
Introduction et contexte
La recherche explore le concept de risque en relation avec les activités des jeunes adultes au sein de divers environnements sportifs et de loisirs. En raison des nombreuses définitions larges et divergentes qui sont associées au risque et de sa nature exhaustive et évolutive au sein et au-delà du sport et des loisirs, les études sur le risque ont généralement souffert d’une incapacité à dégager la complexité de l’atténuation et de la gestion du risque. L’incertitude qui en résulte laisse souvent dans une situation précaire les personnes qui évoluent au sein d’environnements récréatifs en les exposant non seulement à des risques physiques, mais aussi à des risques sociaux ou psychologiques découlant des valeurs et des attentes liées à la participation. En réponse à cette réalité, la recherche présentée s’engage dans l’élaboration d’une théorie critique du risque qui cherche à embrasser la complexité de l’expérience et de la gestion du risque dans le sport. Les résultats fournissent alors un aperçu intéressant de l’interaction du risque dans les environnements de sport et de loisirs où les jeunes athlètes doivent souvent faire face à un large éventail de risques qui peuvent en définitive menacer leur participation.
Méthodes
Des méthodes narratives ont été utilisées dans la recherche afin d’amener les jeunes adultes à s’exprimer sur leur perception du risque dans divers environnements de sport et de loisirs. Plus précisément, le chercheur principal a mené des entretiens narratifs avec un groupe de jeunes adultes (16-25 ans; n=14) afin d’entendre leurs histoires sur la gestion ou l’atténuation du risque. Les chercheurs ont également tenté de reconnaître les réalités visuelles associées au risque en proposant aux participants de prendre des photos des moments qui représentent un risque dans leur vie quotidienne. Les données issues des entretiens et de l’activité de capture d’images ont ensuite été analysées dans le but de comprendre comment naissent les histoires sur les risques et leur importance dans notre façon de concevoir le rôle du risque dans le monde.
Principales constatations et répercussions
L’analyse des données issues des entretiens et de l’activité de capture d’images présente ensuite trois récits sur les risques qui contribuent à décrire l’origine de telles histoires, les facteurs qui influencent leur création et la manière dont elles sont comprises au niveau individuel. Il est important de noter qu’il existe une distinction concrète entre les histoires (c’est-à-dire ce que les gens racontent) et les récits (c’est-à-dire les histoires qui circulent dans la société et influencent la façon dont les individus structurent et comprennent leurs propres histoires). En élaborant une typologie narrative, nous cherchons donc à mettre en évidence les points communs entre les types de récits sur lesquels les participants se fondent pour raconter leurs propres histoires. Plus précisément, grâce à l’application et à la description des histoires des participants, la typologie narrative présente : 1) le récit sur la responsabilité; 2) le récit sur la poursuite; et 3) le récit sur le grand risque. Le récit sur la responsabilité donne à penser que le risque relève d’une responsabilité individuelle, à l’abri de toute influence collective. Le récit sur la poursuite présente le risque comme quelque chose qu’il faut affronter, défier et surmonter. Enfin, le récit sur le grand risque met l’accent sur l’incertitude face à la réalité, à savoir que l’existence au, XXIe siècle, comporte une confrontation au risque à chaque instant.
Alors, que pouvons-nous dégager de cela? Pourquoi créer une typologie narrative dans le contexte du sport et des loisirs? Comme l’affirme Frank (2010), « [traduction] le fait de nommer les types de récits peut permettre la narration d’histoires particulières, mais aussi libérer les gens des histoires qu’ils ne veulent plus raconter » (Frank, 2010, p. 119). Pour illustrer cet aspect, la recherche a recours à la question des commotions cérébrales dans le sport et les loisirs comme s’il s’agissait d’une sorte de terrain d’essai pour réfléchir à l’application de la typologie narrative. Plus précisément, je remets en question le rôle de l’éducation en tant que principale méthode de prévention des blessures en utilisant le récit sur la responsabilité pour me demander qui, en définitive, devient responsable des blessures. Le récit sur la poursuite me permet quant à lui d’explorer les poursuites supposées par les chercheurs et les praticiens et la façon dont ces hypothèses peuvent avoir une incidence sur les expériences des jeunes adultes en matière de blessures et de réadaptation. Ensuite, grâce au récit sur le grand risque, je cherche à apporter des moments de lucidité dans un paysage de connaissances sur les commotions cérébrales qui met l’accent sur les pires scénarios, brouillant les effets réels et pratiques des blessures dans le cadre de débats publics intenses sur les coups portés à la tête. Le fait de nommer les types narratifs de cette manière peut permettre de remodeler la relation d’une personne avec les environnements sportifs et de loisirs en éliminant les attentes néfastes en matière de tolérance au risque. Du point de vue du praticien ou du chercheur, je pense que la typologie peut nous aider à passer d’une réponse très réactive, qui repose sur les sciences médicales, à des stratégies plus proactives et préventives fondées sur une meilleure capacité à communiquer, à écouter les jeunes et leurs histoires et à s’engager auprès d’eux.
Points forts et limites
Les points forts de ce travail résident dans l’approche novatrice de l’exploration du risque chez les jeunes adultes, dans le contexte du sport et des loisirs. Tout au long de la thèse, les participants occupent une place importante, ce qui signifie que les athlètes, les parents ou les entraîneurs peuvent échanger avec le monde et reconnaître les histoires qui leur sont familières. Cela peut être à la fois valorisant et rassurant, en particulier pour les jeunes. Les limites de ce travail résident dans ce que celui-ci nous demande de faire en tant que défenseurs du sport et des loisirs : amorcer un changement de culture est un travail long et difficile. Les athlètes, les parents, les entraîneurs et les dirigeants de ligues ont tous un rôle à jouer dans la mise en place d’une culture du sport et des loisirs qui soit inclusive, accessible et sûre. Reconnaître les histoires sur les risques est un élément important de ce processus.
Conclusions et prochaines étapes
L’étude conclut en suggérant que la compréhension des perceptions et des expériences du risque – ou des histoires sur les risques – dans le cadre du sport et des loisirs chez les jeunes adultes représente une étape importante dans la résolution des problèmes liés aux blessures, à l’appartenance et à l’identité. Les prochaines étapes consisteront à appliquer la typologie narrative dans un contexte plus détaillé au sein de différents environnements sportifs afin de comprendre comment les récits sur les risques façonnent les histoires sur les risques dans des contextes particuliers.