Mise en œuvre d’un programme de développement des jeunes axé sur le sport et sensible aux traumatismes dans un organisme communautaire national 

Résumé du projet 

Les organismes communautaires peuvent mettre en place des programmes de développement des jeunes axés sur le sport et sensibles aux traumatismes pour soutenir les jeunes mal desservis qui ont un risque élevé d’être exposés à des traumatismes. Ces programmes sont supervisés par des animateurs qui créent un cadre sécuritaire, reconnaissent la détresse que causent les traumatismes chez les jeunes et y réagissent, et favorisent la guérison et la résilience des jeunes.  

Le programme Bons rebonds (Bounce Back League) a été créé en partenariat avec BGC Canada, un organisme communautaire national à but non lucratif qui vient en aide aux jeunes mal desservis. L’objectif de ce projet de recherche était de voir comment Bons rebonds avait été mis en œuvre et d’en examiner les résultats.  

Questions de recherche :  

1. Quels ont été les réussites, les défis et les leçons tirées de l’élaboration de Bons rebonds? 
2. Comment les animateurs se sont-ils familiarisés avec le programme? 
3. Comment les animateurs ont-ils appliqué le programme? 
4. Quels ont été les résultats du programme (sur les animateurs, les clubs et les jeunes)?

Les résultats de ce travail ont permis de comprendre :  

1. la valeur des approches de développement des jeunes sensibles aux traumatismes dans ce contexte;  
2. les animateurs, les restrictions et les stratégies nécessaires pour garantir l’efficacité de la planification, de la formation des formateurs et de la prestation du programme; 
3. l’efficacité du programme et ses retombées potentielles sur les animateurs et le développement des jeunes

Les fournisseurs de programmes sportifs pourront utiliser ces résultats pour éclairer la prise de décisions concernant l’adoption de ces approches, qui peuvent faire toute la différence dans l’avenir des jeunes mal desservis.  

Méthodes de recherche 

Le projet a été dirigé par une équipe de direction multidisciplinaire composée d’administrateurs de BGC Canada, d’experts-conseils d’Edgework Consulting et de chercheurs de l’Université d’Ottawa et de l’Université de la Colombie-Britannique. L’équipe a travaillé sur l’élaboration, la mise en œuvre, l’adaptation et l’évaluation du projet. 

Sur une période de quatre ans, les animateurs de 18 clubs participants ont : a) suivi des ateliers de formation initiale; b) conçu et offert le programme Bons rebonds; et c) profité d’un soutien constant et de possibilités d’apprentissage (p. ex. mentorat, réunions mensuelles et communications sur Slack, un espace de travail en ligne). Chaque programme Bons rebonds avait lieu une fois par semaine, après l’école, et s’adressait à des jeunes de 9 à 12 ans.  

De multiples méthodes de collecte de données ont été utilisées : entrevues (individuelles et de groupe) avec les animateurs, carnets de bord remplis par les animateurs, sondages auprès des animateurs, évaluations par les animateurs de la participation des membres, discussions sur Slack et observations des chercheurs sur les possibilités de formation et les méthodes des animateurs.  

Résultats de recherche 

Quels ont été les réussites, les défis et les leçons tirées de l’élaboration de Bons rebonds?

Les réussites comprennent ce qui suit :  

1. Le programme Bons rebonds a été mis en œuvre dans trois clubs lors des années du projet pilote (2017 à 2019), dans dix clubs supplémentaires lors de son expansion (2019-2020) et dans cinq autres clubs pendant la pandémie (2020-2021). Plus de 700 jeunes y ont participé. 
2. Plus de 40 animateurs ont reçu une formation et ont animé des volets du programme en y intégrant des aptitudes à la vie quotidienne. 
3. Les animateurs jugeaient important d’offrir un programme intentionnel et structuré où ils pouvaient appliquer des approches de développement des jeunes sensibles aux traumatismes (plutôt que des activités sportives non structurées sans inscription). 
4. L’établissement de liens entre les adultes et les jeunes a permis à ces derniers de se sentir plus à l’aise de parler d’un problème à un membre du personnel, et au personnel d’être plus réceptif. 
5. Les jeunes qui ont passé plus de temps dans le programme ont acquis plus de compétences et adopté plus de comportements prosociaux. 
6. Les jeunes ont affirmé se sentir acceptés, s’être fait des amis et avoir acquis des aptitudes sportives et à la vie quotidienne. 

Les défis comprennent ce qui suit :  

1. Le taux de roulement des animateurs, qui a nui à l’établissement de relations et à la conservation du savoir et des aptitudes liés au programme au fil du temps. 
2. Le manque de fonds, qui a fait obstacle à l’embauche et au maintien en poste du personnel nécessaire pour offrir un programme efficace. 
3. Le fait d’amener les jeunes à acquérir des aptitudes à la vie quotidienne et à les appliquer. 
4. L’emploi du temps des jeunes, parfois occupé par d’autres activités (sportives et non sportives) en dehors de BGC, ce qui pouvait mener à de l’absentéisme et à des problèmes de participation à long terme. 
5. La pandémie, qui a causé la fermeture de plusieurs clubs, lesquels ont ainsi perdu des participants et du personnel. 

Les leçons comprennent ce qui suit : 

1. La mise en œuvre graduelle du programme a permis d’apprendre par essais et erreurs, de déterminer quelles caractéristiques étaient essentielles et d’adapter le programme à la lumière de ces observations. 
2. Le fait de comprendre les capacités de chaque club (ressources et personnel) et de travailler en fonction de ces moyens, au lieu de chercher à en ajouter, a facilité la mise en place du programme et allégé le fardeau des animateurs. 
3. Il était important de maintenir une communication continue avec l’équipe de direction et les membres de la communauté pour tisser des liens solides et renégocier la vision et les priorités du projet en fonction de l’évolution des besoins de la communauté. 

Comment les animateurs se sont-ils familiarisés avec le programme Bons rebonds?

Les animateurs ont apprécié les possibilités de formation et de soutien : 

1. Dont la prestation était intéressante et qui intégrait un apprentissage axé sur les problèmes ainsi que des activités d’apprentissage pratiques; 
2. Dont la matière était utile à leur pratique et à leur réalité; 
3. Qui proposaient une formation donnée par des experts compétents et crédibles qui présentaient des exemples concrets du programme en action; 
4. Dont le cadre favorisait les échanges entre pairs de divers clubs. 

Les animateurs ont aussi appris :  

1. En appliquant leurs méthodes (par essais et erreurs) et en les adaptant aux besoins des jeunes; 
2. En discutant avec d’autres animateurs; 
3. En remplissant leur carnet de bord pour réfléchir aux réussites et aux difficultés associées à leurs méthodes de travail; 
4. En consultant des ressources sur Slack.  

Les résultats de cet apprentissage comprennent ce qui suit : 

1. Une meilleure compréhension de la prévalence et des répercussions des traumatismes sur le cerveau, le corps et le comportement des jeunes, et du rôle de l’animateur pour favoriser la guérison par le sport.  
2. Un changement d’attitude face à l’importance de la formation pour aborder différemment leurs méthodes de travail actuelles auprès des jeunes et acquérir de nouvelles compétences.  
3. Les connaissances acquises pendant la formation ont pu être appliquées lors des interactions avec les jeunes dans le cadre d’activités sportives et non sportives qu’ils animaient. 

Les résultats ont montré l’importance de donner aux animateurs une formation pertinente et adaptée au contexte afin de faciliter l’amélioration des connaissances, des compétences et des attitudes et de donner aux animateurs la confiance nécessaire pour mettre en pratique leurs acquis. De plus, le fait de leur offrir une variété de possibilités d’apprentissage personnel et social sur une base continue peut les encourager à apprendre et à partager leurs connaissances avec d’autres dans leur travail.

Comment les animateurs ont-ils appliqué le programme Bons rebonds?

Tous les programmes Bons rebonds ont démontré qu’ils favorisaient la création de relations de soutien avec les adultes et les pairs. Des différences ont toutefois été constatées selon que le programme était offert par un animateur formé ou non formé. Les animateurs formés avaient plus de facilité à maintenir la structure du programme, à maximiser la participation des jeunes aux activités physiques et à animer des discussions sur les aptitudes à la vie quotidienne. Ils ont cependant moins bien réussi à favoriser le développement des compétences liées au sport que leurs collègues non formés qui ont adopté une approche plus traditionnelle du développement des compétences physiques. 

Les résultats ont montré l’importance de la formation pour la prestation d’un programme de qualité et la nécessité d’améliorer la formation de Bons rebonds pour que les animateurs acquièrent des compétences en entraînement sportif et en développement des athlètes en plus des compétences en enseignement des aptitudes à la vie quotidienne.

Quels ont été les résultats du programme Bons rebonds (sur les animateurs et les jeunes)?

Les animateurs de longue date : 

1. Ont changé leur façon de voir leur travail auprès des jeunes et ont reçu les outils pour accompagner les jeunes au quotidien; 
2. Sont devenus des porte-parole du programme et ont continué à s’investir bénévolement dans des initiatives pour assurer sa pérennité (création de contenu de formation en ligne, mentorat/formation auprès d’autres animateurs de leur club, etc.). 

Les jeunes ont développé un langage associé au programme Bons rebonds, adopté des comportements prosociaux et acquis des aptitudes à la vie quotidienne. Les animateurs ont cependant eu du mal à amener les jeunes à appliquer ces aptitudes en dehors du programme, ce qui peut s’expliquer en partie par le manque de soutien aux activités de transfert. BGC devrait envisager de former tous les animateurs de ses clubs au développement des jeunes et aux approches sensibles aux traumatismes pour qu’ils puissent offrir un soutien constant et élargir leurs horizons en matière d’apprentissage et d’application des aptitudes à la vie quotidienne.  

Répercussions du point de vue des politiques et des programmes 

Intégrer aux programmes sportifs des approches bienveillantes et sensibles aux traumatismes pour le développement des jeunes peut être utile pour répondre aux besoins des jeunes et leur offrir un cadre où acquérir des aptitudes à la vie quotidienne par le sport. Les fournisseurs de programmes sportifs devraient envisager de former les animateurs à ces approches afin qu’ils puissent adopter une compréhension holistique de leurs jeunes (au-delà du statut d’athlète), leur donner les compétences pour répondre aux jeunes qui vivent de la dysrégulation et soutenir explicitement le développement des aptitudes à la vie quotidienne.  

Le roulement du personnel est inévitable dans ce secteur. Des possibilités de formation et de perfectionnement professionnel continus sont nécessaires pour que les animateurs acquièrent des connaissances de base (p. ex. par le biais de modules de formation autoguidés en ligne), mettent en commun leur savoir (p. ex. grâce à des communautés de pratique) et engagent une réflexion (p. ex. par le biais du mentorat individuel ou de groupe). 

Les fournisseurs de programmes sportifs devraient envisager d’évaluer continuellement le programme. Dans le cadre du programme Bons rebonds, le fait que les animateurs devaient remplir un carnet de bord à la fin de chaque séance servait à la fois d’outil de réflexion et d’outil d’évaluation pour comprendre les réussites, les défis et les stratégies quant à la prestation du programme. Ces activités ont servi à améliorer le soutien apporté aux animateurs dans leur travail ainsi qu’à adapter le programme et le matériel de formation. 

Prochaines étapes 

Puisque les méthodes des animateurs peuvent être appliquées en dehors du programme Bons rebonds, mais que ce transfert est difficile par le programme à lui seul, il convient d’explorer comment passer d’interventions basées sur des programmes à des approches basées sur des systèmes afin de créer des cadres plus vastes favorisant l’acquisition d’aptitudes à la vie quotidienne. Les prochaines étapes consisteront à étudier comment intégrer des approches de développement des jeunes sensibles aux traumatismes dans toutes les activités des clubs, que ce soit les programmes non sportifs, l’administration et le leadership, les ressources humaines, la participation des familles et les activités de proximité dans la communauté. Ces efforts contribueront à l’acquisition de connaissances communes au sein des clubs et de systèmes plus adaptés aux besoins des jeunes. 

Application des connaissances 

Des infographies, des vidéos, des rapports et des présentations ont été conçus et remis à BGC Canada et aux intervenants de tout le Canada.