
Introduction et contexte
La santé mentale des athlètes est devenue un enjeu prioritaire, tant sur le terrain que dans les écrits scientifiques. Cependant, la plupart des études se sont principalement penchées sur la santé mentale des athlètes olympiens, des étudiants-athlètes. Cela signifie que d’autres groupes d’athlètes ont été moins étudiés, comme les athlètes en développement. Ces jeunes, âgés de 14 à 25 ans, représentent la prochaine génération d’athlètes concourant dans les équipes nationales et peuvent être vulnérables au développement de ’roubles de santé mentale. En fait, ils se retrouvent dans une période cruciale de leur développement personnel tout en faisant face à des facteurs de risque supplémentaires pouvant influencer négativement leur santé mentale, comme le manque de financement et de soutien de la part de leurs fédérations sportives. À notre connaissance, il n’existe aucune donnée sur cette population au Canada. L’objectif de cette thèse doctorale est d’explorer et d’intervenir sur les enjeux de santé mentale chez les athlètes en développement du Québec. Ce projet de recherche permettra notamment d’établir un portrait sur la santé mentale des athlètes en développement et d’émettre des recommandations pratiques pour le terrain dans l’optique de favoriser leur développement et optimiser leur santé mentale.
Méthodes
Cette thèse doctorale est menée en partenariat avec l’Institut national du sport du Québec, la fondation Aléo, le programme Plan de match, et diverses fédérations sportives provinciales. Pour atteindre l’objectif principal de cette recherche, trois études sont réalisées. À l’heure actuelle, la première étude est terminée, tandis que la deuxième est en phase d’analyse et la troisième est en cours de recrutement des participants. Ce rapport se concentrera donc sur les résultats de la première étude.
Les objectifs de la première étude étaient de 1) identifier la proportion des athlètes en développement présentant des symptômes cliniques d’anxiété et de dépression ainsi que leur niveau de santé mentale et 2) explorer les liens entre la violence psychologique, le type de sport, la performance mentale et les symptômes de troubles de santé mentale et la santé mentale et 3) examiner si la violence psychologique et le type de sport influencent les relations entre la performance mentale et les troubles de santé mentale. Pour ce faire, 283 athlètes en développement ont rempli un questionnaire en ligne.
Principales conclusions et implications
Les résultats démontrent que 20,5% des athlètes en développement présentaient des symptômes cliniques d’anxiété et que 21,2% des athlètes présentent des symptômes cliniques dépressifs. Concernant l’état de la santé mentale, 1,8% des athlètes étaient languissant, 52,3% étaient modérément florissant et 45,9% étaient florissants. De plus, les résultats suggèrent que les athlètes pratiquant un sport d’équipe rapportent une meilleure santé mentale que ceux pratiquant un sport individuel. La violence psychologique venant des pairs ou d’une figure d’autorité est associée à l’augmentation de symptômes dépressifs, tandis qu’uniquement la violence des pairs est liée aux symptômes d’anxiété. Les athlètes qui présentent de bonnes habiletés de performance mentale rapportent moins de symptômes dépressifs et d’anxiété, et bénéficient d’une meilleure santé mentale. Or, l’impact protecteur de la performance mentale sur l’anxiété diminue lorsqu’un athlète a vécu de la violence psychologique d’une figure d’autorité.
Les résultats montrent que les athlètes en développement sont confrontés à plusieurs facteurs qui peuvent affecter leur santé mentale. Il est donc conseillé aux organisations sportives de prendre des mesures proactives, comme augmenter le financement pour les ressources en santé mentale et améliorer l’accès à ces ressources, pour mieux répondre aux besoins des athlètes en développement. Il est également essentiel que les organisations sportives mettent en place des programmes pour prévenir et adresser la violence psychologique dans le sport. Il est recommandé de créer des procédures pour signaler les abus dans le milieu sportif et former les intervenants pour garantir des environnements sécuritaires pour les athlètes en développement. Enfin, il est important de faire appel à des consultants en performance mentale (CMPC) pour non seulement optimiser la performance mentale, mais aussi pour optimiser la santé mentale et la sécurité des athlètes.
Points forts et limites
Cette étude est l’une des premières à dresser un portrait sur la santé mentale des athlètes en développement au Québec et à offrir des pistes de recommandations précieuses pour les organisations sportives, permettant ainsi de mieux cibler les besoins des athlètes en matière de santé mentale. Cependant, la méthode employée dans cette recherche ne permet pas d’établir des liens de causalité, mais seulement de mettre en évidence des associations entre les variables. De plus, les données ont été auto-rapportées, ce qui est généralement moins précis que les évaluations réalisées lors d’entretiens cliniques par des professionnels de la santé.
Conclusions et prochaines étapes
En conclusion, cette étude a permis d’identifier la proportion des symptômes cliniques d’anxiété et de dépression ainsi que le niveau de santé mentale des athlètes en développement québécois. Elle a aussi permis d’identifier des facteurs clés pouvant potentiellement influencer les symptômes de troubles de santé mentale, incluant la violence psychologique. Cela ouvre la voie à l’élaboration de politiques visant à protéger la santé mentale et la sécurité des athlètes en développement. En agissant rapidement contre la violence psychologique, on peut prévenir des effets négatifs à long terme et améliorer les expériences sportives des athlètes. L’étude souligne également l’importance de la performance mentale comme facteur de protection pour la santé mentale, ce qui nécessite d’intégrer cet aspect dans les interventions. Il est essentiel de fournir des ressources, comme l’accès à des consultants en performance mentale (CMPC) à tous les niveaux de développement, pour soutenir ces athlètes. Enfin, davantage de recherches sont nécessaires pour mieux comprendre les enjeux liés à la santé mentale des jeunes athlètes et développer des soutiens adaptés.
Les prochaines étapes se concentreront principalement à terminer les deux autres études. La deuxième étude se concentre sur l’identification des barrières et des facilitateurs aux ressources en santé mentale, selon la perception des athlètes en développement et des entraîneurs. Enfin, la troisième étude porte sur la conceptualisation, la mise en place et l’évaluation d’une intervention visant à normaliser l’importance de la santé mentale dans les environnements sportifs des athlètes en développement. En d’autres mots, cette étude permettra de former des entraîneurs d’athlètes en développement à intégrer des pratiques favorables au soutien de la santé mentale des athlètes dans leur coaching. Grâce à cette formation, les entraîneurs seront mieux équipés pour créer un environnement sportif sécuritaire favorisant le développement et l’attente à l’excellence de ces athlètes. Cette initiative contribuera à sensibiliser l’ensemble de la communauté sportive à l’importance de la santé mentale, facilitant ainsi une approche holistique du développement des athlètes en développement.