Les changements climatiques et l’avenir des Jeux olympiques d’hiver : Le point de vue des athlètes et des entraîneurs 

Résumé du projet 

Le Comité international olympique (CIO) reconnaît les risques que posent les changements climatiques pour les Jeux et sa responsabilité en tant que chef de file dans l’action pour le climat. L’hiver est en train de changer aux sites hôtes des Jeux olympiques d’hiver (JO d’hiver) antérieurs. Il est donc important de comprendre les risques liés aux changements climatiques, c’est-à-dire les risques auxquels les athlètes s’exposent pendant ces événements sportifs d’envergure. Une enquête menée auprès de 339 athlètes et entraîneurs de haut niveau dans 20 pays a permis de définir des conditions équitables et sécuritaires pour les compétitions de sports de neige. La fréquence des conditions non équitables et non sécuritaires a augmenté au cours des 50 dernières années dans les 21 villes hôtes des JO d’hiver. La probabilité que ces conditions se produisent augmente dans tous les scénarios de changement climatique futurs. Dans un scénario d’émissions faibles conforme à l’Accord de Paris sur le climat, le nombre d’hôtes fiables sur le plan climatique demeure presque inchangé tout au long du 21e siècle (9 au milieu du siècle et 8 à la fin du siècle). La géographie des régions où se tiennent les JO d’hiver change radicalement si les émissions mondiales restent sur la trajectoire des deux dernières décennies, ce qui ne laisse qu’une seule ville hôte fiable d’ici la fin du siècle. Les athlètes ont exprimé leur crainte quant à l’avenir de leur sport et à la nécessité pour le monde du sport de devenir une force puissante pour encourager et accélérer la lutte contre les changements climatiques. 

Méthodes de recherche 

Un sondage en ligne (hébergé sur la plateforme de sondage Qualtrics de l’Université de Waterloo), comportant des questions ouvertes et fermées, a été utilisé pour obtenir un aperçu des préférences en matière de climat pour la compétition de 339 athlètes et entraîneurs de haut niveau dans 20 pays, dans les sports de neige suivants : le ski alpin, le ski nordique, le ski acrobatique, le saut à ski/combiné nordique, le snowboard alpin et le snowboard acrobatique. On a demandé aux participants de classer une série de conditions climatiques (p. ex. brouillard, poudreuse fraîche, neige traitée chimiquement, surface glacée, vent) et de stratégies d’adaptation (p. ex. descentes d’entraînement annulées, heures de départ retardées), afin de déterminer les plages de températures idéales pour la compétition et les seuils qui définiraient les conditions non sécuritaires et non équitables. On leur a également posé des questions ouvertes sur leurs expériences et leurs réactions face à l’incidence des changements climatiques sur leur sport.  

Les données quotidiennes sur les températures et les précipitations de 1950 à 1969 et de 2000 à 2019 ont été utilisées pour examiner les changements actuels et créer une période de référence contemporaine pour les scénarios de changement climatique futurs. Les modèles SkiSim2 ont généré des données sur l’épaisseur de la couverture de neige, en y intégrant les chutes de neige naturelle et les capacités avancées en matière de fabrication de neige artificielle. Des scénarios de changements climatiques fondés sur des ensembles multimodèles (températures et précipitations pour les mois d’hiver, de décembre à février) pour chacune des régions hôtes des JO d’hiver ont permis une analyse des modèles climatiques mondiaux utilisés pour préparer des simulations en vue du cinquième rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) [Taylor et coll., 2012]. On explore un avenir au milieu du siècle (années 2050) et à la fin du siècle (années 2080) dans un scénario d’émissions faibles RCP 2.6, qui est représentatif d’un avenir conforme aux cibles de réussite de l’Accord de Paris sur le climat, et dans un scénario d’émissions élevées RCP 8.5, qui est représentatif de la poursuite de la trajectoire actuelle des émissions mondiales. Ces scénarios ont ensuite été comparés aux résultats qualitatifs des athlètes et des entraîneurs et ont servi à élaborer quatre indicateurs climatiques de faibles quantités de neige, de pluie, de neige mouillée et de températures inacceptables. 

Résultats de recherche 

La température diurne moyenne de février dans les villes hôtes des JO d’hiver a augmenté de façon constante, passant de 0,4 °C aux Jeux des années 1920 à 1950 à 3,1 °C aux Jeux des années 1960 à 1990 et à 6,3 °C aux Jeux du 21e siècle (y compris ceux de Beijing). Dans le scénario d’émissions faibles (RCP 2.6), les températures de février dans les villes et régions hôtes des JO d’hiver antérieurs devraient augmenter en moyenne de 1,9 °C d’ici les années 2050 et de 2,7 °C d’ici les années 2080, alors que, dans le scénario d’émissions élevées (RCP 8.5), un réchauffement plus important de 2,1 °C (années 2050) et de 4,4 °C (années 2080) est prévu. Ces données représentent des températures beaucoup plus élevées que la température idéale (de -10 °C à -1 °C) indiquée par les athlètes et les entraîneurs.  

Les conditions les plus équitables et les plus sécuritaires déterminées par les entraîneurs et les athlètes comprenaient de la neige compacte, des surfaces injectées, de la neige dure glacée et de la neige artificielle, tandis que les conditions non sécuritaires comprenaient du brouillard, une faible couverture de neige (autour des pistes de course ou des installations), du vent et de la neige mouillée, suivis de descentes d’entraînement annulées et de modifications de parcours de dernière minute.  

D’ici le milieu du siècle, de 9 à 12 sites (à émissions faibles et à émissions élevées) devraient connaître plus souvent des conditions de neige moins abondantes. Chez 7 d’entre eux, la probabilité de connaître une diminution de la couverture de neige est supérieure à 50 % (ce qui signifie une grande réduction de la neige naturelle). Vers la fin du siècle, peu de changements supplémentaires se produisent dans le scénario d’émissions faibles, mais une augmentation marquée se produit dans le scénario d’émissions élevées : chez 15 des 21 sites, la probabilité de diminution de la couverture de neige est de 50 % (et chez 7 d’entre eux, cette probabilité est supérieure à 90 %). Un seul endroit en Amérique du Nord (Salt Lake City), en Europe (Albertville) et en Asie (Sapporo) garde une probabilité de moins de 10 % que ces types de conditions non équitables et non sécuritaires se produisent chaque jour dans le scénario d’émissions élevées des années 2080. 

Incidences du point de vue des politiques et des programmes 

Grâce à cette meilleure connaissance des exigences liées à la tenue de compétitions équitables et sécuritaires, l’incidence prévue des changements climatiques sur la capacité des hôtes des JO d’hiver antérieurs d’offrir de façon fiable le programme toujours grandissant des sports de neige est comparativement plus importante que dans l’étude de Scott et coll. (2018), en particulier dans les scénarios d’émissions élevées (figure 5). Les nouvelles perspectives sur les conditions jugées sécuritaires et équitables qu’apportent les athlètes de sports d’hiver de haut niveau et leurs entraîneurs représentent également une contribution à l’avancement de la codification claire des lignes directrices sur la compétition par les organisations sportives internationales, particulièrement en ce qui concerne les températures plus chaudes, les conditions de neige et les réactions des organisateurs d’événements. D’un point de vue positif, dans un scénario d’émissions faibles conforme aux cibles de l’Accord de Paris sur le climat, le nombre d’hôtes fiables demeure presque inchangé tout au long du 21e siècle (9 dans les années 2050 et 8 dans les années 2080). Le scénario d’émissions élevées se traduit par une capacité très réduite d’offrir de façon fiable des conditions équitables et sécuritaires, ce qui incite les intervenants du sport à participer activement à la lutte contre les changements climatiques. 

La ville de Calgary est beaucoup plus résiliente aux risques climatiques que Vancouver, mais la viabilité climatique d’autres régions au Canada devrait être évaluée en ce qui concerne l’entraînement, la compétition et les événements internationaux.  

Dans les commentaires du sondage, les athlètes et les entraîneurs ont insisté sur le fait que les organisations sportives nationales et internationales, comme le CIO, sont les plus responsables et influentes de la communauté sportive quant au leadership en matière de changements climatiques. La communauté sportive très influente et ses athlètes célèbres constituent une force potentiellement puissante pour unir, inspirer et accélérer le changement nécessaire à l’une des plus importantes transitions sociétales de l’histoire. 

Prochaines étapes et questions à examiner

  • Comment les athlètes, les entraîneurs, les organisations sportives, les événements, les sites de compétition, les commanditaires, les fournisseurs d’équipement et les autres intervenants peuventils agir pour atténuer les répercussions des changements climatiques sur les sports d’hiver et s’y adapter?  
  • Quelles répercussions la perte de lieux de compétition et d’entraînement aura-t-elle sur la culture, la participation et l’industrie des sports d’hiver en général?  
  • Comment les changements climatiques se répercuteront-ils sur l’équité et l’accessibilité des sports d’hiver, étant donné que les participants devront voyager davantage et payer plus cher pour y participer dans l’avenir? 
  • Les Jeux olympiques d’hiver et les athlètes de sports d’hiver sont-ils des agents de changement, capables d’utiliser leur rôle pour atteindre les objectifs de l’initiative Sport au service de l’action climatique? Si oui, comment? 

Application des connaissances 

Cette recherche a été publiée dans la revue Current Issues in Tourism en janvier 2022. Elle a reçu plus de 800 mentions dans les médias, ce qui comprend des entrevues avec le New York Times, la BBC, la SRC, la NBC, le journal The Guardian et de grands médias sur le sport et le climat (Sports Illustrated, Climate Network), avec une portée potentielle de 2,2 milliards de personnes. Protect Our Winters Canada, un organisme de sport et de lutte contre les changements climatiques, a permis de renforcer l’engagement sur les médias sociaux.  

Il serait utile que Sport Canada, Alpine Canada Alpin, Canada Snowboard, Nordiq Canada et les associations provinciales de ski et de snowboard reçoivent le présent document de recherche et soient encouragés à s’impliquer dans la lutte contre les changements climatiques au sein de leurs réseaux afin d’atténuer les répercussions sur leur sport et leurs participants. Mentionnons notamment la mobilisation ou le retrait de commanditaires à forte intensité carbonique, la réduction des déplacements dans leurs circuits, la pression exercée sur la Fédération internationale de ski (FIS) et d’autres organisations de sport ou destinations pour la tenue d’événements carboneutres ainsi que la participation à des actions locales pour le climat et à des mesures d’adaptation au sein des collectivités. 

About the Author(s) / A propos de(s) l'auteur(s)

Dr. Natalie Knowles est titulaire d’un doctorat en géographie et en gestion de l’environnement de l’université de Waterloo.

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