pour intégrer les nouveaux sont entre autres de communiquer officiellement les attentes relatives au rôle de ces derniers, de créer des occasions fréquentes d’interaction sociale entre les nouveaux et les anciens, d’inciter ceux ci à assumer un rôle de mentor, et de trouver un équilibre entre appliquer des politiques et des règles strictes et encourager l’individualité.
L’étude 2 a porté sur le lien entre ces stratégies et les perceptions des athlètes concernant le groupe. Selon les constatations, lorsque les équipes mettaient l’accent sur des processus d’intégration socialement inclusifs (c. à d. renforcer le sentiment des nouveaux de qui ils sont en tant que personnes, organiser des activités sociales, encourager les anciens à partager leurs connaissances avec les nouveaux), les athlètes percevaient la cohésion de leur groupe et montraient un engagement plus marqué envers leurs entraîneurs et leurs coéquipiers. De plus, lorsqu’on communiquait officiellement aux nouveaux les attentes relatives à leur rôle, les athlètes indiquaient avoir des intentions plus élevées de retourner au sein de l’équipe la saison suivante. Ces résultats révèlent qu’en dépit de la nature ultra compétitive du sport interuniversitaire canadien, les modes de gestion de l’environnement social pendant l’intégration des nouveaux ont une incidence importante sur la compréhension de la qualité des expériences que vivent les athlètes au sujet de leur sport.
Malgré les avantages d’utiliser diverses approches méthodologiques, il convient d’examiner certains aspects dans le cadre des prochaines recherches. Nos résultats qualitatifs étaient fondés sur des entrevues avec des athlètes et des entraîneurs de cinq équipes sportives traditionnelles qui relataient en général des expériences positives. Il pourrait être utile de chercher intentionnellement à obtenir les observations de participants au sport ayant vécu des expériences négatives lors de leur arrivée dans le groupe afin d’élucider d’autres aspects des processus de socialisation au sein des équipes sportives. En outre, les difficultés associées aux expériences d’arrivée dans un groupe de Sport interuniversitaire canadien peuvent être différentes dans d’autres milieux de socialisation, notamment un groupe de sport de haut niveau ou un contexte de sport pour les jeunes. Enfin, comme ce projet est le premier à examiner comment les stratégies de socialisation au sein des équipes sportives sont liées aux expériences de sport des athlètes, il est prudent de contrevalider les résultats du questionnaire avec un vaste échantillon indépendant, et ce, à divers moments.
Répercussions sur les politiques
Conformément à nos résultats, nous estimons que les façons utilisées pour gérer les expériences d’arrivée des nouveaux dans un groupe jouent un rôle déterminant dans la qualité de l’expérience sportive vécue par les athlètes. Nos constatations vont dans le même sens qu’un nombre croissant de données probantes mettant en lumière l’importance de comprendre les problèmes afférents à la dynamique de groupe auxquels se heurtent les équipes sportives. Pourtant, il est essentiel de mieux faire connaître le lien qui existe entre les problèmes de dynamique de groupe dans le sport et les expériences sportives des athlètes. Les programmes de formation des entraîneurs aux échelons municipal, provincial-territorial et fédéral gagneraient à intégrer les principes de la dynamique de groupe. En ce qui concerne ce projet, nos résultats font ressortir plusieurs stratégies prometteuses pour créer un environnement de groupe socialement accueillant (p. ex. favoriser les relations protégémentor, organiser des activités sociales inclusives pour tous les membres de l’équipe). Les organismes de sport auraient avantage à reconnaître que la façon de gérer les interactions initiales des nouveaux membres avec l’équipe sportive peut éventuellement influer sur la façon de penser, de percevoir et de se comporter des athlètes en tant que membres de leur groupe sportif.
Prochaines étapes
Dans l’avenir, il est crucial de tenir compte de la culture dans la façon dont les individus peuvent répondre aux stratégies de socialisation d’un groupe. Par exemple, des stratégies de socialisation employées au sein d’équipes sportives qui sont bénéfiques pour certaines personnes peuvent susciter des réactions négatives chez d’autres en raison de différences culturelles (p. ex. la culture individualiste par opposition à la culture collectiviste). Pour comprendre les stratégies de socialisation sensibles à la culture utilisées dans les équipes sportives, il apparaît clairement qu’il faut poursuivre les recherches qualitatives auprès de participants de divers milieux.
De plus, il faut étendre l’étude des processus de socialisation au sein des équipes sportives au sport pour les jeunes. Nos résultats montrent bien que les aspects sociaux de la participation à un groupe sont une composante clé des expériences sportives, même à un niveau élevé de compétition du sport amateur. Compte tenu de l’importance d’appartenir à un groupe de pairs à l’adolescence, les types de processus de socialisation qui ont cours dans les contextes de sport pour les jeunes peuvent avoir une incidence considérable sur les expériences de développement personnel vécues grâce au sport.
Principaux intervenants et avantages
- Association canadienne des entraîneurs
- Associations provinciales d’entraîneurs (p. ex. la Coaches Association of Ontario)
- Organismes nationaux et provinciaux de sport (p. ex. Sport interuniversitaire de sport, Ontario University Sport Association)
- Sport Canada