Il est encourageant de voir une participation accrue des filles et des femmes à l’activité physique et au sport, y compris au sport de haute performance au Canada. Toutefois, cette hausse du taux de participation ne s’est pas accompagnée d’une augmentation du nombre de femmes dans les postes d’entraîneurs. En 2015, le gouvernement du Canada a indiqué que seulement 25 % des entraîneurs au Canada étaient des femmes. Plus précisément, dans 54 équipes nationales, seulement 16 % des entraîneurs en chef et 18 % des entraîneurs adjoints étaient des femmes. Dans le système sportif interuniversitaire canadien, où se trouvent la plupart des postes d’entraîneurs à temps plein, on constate également une diminution du nombre de femmes dans les postes d’entraîneurs en chef, qui est passé de 19 % en 2010-2011 à 16 % en 2014-2015. Au niveau olympique, les entraîneures représentent également une minorité. Le taux d’entraîneures était de 20 % aux Jeux d’été de Rio (2016) et de Londres (2012), et ils étaient encore moins élevés aux Jeux d’hiver, soit 13 % à Vancouver (2010) et moins de 10 % à Sotchi (2014) et à Pyeongchang. De plus, lors des récents Jeux paralympiques de Pyeongchang, on ne comptait qu’une seule entraîneure. Non seulement ces statistiques sont inquiétantes, mais elles ne reflètent pas les progrès en matière d’équité entre les sexes d’autres secteurs comme la médecine, les affaires, la politique, le droit, l’ingénierie et l’enseignement supérieur. Il est clair que l’avancement des entraîneures est loin derrière les progrès observés dans ces secteurs.

L’une des stratégies recommandées pour contribuer au recrutement, à la progression et au maintien en poste des entraîneures est le mentorat. Celui-ci est défini comme une relation dans laquelle des conseils, de l’information, de l’orientation, du soutien ou des possibilités de perfectionnement professionnel sont offerts. Le mentorat a d’ailleurs été mis en œuvre avec succès dans des domaines non liés au sport comme les affaires, l’administration, les soins de santé et l’enseignement supérieur, ce qui a permis de garder en poste des femmes et de faire avancer leur cause. Les principaux éléments du mentorat comprennent : l’accent sur l’acquisition de connaissances; les interactions personnelles et directes; le soutien et l’aide à la carrière et au développement professionnel; et les avantages pour le mentor et le mentoré.

En 2015, l’Association canadienne des entraîneurs, l’Association canadienne pour l’avancement des femmes, du sport et de l’activité physique, et une équipe de chercheurs de l’Université de Toronto se sont lancés dans un projet pilote de deux ans pour concevoir, mettre en œuvre et évaluer un programme de mentorat théorique pour l’avancement des entraîneures. Ce projet a abouti à l’élaboration et à la publication de trois guides pour l’avancement des entraîneures par le mentorat : un pour les mentors, un pour les mentorées et un troisième pour les administrateurs du sport. Le but de ces guides est de fournir un processus étape par étape et convivial pour mettre en œuvre le programme de mentorat d’une façon qui pourrait être adoptée par les petits clubs et les organismes nationaux de sport.

Les leaders du sport sont la clé de l’avancement des entraîneures

Lorsqu’on parle de mentorat, on a tendance à se concentrer principalement sur la nature et la qualité de la relation dyadique entre le mentor et le mentoré. Il ne fait aucun doute que l’efficacité d’un programme de mentorat dépend fortement de la qualité de la relation mentor-mentoré. Cependant, il est également reconnu que les leaders organisationnels jouent un rôle clé pour assurer le succès du mentorat. Les leaders identifient la vision et les priorités des organisations, donnent le ton à la culture organisationnelle et modélisent la façon de procéder au changement. En ce qui a trait à l’avancement des entraîneures, les leaders d’organisations jouent un rôle essentiel en assurant et en faisant de l’équité entre les sexes une priorité, en plus d’infuser la culture organisationnelle avec cette priorité. La valeur du rôle du leader dans l’établissement et le soutien d’un cadre pour l’avancement des entraîneures ne peut être surestimée et servira donc de point de mire pour le reste de cet article. Plus spécifiquement, nous aborderons les moyens par lesquels les administrateurs du sport peuvent appuyer les programmes de mentorat pour les entraîneures.

Conseils pour soutenir les programmes de mentorat

Avant qu’un programme de mentorat soit adopté et mis en œuvre, les administrateurs du sport devraient identifier et communiquer dans l’ensemble de l’organisation l’importance de faire avancer les femmes par l’entremise de programmes de mentorat. Les avantages des programmes de mentorat pour les mentorés, les mentors et les organisations sont bien documentés et pourraient être mis en évidence par les administrateurs du sport comme un moyen d’engager les parties prenantes à soutenir et peut-être à s’engager dans des programmes de mentorat (voir tableau 1).

Tableau 1 : Avantages du mentorat

	Avantages du mentorat
Pour le mentoré	Pour le mentor	Pour l’organisation
Augmentation de : • l’apprentissage; • la motivation; • le sentiment d’auto-efficacité; • le sentiment d’appartenance et de connectivité; • la satisfaction professionnelle; • la mobilité professionnelle.	• Sens renouvelé de l’engagement dans l’emploi • Stimulation de nouvelles idées • Amélioration de l’apprentissage et du développement de carrière • Développement d’un capital de réputation • Amélioration des compétences en leadership • Satisfaction de redonner et de contribuer à la prochaine génération	• Sentiment accru de loyauté et d’engagement • Enthousiasme renouvelé • Renforcement du sentiment de collectivité • Stratégie de recrutement • Stratégie de perfectionnement professionnel et de maintien en poste du personnel • Diminution du roulement d’employés • Rehaussement du moral Climat organisationnel positif

Les administrateurs du sport, en collaboration avec divers intervenants, pourraient alors communiquer une vision et des objectifs communs, des attentes générales et un cadre de mise en œuvre. Des mesures de soutien et des ressources devraient être aussi identifiées et accordées, y compris la nomination d’un responsable pour gérer le programme de mentorat. Des recherches antérieures sur le mentorat ont également souligné l’importance d’une séance de formation préalable au mentorat pour les mentors et les mentorés afin de clarifier les processus, les attentes et les principales caractéristiques d’une relation mentor-mentoré efficace.

Au cours du programme de mentorat, les administrateurs du sport jouent également un rôle important dans la réussite de la mise en œuvre. Le maintien de contacts réguliers avec les mentors et les mentorés permet d’assurer un soutien continu, d’être proactif dans la résolution et la gestion des défis ou des conflits, et de suivre les progrès. Selon le type de relation de mentorat utilisé dans le programme, les contacts réguliers peuvent avoir lieu par l’entremise de rencontres individuelles en personne ou en ligne, grâce à des dyades ou en groupes. Il est important que les administrateurs du sport soient disponibles et accessibles pour fournir des conseils, des avis et un soutien continu, ainsi que pour recommander des ressources supplémentaires.

En règle générale, les administrateurs du sport consacrent l’essentiel de leur attention à la conception et à la mise en œuvre des programmes de mentorat, au détriment du suivi et de l’évaluation de ces programmes. Sans données d’évaluation, on ne peut savoir ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas et quelles sont les recommandations des participants pour améliorer le mentorat. Il est donc essentiel de surveiller les expériences des mentors et des mentorés pendant toute la durée du programme. De plus, à la fin du programme, une évaluation formelle devrait être effectuée sous forme d’entrevues individuelles, de groupes de discussion ou de sondages anonymes.

À la fin des programmes de mentorat, les administrateurs du sport jouent un rôle clé dans la célébration et la communication des succès du programme. Comme la plupart des mentors consacrent bénévolement leur temps aux programmes de mentorat, la reconnaissance de leur précieuse contribution est importante pour la durabilité des programmes futurs. Cela peut prendre la forme d’un événement de reconnaissance publique, d’un certificat, d’une plaque ou d’un article dans le bulletin de l’organisation. De même, les mentorés devraient être reconnus pour leur engagement envers leur perfectionnement professionnel. Étant donné le rôle de leadership des administrateurs du sport dans l’avancement des entraîneures, il est important de communiquer le succès du programme de mentorat avec d’autres organisations dans l’espoir que d’autres groupes adoptent le mentorat comme processus d’avancement des entraîneures.

Tableau 2 : Rôle des administrateurs du sport dans l’avancement des femmes grâce au mentorat

Rôle des administrateurs du sport dans l’avancement des femmes grâce au mentorat
En préparation de la mise en œuvre du programme de mentorat	Pendant la mise en œuvre du programme de mentorat	À la fin du programme de mentorat
• Communiquer la vision et le caractère prioritaire de l’avancement des femmes dans l’ensemble de l’organisation • Établir collectivement un cadre pour un programme de mentorat • Fournir des ressources et des mesures de soutien • Assurer la formation préalable au mentorat pour les mentorés et les mentors	• Maintenir un contact régulier avec les mentors et les mentorés • Être disponible et accessible pour offrir du soutien, des conseils et de l’aide pour relever les défis • Recommander des ressources supplémentaires • Assurer un suivi continu de l’efficacité de la relation et du programme de mentorat	• Tenir une évaluation formelle Reconnaître les contributions des participants au programme • Célébrer les succès du programme • Communiquer largement les succès du programme à d’autres organisations pour mettre l’accent sur l’avancement des femmes

Utiliser le mentorat pour faire progresser la diversité

En résumé, les administrateurs du sport jouent un rôle clé dans l’avancement des entraîneures grâce à une bonne mise en œuvre de programmes de mentorat. Bien que les recommandations susmentionnées soient fondées sur le projet de mentorat d’entraîneures, les constatations peuvent s’appliquer à l’avancement des femmes dans d’autres rôles de leadership dans le sport ou à l’élaboration de programmes de mentorat pour l’avancement d’autres groupes sous-représentés, comme les peuples autochtones ou les membres d’autres communautés ethnoculturelles diversifiées. Il est essentiel d’assurer la diversité au sein des organismes pour obtenir un engagement réel des intervenants, favoriser la créativité et la résolution de problèmes, recruter et maintenir en poste le personnel, assurer une croissance durable et créer des distinctions. Tout ceci permettra d’améliorer le système sportif canadien pour tous.

Ressources

Pour obtenir plus de renseignements sur le modèle de mentorat des entraîneures, cliquez ici.

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A propos de(s) l'auteur(s)

Gretchen Kerr est professeure et vice-doyenne à la Faculté de kinésiologie et d’éducation physique de l’Université de Toronto (Ontario, Canada). En plus de se pencher sur la maltraitance des athlètes, le programme de recherche de Mme Kerr se concentre sur l’avancement des femmes comme entraîneures. Avec ses coauteures, elle a récemment publié les Guides de mentorat pour l’avancement des entraîneures pour l’Association canadienne pour l’avancement des femmes, du sport et de l’activité physique et l’Association canadienne des entraîneurs. Ancienne gymnaste artistique de haute performance, Mme Kerr poursuit son engagement envers le sport en tant qu’agente du bien-être des athlètes et membre du comité de sécurité sportive de Gymnastique Canada.

Jenessa Banwell est candidate au doctorat à la Faculté de kinésiologie et d’éducation physique de l’Université de Toronto (Ontario, Canada). Ses recherches portent sur les entraîneures et le rôle du mentorat dans le développement et l’avancement des entraîneures. Mme Banwell est coauteure des Guides de mentorat pour l’avancement des entraîneures, récemment publiés par l’Association canadienne pour l’avancement des femmes, du sport et de l’activité physique et l’Association canadienne des entraîneurs. Elle possède également une vaste expérience en tant qu’ancienne joueuse de soccer de l’USport et de la NCAA, un sport pour lequel elle est maintenant entraîneure à un niveau compétitif.

Ashley Stirling est professeure agrégée, volet enseignement, à la Faculté de kinésiologie et d’éducation physique de l’Université de Toronto (Ontario, Canada). En 2012, Ashley a coécrit un module de formation des entraîneurs pour l’Association canadienne des entraîneurs sur la création d’expériences sportives positives et saines, et elle poursuit ses recherches dans le domaine de la maltraitance des athlètes. Plus récemment, avec ses coauteures, elle a élaboré les Guides de mentorat pour l’avancement des entraîneures pour l’Association canadienne pour l’avancement des femmes, du sport et de l’activité physique et l’Association canadienne des entraîneurs. Le CV de Mme Stirling  comprend aussi une formation de nageuse de compétition.

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